Mais aujourd’hui, une telle scène n’étonne plus grand monde et les résidents du futuriste immeuble voisin ne s’irritent même plus, du fait que leurs places de stationnement soient «squattées» par des hordes de surfeurs. Ils préfèrent plutôt admirer les acrobaties des surfeurs qui se succèdent sans interruption sur la vague d’environ 1,5 mètre de haut. « Ça devient de plus en plus populaire, il y a toujours plus de monde : le week-end, il faut parfois attendre 45 minutes pour prendre la vague… c’est pour ça qu’on essaie de garder ça le moins populaire possible… faut que ça reste secret! » lance Simon Rouleau, un montréalais de 24 ans.
À la différence des vagues de mer ou de celles provoquées par les brusques élévations des fleuves – comme sur la Gironde, en France – celles de rivières sont présentes en permanence, car uniquement formées par l’irrégularité des fonds. Et de Munich à Genève, en passant par Turin et Lyon, le nombre de nouveaux adeptes a explosé, ces cinq dernières années.
« À Montréal, c’est incroyable, la vague est tout le temps là! », explique Corran Addison, pionnier du Saint-Laurent. Ce Sud-Africain, trois fois champion du monde de kayak freestyle, fut en effet le premier à avoir dompté le majestueux fleuve, il y a sept ans.
C’est d’ailleurs pour profiter de cette vague 365 jours par an, même en hiver quand des plaques de glace dérivent sur l’eau, qu’il s’est installé à Montréal. « Je me lève le matin et je n’ai pas besoin de penser aux marées, aux orages, à la météo… si j’ai envie de surfer, je vais surfer… la vague est là! », ajoute le quadragénaire. Après avoir converti quelques amis à cette nouvelle discipline, Addison a décidé d’en faire la promotion à grande échelle, notamment en lançant, en 2004, une école de surf. Une deuxième école, concurrente, a ouvert dans la foulée et plus de 2000 élèves sont désormais formés chaque année.
S’il y a donc beaucoup de novices parmi les 500 surfeurs réguliers recensés ici, on compte également un certain nombre de surfeurs aguerris en mal d’océan. C’est le cas de Robert Smyth, un Australien de 59 ans dont la planche prenait la poussière depuis son arrivée au Canada, en 1972 : « Quand j’étais jeune, je surfais en Australie sur les longboards… là, c’est vraiment différent, mais j’ai beaucoup de plaisir ». Ce natif de Sydney apprécie l’absence d’effort physique pour se présenter à la vague : il suffit de se laisser dériver avec le courant, de placer sa planche le nez vers l’amont et de se lever tranquillement. « Je n’ai même pas besoin de ramer… je suis trop vieux pour le faire », plaisante-t-il, un casque sur la tête, afin de prévenir les contacts avec les roches saillantes.
Le surf de rivière requiert en effet un équipement spécifique, à commencer par des planches plus solides que celles utilisées en mer. Ce marché naissant est cependant délaissé par les grands groupes de glisse, au grand bonheur de Conrad Addison, qui a créé sa propre marque : 2imagine. Cette année, un millier de planches «Made in Montréal» ont ainsi été vendues dans le monde.
Source: AFP