produire dans l’amphithéâtre du CH. Il a
raison de dire qu’il croit au destin. Nous l’avons eu au bout du fil pendant une
pause, alors qu’il était en studio pour faire l’une
des voix du dessin animé Moi, moche et méchant. Il est drôlement fier de se produire au Centre
Bell avec la complicité de Julie Snyder, sa
productrice au Québec. «Le Québec fait partie de ma multiculture. Je
suis, en tant qu’individu, de culture marocaine,
française et aussi québécoise, parce que j’y ai
passé beaucoup de temps de ma vie. J’y suis
sensible, je suis sur la même longueur d’onde et
c’est bien au-delà de l’accent et des mots rigolos.
ouverture d’esprit et aussi de leur américanité,
qu’ils ne veulent pas toujours admettre. Pourtant,
il y a quelque chose de bon là-dedans».
LE COMIQUE QUI DOIT TOUT AU QUÉBEC
Gad Elmaleh dit devoir son métier d’humoriste
au Québec. «Ce sont les humoristes québécois qui m’ont
appris ce dur métier. Je voulais être comme ces
gars-là, comme toutes ces vedettes de l’humour
au Québec.» Et ce métier, celui de faire rire, Gad Elmaleh le
prend très au sérieux. «La scène, c’est vital pour nous. Enlevez-nous la
scène pendant quelques années, et nous risquons
de devenir fous. Un humoriste a besoin de
pratiquer son métier, c’est vital. L’envie ne suffit
pas. Les vrais humoristes, ceux qui nous font rire
dans la vie, ont une réflexion permanente». Il se rappelle ses débuts, tout le travail, sa route
parsemée d’embûches.
«J’étais étudiant au Cégep Saint-Laurent, mes
parents n’avaient pas d’argent à m’envoyer; donc,
j’ai dû avoir plusieurs petites jobs pour arriver;
j’étudiais, je travaillais la semaine dans un café de
la rue Laurier, les week-ends dans un hôpital. Or,
faut y croire. Je suis fier de cette route-là. Je dis
aux jeunes que oui, c’est possible de commencer
dans un petit cabaret avec juste sa famille, et puis
un jour se retrouver au Centre Bell, seize ans plus
tard. C’est l’appel au rêve», précise sur un ton fier
Gad Elmaleh. C’est pourquoi il savourera chaque minute de
ces deux spectacles du Centre Bell la semaine
prochaine et espère être en parfaite communion
avec ce public québécois, qu’il décrit comme «de
vrais connaisseurs en humour».
«Pour la majorité des humoristes français, le
public québécois, dans le cadre des festivals Juste
pour rire, est une épreuve. Il faut savoir comment
le prendre, comment rentrer dans son coeur. Moi,
connaissant les Québécois, je crois qu’il faut leur
parler directement si on veut les atteindre, les
toucher, les émouvoir. Les spectateurs québécois
n’aiment pas les grandes envolées théâtrales qui
ne veulent rien dire; ils réclament la franchise en
tout temps. «Ils attendent que tu leur donnes cela, sinon ils
ne sont pas avec toi. Ils sont comme cela dans la
vraie vie. Mais attention: si un Québécois
t’ouvre sa porte, tu peux être certain qu’il ne la
refermera jamais. C’est pourquoi ça vaut les
efforts, même si c’est plus dur qu’ailleurs avant
qu’il ne la rouvre», explique l’humoriste, réfléchi
et fin observateur.
Il n’y a que la vérité dans chaque propos de Gad
Elmaleh. Donc, lorsqu’on lui parle de l’impact de
son énorme succès et de sa nouvelle notoriété, il
ne cache pas que tout a changé dans sa vie. «Je ne comprends pas les artistes qui prétendent
que ça ne change rien. Ça change tout. On
peut perdre la connexion avec la réalité, avec tous
ces beaux hôtels, ce traitement royal partout où
l’on passe. La vie change, on vous arrête dans la
rue; lors de ce contact un peu anonyme, on vous
parle, donc on arrête votre imaginaire un peu.
Mais la chose la plus précieuse est de rester bien
connecté. Si on réussit cela, eh bien, le succès, je
crois, vous donne des ailes, de la confiance et de la
force.»
L’APRÈS…
Oui, il l’admet, ce spectacle qui a fait un tabac,
Papa est en haut, l’a fait grandir comme homme
et comme artiste. «Déjà, un spectacle qui parle de paternité,
de la filiation, de ce qu’on veut transmettre, nécessairement, ça fait grandir, je crois»,
affirme l’humoriste. Que peut-on lui souhaiter pour la suite des
choses? «Que mon fils de neuf ans continue d’être drôle
et qu’un jour, je puisse vous inviter à son concert
au Centre Bell, à Montréal… sous le titre Mon fils
est en haut». Touchant, ce Gad Elmaleh, et tout simplement
vrai.
«Aujourd’hui, je m’assume complètement
comme comique. J’ai passé beaucoup de temps à
me battre contre les étiquettes. Pourtant, c’est
déjà pas mal de savoir faire rire; il faut être fier de
cela. Donc, je me définis comme un vrai
comique», conclut l’humoriste français, qui
devrait offrir une grande finale fort émouvante. Juste avant ses deux spectacles du 27 et du 28 mai
prochain au Centre Bell, il passe par Los Angeles
pour mettre un point final au film Tintin de
Spielberg, peaufiner les derniers détails.
Source: Canoe