Bertrand Laverdure, Ce livre ne s’adresse qu’a 0,00005% de la population

Un gros plan d'un homme barbu. Un gros plan d'un homme barbu.
Ce titre n’est pas banal. Je questionne les jeunes, les boomers, les gays. Aimez-vous la poésie ? On me dit souvent que c’est trop romantique. Les jeunes s’identifient au Slam. Pour moi, la poésie est la science de l’âme. Elle approfondit l’instant présent, sa structure, la structure de la conscience.
L’imaginaire (un idéal)

Laverdure est philosophe. Il est un observateur de notre époque.

« Vous conspuez le cynisme et les apocalypses
Les frontières nettes et les identitaires
Aucun jugement de valeur (…)
Nous clivons. Nous scindons. Nous coupons. Nous choisissons.

Dans notre petit monde égaré. Sur une tête d’épingle » (p.16)

Debout sur l’échafaud, le poète condamne le monde réel. Il tend à l’extrême. Il bascule souvent. L’autre est un absolu. Sa poésie est vertigineuse. Il se dédouble. « Ma solitude dessine une œuvre d’art livrée aux Salicaires du pollen des brins vifs. » (p. 42) Des pièces qui ressemblent à des bateaux affectés sur lesquels ils travaillent. Il cherche des sorties, des spectacles magnifiques (Schopenhauer). Le malheur s’affranchit de lui-même.

L’amour colocataire

Une expérience pour Laverdure. Une expérience sensorielle. Il a une vision poétique de la vie réelle. Il aime scrupuleusement la vie en colocation.

« J’essaie de comprendre l’amour colocataire.

Cette nouvelle façon de marcher à deux ou à trois. Ces tentatives de voter
En tranchant les cordes de l’argent
Les nœuds de la jalousie. » (p.47).

Comme Jean Genet, il veut la réalité entière. Le poète réinvente le procédé. Il refuse farouchement le monde tel quel. Peut-être que cette vision est une inversion, une ascèse au cœur du monde des vivants? « Sa poésie est une littérature neuve et autonome. Littérature entre fiction et réalité. La plus réduite. » (1)

La mort du casting

Se promener seul à Montréal. Laisser des graffitis. Il est partout. Il prend le métro. C’est un poète solitaire qui observe le monde soumis à la réalité qu’il vit. Il exploite tout son intérieur au maximum. Il ne s’impose aucune convention littéraire. Je me souviens de :  « Lettres en forêt urbaine » où il déclare son amour pour les arbres. « Échanger au plus vieux réseau de communication au monde. » (2). Laverdure fait bande à part. Il sait comment développer les aspects extrêmes du modernisme. Il élabore le « château du monde » (Jack Kerouac). Il marche. À la sortie Mc Gill (p.75), dans un festival. (p.78). Il est libre comme dans l’expression du Tao chinois. « Il y a mille drames, mille castings, mille sommeils. Svp, ne pas m’enfermer dans une station. » (p.79) La solitude du poète est une litanie. Il aime cette litanie. « Ce salut d’un marcheur infiniment plus solitaire. » (3)

Il dissèque le monde. Assoiffé d’admiration pour l’indéfini du monde (Cioran). Un poète qui s’intéresse à toutes les poésies. Je lui parle de mon ami Jean Marc Fréchette, décédé il y a deux ans. Il le qualifie de grand poète spirituel. Il m’envoie de nombreux liens. Une forme d’amitié s’est installée entre nous. Il avait aimé ma critique sur « Lettre en forêt urbaine ». Son nouveau livre est déjà en deuxième réimpression. On lui souhaite tout le bonheur qu’il mérite.

Notes
1. Jean Royer, Gaston Miron sur parole, BQ 2007.
2. Bertrand Laverdure, Lettres en forêt urbaine.
Mémoire d’encrier, 2019. Top 10 des meilleurs livres selon Ricardo Langlois sur lametropole.com
3. Philippe Jaccottet, Et, néanmoins. p.72. NRF Gallimard.
Bertrand Laverdure, Ce livre ne s’adresse qu’à 0,000 05 % de la population. Hamac Poésie 2022.
Il a travaillé comme journaliste littéraire pour plusieurs publications telles que Moebius, Liaison
Saint-Louis, Spirale, Lectures, ZAQ, OVNI Magazine (dont il a fait partie du comité de rédaction) et L’Unique (le journal de l’UNEQ) 14. Ses textes sont parus entre autres dans les publications suivantes : Aube Magazine, Action poétique, Estuaire, C’est selon, Moebius, XYZ, L’Inconvénient, Littéréalité, Les Écrits, Exil, Entrelacs, Moos, Osiris, Revue des gens bien et pas bien du tout, Feeling14.
Il a été recherchiste et chroniqueur à l’émission littéraire TOUT LE MONDE TOUT LU ! sur le réseau MATV15.
Il a tenu un blogue, sous le titre : « Technicien coiffeur » (2011-2015) 16.
Il a été le Poète de la Cité de Montréal de 2015 à 201 7. Dans le cadre de ce mandat, il s’est intéressé à la flore de Montréal. Il a piloté un collectif de poètes et de bédéistes à ce sujet publié aux éditions La Pastèque, Un herbier de Montréal (2017) en plus de publier chez Mémoire d’encrier (2019) l’ouvrage Lettres en forêt urbaine-Le projet Xanadu, portant sur les arbres de Montréal18.
Il a exploré également le terrain de l’art numérique littéraire, en réalisant, à l’aide du studio 30 et d’Hugo Arcier, un environnement virtuel pour Oculus Rift, avec des calligrammes 3D à manipuler, autour de la figure du poète Frank O’Hara, intitulé La chemise de Frank O’Hara19. Incursion dans le territoire des nouvelles narrativités en poésie, l’œuvre a été présentée au Mois Multi à Québec en février 2020. (Source Wikipédia).

Le Pois PenchéMains Libres

Ricardo Langlois a été animateur, journaliste à la pige et chroniqueur pour Famillerock.com