fbpx
Devenir membre

Le cinÉaste gilles carle s’Éteint

Sur les ondes de RDI, Chloé Sainte-Marie s’est dite « secouée et
tremblante » par la perte de l’homme de sa vie, soulignant qu’elle a
tout de même eu le temps d’échanger avec lui « en toute intimité » dans
la semaine ayant précédé son décès. « Cette semaine, je lui parlais
[…] je lui racontais nos beaux moments à l’Île Verte, […] on s’est
remémoré ensemble tout notre vie, nos 27 ans de vie », a raconté la
chanteuse et actrice.

 

« Le plus gros drame de ma vie, c’est qu’il ne parlait plus depuis
les cinq dernières années », a-t-elle poursuivi. Le couple communiquait
néanmoins grâce au dessin, ainsi qu’avec le regard. Celle qui était
devenue l’aidante naturelle du cinéaste a également fait part de sa
« grande peine » et de sa colère de savoir que Gilles Carle n’habitera
pas la maison qu’elle avait bâtie pour lui. Inaugurée le 17 novembre à Saint-Paul-d’Abbotsford, en Montérégie,
la Maison Gilles Carle vise à offrir aux personnes âgées ou en perte
d’autonomie un lieu de résidence paisible où elles reçoivent des soins.

DES FUNÉRAILLES NATIONALES

Le premier ministre du Québec,
Jean Charest, a annoncé samedi la tenue de funérailles nationales pour
honorer le cinéaste. « Gilles Carle a été un des cinéastes les plus
marquants du Québec, un homme au talent immense connu et reconnu à
travers le monde. Afin que les Québécoises et les Québécois puissent
rendre un ultime hommage à ce grand cinéaste et grand Québécois, le
gouvernement du Québec a offert à la famille et aux proches de Gilles
Carle la tenue de funérailles nationales », a déclaré le premier
ministre.

UNE VIE CONSACRÉE AU CINÉMA

Gilles Carle voit le jour le 31 juillet 1928, à Maniwaki. Il passe
sa jeunesse en Abitibi et déménage à Montréal à 16 ans. Il fait des
études à l’École des beaux-arts. Il entreprend ensuite une carrière de
dessinateur. Après avoir pensé à devenir peintre, il semble se destiner à
l’écriture. Avec notamment Gaston Miron, il cofonde les Éditions de
l’Hexagone. Le cinéma, cependant, l’attire. Il entre à l’Office national du film
du Canada au début des années 60, à titre de scénariste. Il y tourne
quelques courts métrages documentaires. Mais c’est la fiction qui
l’intéresse.

En 1964, premier court métrage de fiction : Solange dans nos campagnes. L’année suivante, un projet de documentaire sur le déneigement à Montréal se transforme en long métrage de fiction. C’est La vie heureuse de Léopold Z,
qui porte un regard tendre et drôle sur les petites gens. Ce premier
d’une série de films très personnels marque le cinéma de l’époque et
remporte le prix du cinéma canadien.

LA RECHERCHE DE LA LIBERTÉ

Après six ans, il quitte l’ONF et passe au secteur privé pour
réaliser ses films en toute liberté. Le réalisateur devient
copropriétaire et directeur artistique d’Onyx film, la première grande
compagnie de production indépendante au Québec. Il met aussi la main à
la pâte comme scénariste et monteur. Il ne boude pas la télévision et réalise des variétés comme Place aux Jérolas en 1967 et  Place à Olivier Guimond
en 1968. Il a à son crédit plus d’une centaine de publicités. Gilles
Carle participe également à la création de la muraille audiovisuelle du
Pavillon du Québec de l’Exposition universelle de Montréal de 1967 et
réalise pour l’Office du film du Québec Québec à l’heure de l’Expo.

LE CONFLIT

De 1968 à 1980, il réalise des films très divers du point de vue des
histoires et des personnages, mais qui se focalisent sur un thème : le
conflit, conséquence d’une exploitation. C’est le cas de :

  • Le viol d’une jeune fille douce (1968)
  • Red (1969)
  • La vraie nature de Bernadette (1972)
  • La mort d’un bûcheron (1973)
  • Les corps célestes (1973)
  • La tête de Normande St-Onge (1975)
  • Fantastica (1980)

Ce dernier film inaugure le Festival de Cannes en 1980. Entretemps,
il a fondé les productions Carle-Lamy, avec Pierre Lamy, en 1971.

LA FEMME ET LA SOCIÉTÉ

Un autre thème récurrent de son oeuvre : la femme, ses rapports avec les
hommes et la société. À la plupart des films ci-haut mentionnés,
s’ajoutent Les Mâles (1970), L’ange et la femme (1977) et Maria Chapdelaine (1983). La femme, autant dans sa vie que dans son cinéma, portera un nom pendant 10 ans : celui de Carole Laure. Égérie autant qu’actrice, elle
inspire au scénariste et réalisateur quelques-uns de ses meilleurs
films. Les films qu’elle tourne avec Gilles Carle lancent sa carrière
non seulement au Québec, mais aussi en France.

LES PETITES GENS

Un troisième thème prisé par le réalisateur-scénariste-producteur : les petites gens. Après La vie heureuse de Léopold Z, qui raconte les aventures d’un déneigeur la veille de Noël, il y aura Les Plouffe (1981), d’après le roman de Roger Lemelin, Le crime d’Ovide Plouffe (1984) et Pudding Chômeur (1996). On ne connaît qu’un seul échec critique et commercial dans la carrière de Gilles Carle : La guêpe (1986). Il attendra six ans avant de réaliser un autre film de fiction, La postière, avec Chloé Sainte-Marie. Cette dernière reste avec lui, même après que la maladie l’eut frappé.

Le réalisateur revient au documentaire et tourne notamment :

  • Cinéma, cinéma (coréal. W. Nold)
  • Ô Picasso
  • Vive Québec! (1988)
  • Le diable d’Amérique (1990)
  • Montréal off (1991)
  • Le sang du chasseur (1994)
  • L’honneur des grandes neiges (1994)

En 1997-1998, il se lance dans une télésérie sur l’histoire du Québec, intitulée Épopée en Amérique. En 1998, sentant que l’heure du bilan est venue, Gilles Carles signe Moi, j’me fais mon cinéma, une autobiographie filmée. Au début des années 90, il apprend qu’il est atteint de la maladie de
Parkinson : ce diagnostic bouleverse sa vie. Soutenu par sa compagne,
Chloé Ste-Marie, il combat jusqu’à la fin cette maladie, qui  lui  a volé
peu à peu l’usage de la parole et de ses mouvements. Au tournant de
l’an 2000, sa maladie l’oblige à abandonner progressivement son métier.

DES PRIX ET DES HONNEURS

Les films de Gilles Carle ont remporté 25 Génie et Canadian Film Awards. En 1989, ONF 50 ans
décroche la Palme d’or du court métrage, au Festival de Cannes. Il
reçoit le prix Albert-Tessier pour l’ensemble de son oeuvre, en 1990.
L’académie des Jutra lui remet le Jutra-hommage en 2001. La France
reconnaît son talent en le décorant de la Légion d’honneur.

 

Source : Radio-Canada