L’Agence de la santé et de services sociaux
de Montréal a pris le taureau par les cornes pour régler les problèmes de
pénuries de personnel, d’équipement et d’engorgement dans les urgences des
hôpitaux montréalais. En 2007, elle a embauché une des firmes les
plus chères au monde, McKinsey, et aurait déboursé 2,2 M$ pour ses services.
C’est la même firme qui a déjà facturé 10 M$ à la Caisse de dépôt et de placement
du Québec pour la conseiller sur sa gestion de risque.
Les résultats sont-ils au rendez-vous?
L’exercice a permis de faire quelques changements temporaires au sein des
établissements et de… faire un exercice de dessin de l’urgence de rêve. Gaétan Barrette, président de la Fédération
des médecins spécialistes du Québec, dénonce par contre que cela n’a pas
rapporté de solutions permanentes. « On dépense des millions pour avoir un
résultat qui est très marginal, mentionne le Dr Barrette. Quand McKinsey s’en va, on
retombe dans nos habitudes. Chacun travaille dans son coin et on n’avance pas ».
Le porte-parole des spécialistes croit que
des problèmes locaux sont criants et qu’il faudra investir là au lieu
d’embaucher des consultants. « Il manque deux hôpitaux dans la région de
Montréal, indique Gaétan Barrette. Ça prend des lits. On refuse [de débloquer]
les sous pour que le système fonctionne à pleine capacité. On sait à peu près
ce que ça coûte. Il faudrait qu’on s’assoit et qu’on le fasse ». Des consultants comme McKinsey peuvent donner
leur aval à l’utilisation de la « méthode Toyota » pour organiser le travail.
Encore une fois, le Dr Barrette a l’impression que ce n’est pas une solution
miracle.
« Ce que je trouve malheureux n’est pas que
l’on se serve de la méthode Toyota, mais si l’on tente de régler le manque de
ressources avec ça, on rêve en couleurs, raconte-t-il. La méthode Toyota ne
peut pas créer des lits ». Claude Saucier, président de la Fédération
des médecins omnipraticiens du Québec, estime pour sa part qu’« il y a beaucoup
d’argent dépensé en consultation dans le réseau de la santé au Québec, c’est
évident ». Lui aussi croit que ça ne permet pas de
s’attaquer aux vrais problèmes.
« L’urgence et l’hôpital sont les endroits où ça
bloque. Si nous étions capables d’avoir des médecins de famille, nous serions
capables de réduire les hospitalisations et les consultations à l’urgence. Les problèmes sont connus, insiste Claude Saucier. La première ligne est un problème énorme. Il va falloir passer aux
actes et investir en première ligne ». À son avis, avoir davantage de médecins qui
font le suivi du patient après son hospitalisation contribuerait aussi à
réduire le risque qu’il « rebondisse à l’urgence ».
Source : Argent