Mireille Gagné, Bois de fer

Une femme à lunettes écrivant un livre sur la Littérature québécoise dans une bibliothèque. Une femme à lunettes écrivant un livre sur la Littérature québécoise dans une bibliothèque.
Mireille Gagné, Bois de fer. Par Ricardo Langlois.
On parle d’écologie. Demi-arbre ou femme, que lui est-il arrivé ? C’est comme une fable. Une vision organique. Une poétesse qui réfléchit. Une femme écorchée lève l’index face à cette violence. Une grandiose imposture sur la planète qui s’étiole. Le temps d’un autre monde, plus vert. Le constat est pitoyable. Comment survivre ?
Être un arbre ?

Depuis mon arrêt, j’échappe tout : les enfants, les corbeaux, les nids de guêpes. Je voudrais tant devenir l’arbre miniature qui vient d’être planté chez les voisins pour remplacer celui qui faisait relever les bardeaux du toit, (poème 41) Il n’est pas impossible à notre époque, d’avoir une conscience écologique, sans pour autant que cela soit ou devienne, un caprice ou une romance. C’est la planète qui tourne indubitablement vers un suicide collectif. L’écoanxiété s’installe dans plusieurs poèmes. On appelle ça de la solastalgie, c’est le thème scientifique pour décrire cette forme de peur, de souffrance et/ou de détresse psychique ressenties face aux changements environnementaux. 

J’ai pensé aux forêts qui hurlent entre racines et nuages. (1). On pourrait évoquer la sécheresse, la fréquence des incendies de forêt, les migrations précoces des oiseaux et des papillons.

Peut-être le plus beau passage : 

Quand j’étais petite, je savais jouer à la lenteur. C’était

Difficile, il suffisait de retenir le paysage. (poème 66)

Elle fait référence aux vents violents d’automne. Les feuilles mélangées, composées, asphyxiées et entassées dans des sacs  (82). Pour moi, l’automne est la saison des poètes. J’ai erré à travers sa poésie. J’ai pensé aux nénuphars de Monet. J’ai cherché une symétrie sans faille. (Robert Lalonde) Malgré tout, l’homme ne peut désirer un monde parfait. Parce que la symétrie a été rompue. Comment survivre ?

La planète n’est plus qu’un terrain de jeu extrême,

Un concept des images, des clichés de paysage. (2)

Dans un monde technologique, l’écologie ne tient qu’à un fil. Le plaisir d’observer les fleurs, les arbres, les oiseaux. Il y a une immense éclipse noire sur la déforestation. La dénonciation constante dans plusieurs poèmes. Il faut protéger les poumons de la terre. Un inventaire s’impose :

  1. Traverser de l’autre côté de la montagne.
  2. Emprunter plusieurs miles de sentiers sinueux.
  3. Battre le chemin à mains nues.
  4. Enlever les arbres tombés en travers.
  5. Affronter les coyotes, les carcajous.
  6. Se jeter dans le vide à chaque tournant.
  7. Je ne sais jamais qu’elle route j’emprunte la nuit.

Je cherche une aura de blancheur à travers votre livre. Vous habitez un monde qui se meurt. Vous explorez tous les détails du monde. Sommes-nous dans un monde voué à la disparition ?

L’ostryer de Virginie

Pendant ce temps, une étoile se lève au Nord. Ce livre est une véritable quête intérieure. Comment vivre dans nos sociétés de condos, nos vies bruyantes. L’image du bois de fer, il s’agit de l’ostryer de Virginie, un arbre si dur qu’il est difficile à fendre à la hache. Un livre écrit comme un chant sacré. Un requiem à la nature.

Note

Hélène Dorion, Mes forêts. P.16. Éd. Bruno Doucey, 2021.

Serge Bouchard, L’allume-cigarette de la Chrysler noire, Boréal Compact 2021.

Pages sont remplacées par des numéros pour chacun des poèmes. Le lièvre d’Amérique figure dans la liste des meilleurs livres de LaMetropole.com pour 2020.

Mireille Gagné, Bois de fer. La Peuplade. 2022.

Le Pois PenchéMains Libres

Ricardo Langlois a été animateur, journaliste à la pige et chroniqueur pour Famillerock.com