La SQ a finalement contourné le problème en obtenant ce rapport de la direction du SPVM. Le 15 août, la SQ recevait le rapport de l’agente Stéphanie Pilotte, qui confirmait que c’était son collègue Lapointe qui avait ouvert le feu. C’est pourquoi Jean-Loup Lapointe est devenu un suspect. Les directives du SPVM précisent aussi que le superviseur de quartier « retire et isole le policier impliqué » dans de telles situations. Bruno Duchesne a assuré mercredi que cela avait été fait. Or, plus tôt cette semaine, il avait reconnu que ni l’agent Lapointe ni sa collègue Pilotte n’avaient été isolés, même si tous les autres témoins directs l’ont été.
Il a précisé mercredi à Me Jacky-Eric Salvant, qui représente deux des jeunes hommes impliqués, qu’ « isoler » peut simplement vouloir dire « retirer des lieux » dans ces directives. « Le texte est très clair », a toutefois estimé le porte-parole du camp Villanueva, Me Alain Arsenault, hors de la salle d’audience. « Il n’y a aucune ambiguïté, a-t-il insisté. On veut faire de la sémantique, mais ça ne résiste pas à l’analyse ». À propos des témoins civils, le sergent-détective Duchesne a noté que c’est le SPVM qui les avait séparés les uns des autres. « C’est pas nous qui les avons isolés, ils étaient déjà isolés, a-t-il souligné lorsque questionné par l’avocat de la famille Villanueva, Günar Dubé. On les a rapidement rencontrés pour les libérer le plus rapidement possible ».
Le superviseur de quartier, au moment des faits, était le sergent René Bellemare. Il est apparemment arrivé le premier sur les lieux après l’appel des deux agents pour du renfort, et c’est à lui que Jean-Loup Lapointe avait dit, le soir du 9 août 2008 : » On s’est fait encercler, on a été au sol et ça a tiré ». Toutefois, d’après des documents présentés lundi et mardi, le sergent Bellemare avait plutôt répété par la suite à ses collègues du SPVM que des jeunes avaient « encerclé, projeté au sol et étranglé » les deux agents.
Le policier qui a transmis des informations erronées à ses collègues du SPVM et à la SQ, comme l’a reconnu le sergent-détective Duchesne, est donc le même qui semble avoir manqué à son obligation d’isoler les agents impliqués dans le drame. Qui plus est, le commandant de quartier ou cadre de service, toujours d’après les règles internes du SPVM, « tient une rétroaction opérationnelle avec le personnel impliqué dans l’événement ». Questionné à cet effet par André Perreault lui-même, Bruno Duchesne a dit que si cette étape a eu lieu, il n’en a jamais été avisé.
DES PHOTOS TROUBLANTES
En après-midi, mercredi, le coroner Perreault a entendu le reconstitutionniste de la SQ, Bernard Ouellet, et le technicien en identité judiciaire, Robert Fortin, qui devrait terminer son témoignage jeudi. Les photos et vidéos prises par M. Fortin ont notamment été présentées par le procureur du coroner, François Daviault. On a entre autres pu constater que l’agente Pilotte avait des ecchymoses ou des éraflures aux deux bras et aux deux genoux, à la suite de l’incident. L’agent Lapointe n’avait pour sa part qu’une éraflure au coude gauche.
Me Daviault a aussi présenté des photos des lieux du drame montrant les douilles des quatre balles tirées par Jean-Loup Lapointe et ce qui avait toutes les apparences d’une flaque de sang. Dans la salle, la mère de Fredy Villanueva, Lilian Madrid Antunes, tentait comme elle le pouvait de retenir ses larmes.
Source : PC