Vendredi, la Ville de Québec a supervisé l’ouverture publique des
soumissions pour l’achat de 4400 compteurs qui doivent être installés dans
autant d’immeubles industriels, commerciaux et institutionnels (ICI). Le prix
moyen demandé par les fournisseurs est beaucoup plus bas que ce que Montréal
s’apprêtait à payer.
Mais surtout, la Ville de Québec procède autrement : elle revendra ces
compteurs aux propriétaires d’immeubles, en leur faisant payer des frais de
gestion couvrant le salaire des employés municipaux qui surveilleront
l’installation des compteurs. Autre différence : les propriétaires devront
eux-mêmes payer les frais d’installation des compteurs. Puis ils paieront la
facture de l’eau, selon leur consommation.
Combien tout cela coûtera-t-il à la Ville de Québec? « Ça va coûter très
peu… en fait, rien du tout, a répondu Marcel Roy, directeur du service des
travaux publics. On facture tout aux propriétaires. On achète les compteurs,
mais on les revend. La Ville a six employés, soit trois cols bleus, un employé
de bureau, un technicien et un cadre, qui travaillent à ce nouveau contrat. Les
frais de ces employés vont être facturés aux propriétaires, tout comme les
frais administratifs ».
La Ville de Montréal, elle, a d’abord demandé à la firme d’ingénieurs BPR de
gérer son programme. Puis elle a accordé le contrat des compteurs d’eau et
d’optimisation du réseau au consortium GÉNIeau. Le premier volet du contrat,
pour l’installation de 30 500 compteurs dans les ICI, lui coûtait 106 M$
(sans les taxes). De surcroit, la Ville subventionnait les propriétaires d’ICI
pour préparer la plomberie, jusqu’à concurrence de 100 M$.
L’installation des compteurs aurait donc coûté environ 200 M$ à l’ensemble des contribuables montréalais. Le contrat a été annulé
après la publication d’un rapport dévastateur du vérificateur général.
À Québec, les propriétaires devront payer l’eau selon la consommation dès
que les compteurs seront installés, ce qui se fera par étape au cours d’une
période de trois ans. À Montréal, il n’était pas prévu que les propriétaires
soient tout de suite facturés. Les compteurs auraient servi seulement à mesurer
la consommation, non à la faire payer. La tarification aurait été imposée plus
tard, éventuellement.
La Ville de Québec a divisé son appel d’offres en cinq portions. « On ne
voulait pas avoir un monopole, a expliqué Marcel Roy. Notre idée, c’est d’avoir
plus d’un fournisseur et de répartir le travail dans le temps ».
L’appel d’offres de Québec exige la signature d’une clause anticollusion :
« Le trucage des soumissions constitue une infraction criminelle, en vertu de la
Loi sur la concurrence du Canada », prévient le document. Cet appel d’offres a
été rédigé en français. Cela semble aller de soi : pourtant, GÉNIeau a lancé
ses appels d’offres privés en anglais pour acheter des compteurs, ce qui a
choqué au moins un fournisseur.
Marcel Roy estime que les propriétaires d’immeubles ICI de Québec devront
payer en moyenne environ 1500 $ pour la préparation de la tuyauterie, l’achat
et l’installation de dispositifs antirefoulement, l’achat et l’installation de
compteurs d’eau munis de systèmes permettant la lecture à distance et les frais
de gestion.
À Montréal, les coûts se seraient élevés en moyenne à 6500 $ (200 millions
pour 30 500 compteurs) par immeuble. Cela incluait toutefois les coûts de
lecture à distance. Mais ce travail ne coûte pas bien cher, souligne M. Roy :
il s’agit essentiellement du salaire des quelques employés de la Ville qui
liront les compteurs. Ces frais seront couverts par les revenus apportés par la
tarification de l’eau.
Pourquoi la Ville de Québec procède-t-elle si différemment de Montréal?
« Quand on était dans le processus de choisir ce qu’on ferait avec les compteurs,
il y avait déjà des articles dans les journaux qui disaient que Montréal avait
un processus en cours et que ça pourrait coûter plus de 200 millions, a répondu
M. Roy. J’ai demandé à une de mes techniciennes d’en discuter avec des gens de
Montréal et des firmes d’ingénieurs. Quand j’ai vu l’envergure et la complexité
du processus à Montréal, j’ai dit qu’il fallait trouver quelque chose de plus
simple ».
Source: Cyberpresse