En deux semaines à peine, pas moins de six caméras ont été trouvées
dans les couloirs et les locaux de l’hôpital de la rue Sherbrooke. La
première, découverte complètement par hasard, était cachée dans un
corridor du premier sous-sol du pavillon Deschamps, près de l’entrée
donnant accès aux salles d’opération, selon le syndicat des employés du
Centre hospitalier de l’Université de Montréal (SECHUM), qui a pris le
dossier en main.
Alertés par cette trouvaille pour le moins surprenante, les employés
ont rapidement repéré d’autres appareils. « Les gens sont tellement
indignés et insultés, qu’ils se promènent tous la tête dans les airs au
cas où », raconte la présidente par intérim du syndicat, Émilie Dupuis. Ainsi, des caméras ont successivement été aperçues à la lingerie (où
l’appareil aurait permis de voir une employée en petite tenue devant
son casier), à la salle mécanique, chez les électriciens et au plafond
du rez-de-chaussée du pavillon Mailloux, juste devant le bureau d’une
membre de la direction des ressources humaines.
SOLUTIONS DE DERNIERS RECOURS
« Nous ignorons s’il y en a d’autres. Nous ne pouvons faire confiance à l’employeur », indique, dans une lettre adressée à ses 4 500 membres le SECHUM, qui a immédiatement demandé à
l’employeur de retirer les caméras cachées. « Ils se sont engagés à le
faire, mais on ne peut pas savoir s’ils ont tout enlevé, parce qu’on ne
sait pas où sont les autres », confie Émilie Dupuis, qui indique que
les motifs de l’installation des caméras restent flous. Selon le SECHUM,
il s’agit d’une tentative d’espionnage.
Jointe au téléphone, la porte-parole de l’hôpital, Lucie Dufresne,
n’a pas été particulièrement précise dans ses explications. « Le CHUM
peut utiliser des caméras comme solution de dernier recours, si la
situation l’exige. C’est une de nos politiques quand aucun autre moyen
ne fonctionne. En cas de vandalisme ou pour protéger les patients, par
exemple ». Elle n’a pas voulu révéler le nombre exact de caméras ou la
raison de leur installation. « Je ne peux pas entrer dans les
détails », mentionne Mme Dufresne, qui admet que d’autres appareils peuvent
avoir été placés à St-Luc et à l’Hôtel-Dieu.
Fait à noter, les engins électroniques découverts par les employés
de soutien de Notre-Dame n’étaient pas dans des lieux fréquentés par
des malades. « S’ils veulent assurer la sécurité, ils auraient pu
trouver d’autres moyens, comme augmenter les rondes des agents de
sécurité ou placer des caméras visibles de tous », s’indigne Mme
Dupuis, dont le syndicat songe à porter plainte.
Selon la loi, une entreprise peut filmer ses employés à leur insu
dans le but de régler un problème pour lequel aucun autre moyen
d’enquête ne fonctionne. « On ne peut toutefois pas braquer une caméra
sur un poste de travail et filmer un travailleur en continu. Ça devient
des conditions de travail déraisonnables », explique l’avocat
spécialisé en droit du travail de la CSN, Me Daniel Charest.
« On ne peut pas non plus filmer par prévention, alors qu’il ne s’est
rien passé, ni installer des caméras tout azimut dans tous les
départements », dit-il.
Source : Gabrielle Duchaine