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Nebbia quand le ciel se fait bas

Le brouillard qui descendait lorsque nous étions en visite chez mes grands-parents engloutissait la maison des voisins, puis c’était le quartier qui disparaissait et finalement, le petit village tout entier. Debout sur le balcon du salon, j’épiais le néant, et quand le ciel se faisait très bas, j’entrevoyais des choses étranges. Les vagues de la mer venaient lécher le portail du jardin, et des hallucinations défilaient le long de l’allée de peupliers. Des amoureux se poursuivaient, je voyais des chameaux, des éléphants, des soldats revenant de la guerre… Une fois, je me suis même vu passer : j’étais déjà grand et je conduisais une voiture rouge. C’était souvent carnaval, pour ainsi dire, toujours…

Le bruit de la mer était omniprésent et quand le brouillard se levait, il restait des bars et des rougets sur la route. Une fois, on a même retrouvé un bateau de pêche sur la place du village : un bateau de pêche tout entier, mais la mer était à trois cents kilomètres de la maison de mes grands-parents.

Il existe aussi d’autres brouillards : les brouillards qui descendent devant nos yeux, qui glissent un mince voile entre nous et ceux qui se trouvent déjà un peu ailleurs. Depuis quelques temps, un brouillard est descendu entre ma grand-mère et moi. Je deviens un peu flou dans son regard, parfois je suis mon grand-père dans son jeune âge ou, l’espace d’un instant, seulement un inconnu, une ombre. Ma grand-mère a passé au-delà du ciel, qui s’est fait très bas. On l’entrevoit parfois; c’est alors la fillette que je n’ai pas connue, la jeune femme qui a fait tourné la tête de grand-père, le vieil olivier qu’un aïeul a planté dans le jardin…

Dès ma tendre enfance, j’ai été fasciné par l’acrobatie. Fasciné par le geste qui défie les lois de la gravité, qui est force et légèreté, précision, synchronisme, confiance, surprise ou risque. J’aime l’inexprimé du théâtre, le voilé, le geste qui demeure invisible.

Quand le ciel se fait très bas, on voit des choses qu’on ne voit pas normalement. On voyage à l’intérieur d’un monde fait de souvenirs, d’images inventées qu’on appelle des rêves, pour plus de commodité. Pour raconter mon voyage dans une enfance chaque fois réinventée, je me sers des géométries et de la lucidité du théâtre acrobatique qu’un extraordinaire groupe d’interprètes danse sur scène.

Daniele Finzi Pasca


Présenté du 25 au 27 septembre 2009, à la Place des Arts.

260, boul. de Maisonneuve Ouest, Montréal
T. : 514 285-4200
F. : 514 285-1968
[email protected]

www.laplacedesarts.com

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