En 2005, Google commençait la numérisation de livres qui sont du
domaine public (les oeuvres dont les droits d’auteur sont expirés) mais
le programme – objectif 15 millions de livres en 10 ans – s’est étendu
aux oeuvres de toutes les langues qui sont toujours « sous copyright » et
dont Google copie des extraits – aux fins de vente – sans demander la
permission aux ayants droit. « Cette entente hors cour permet
toujours à Google d’éviter le débat sur la légalité de ses pratiques »,
explique Aline Côté des éditions Berger, présidente du comité du droit
d’auteur de l’ANEL.
Par ailleurs, les éditeurs y perdent leur
prérogative d’adapter la commercialisation de leur livre en fonction de
leur marché. Faut-il, par exemple, numériser d’abord et publier en
poche par la suite? Ces questions relèvent de l’éditeur. Et il y a la question du respect de l’intégrité de l’oeuvre. Ici, la
préface est absente, là, la couverture n’apparaît pas parce que
l’illustration relève d’un autre groupe d’ayants droit…. « Notre
droit, ici au Québec, condamnerait des atteintes aussi graves », ajoute
Mme Côté. Mais en quoi les éditeurs francophones du Canada sont-ils partie d’une
entente intervenue entre des groupes américains devant une cour de
l’État de New York? Les parties en sont venues à une première entente
en octobre 2008 puis, devant les protestations et les réserves – du
département américain de la Justice, notamment – à des amendements en
novembre 2009.
L’entente amendée n’inclut plus que les ouvrages enregistrés aux États-Unis
ou publiés en Angleterre, en Australie et au Canada. Ceci,
explique-t-on chez Google, après consultation des plaignants avec leurs
partenaires de ces pays, inclut dans l’entente parce que les Américains
y voient un « héritage commun », tant au niveau du droit que des pratiques
commerciales. L’Irlande et la Nouvelle-Zélande ont aussi l’anglais en partage avec
ces pays (du Commonwealth) mais sont exclues de l’entente. Parce que
leurs gouvernements ou leurs associations d’éditeurs et d’auteurs ont
dit « non merci ». Comme en Allemagne ou en France, où Google a été
condamné en décembre à payer 300 000 euros de dommages à La Martinière
(Éditions du Seuil) pour la numérisation illégale de quelque 300 livres.
Après une autre série d’audiences – Microsoft, Yahoo! et Amazon
s’opposent à l’entente -, le tribunal new-yorkais doit rendre une
décision finale en février. Quelle que soit la décision, conclut Aline
Côté, les éditeurs québécois ne trouveront jamais leur compte dans
cette entente où « Google ne cherche qu’un avantage concurrentiel ».
Source : PC