Canadiens français, un anglicisme patent

Une peinture d'un homme avec une raquette devant un arbre, mettant en valeur le sport traditionnel des Canadiens français. Une peinture d'un homme avec une raquette devant un arbre, mettant en valeur le sport traditionnel des Canadiens français.

François-Xavier Simard, LaMetropole.Com  (Photo principale: Trappeur chaussé de raquettes, 1857.)

Écrivain-géographe natif de Bellechasse, Jean Morisset poursuit depuis quarante ans sa vaste interrogation sur l’identité et le destin des Amériques. Il a notamment enseigné au Département de géographie de l’Université du Québec à Montréal.  Selon lui, les mots «Canadiens français» et « Québécois » ne devraient pas exister, ils sont un non-sens. Le seul mot qui a sa place est celui de « Canadiens ». Voilà, en la résumant grossièrement, la thèse que Morisset défend dans son ouvrage récent Sur la piste du Canada errant.  L’auteur écrit que, dans l’aventure coloniale aux Amériques, la rencontre des Blancs européens et des «Sauvages amériquains» (il respecte la graphie qui avait cours à l’origine) a produit le Canadien qui «demeure à peu près un des seuls ressortissants du Monde Nouveau ».  Puis il ajoute que les Canadiens en vinrent à se désigner eux-mêmes, par aliénation mentale et mimétisme linguistique, sous le vocable de Canadiens français. Ce terme, selon lui, est un anglicisme patent, voire une idée antinomique puisque la France y a recours pour marquer le moment de défrancisation de son ancienne colonie.

 Pierre Le Royer, Coureur des Bois

Pas d’affirmation contre une mère patrie

Les Canadiens sont les Créoles du Canada et, si on décide d’inclure sous une même bannière « l’Haïtien de langue créole, l’Acadien de langue cajun, l’Antillais de langue créole, le Louisianais de langue enjazzée, le Canadien de langue canayenne et le Bois-Brûlé de langue métivée – sans oublier le Franco de langue anglo et la grande tribu de langue mélangée », il doit bien y avoir trente à quarante millions de Francos à l’Ouest de l’Atlantique. En transcendant leur « amériquanité » et leur « européanité », les Canadiens ont perdu «la possibilité d’affirmer un projet collectif». Contrairement au Pérou contre l’Espagne, au Brésil contre le Portugal et aux États-Unis contre l’Angleterre, les Canadiens n’ont pas pu s’affirmer comme État contre leur propre mère-patrie.

Il n’y a jamais eu de Canadians

Morisset souligne qu’il n’y a jamais eu de Canadians, mais plutôt des British North Americans. Ils se sont toujours définis par la négative, ajoute-t-il: « We are not French Canadians… We are not Yanquis, we are not…» Aux yeux de l’auteur, le Canada et les Canadiens signifient fondamentalement le Québec et les Québécois. Le Canadien fit le tout premier ressortissant du Nouveau Monde à ne disposer que d’une identité issue du Monde Nouveau.

Jean Morisset, Sur la piste du Canada errant, essai, Montréal, Éditions du Boréal, 2018, 368 pages, 29,95 $.

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