L’exaspération, voire l’inquiétude,
gagnaient vendredi en Bolivie une centaine de touristes étrangers, dont la
moitié de Français, bloqués parfois depuis une semaine dans la ville minière de
Potosi, paralysée par un conflit social. « On a des personnes qui souffrent de
l’altitude, des asthmatiques. Nous sommes allés voir la Croix-Rouge, qui nous a
donné de l’oxygène : on nous a recommandé de redescendre au plus vite. Mais pour
descendre, il faudrait pouvoir sortir… », s’est plaint à l’AFP Pascal Goujot,
un Français bloqué avec deux enfants.
Pour le 9e jour consécutif, des
professeurs, des paysans et des mineurs ont bloqué des axes routiers vers Potosi et
empêché l’accès à cette ville de 160 000 habitants, située à 4000 m d’altitude.
Ils réclament du pouvoir central davantage d’investissements dans leur région,
notamment une route et un aéroport. Le conflit ne semblait montrer aucun signe
d’apaisement. En ville, police et armée se faisaient
extrêmement discrètes, le gouvernement d’Evo Morales souhaitant éviter à tout
prix que la situation ne s’envenime dans la ville, tenue par un maire
d’opposition.
« Je suis allée voir la police, les
militaires. Ils m’ont dit qu’ils ne pouvaient rien faire, et que s’ils
sortaient, il y aurait une guerre civile », a affirmé une Française, Lumzira
Giniot. « On est « prisonniers » c’est
vrai, mais on ne court pas de danger », tempérait un autre touriste, Romain Le
Du, relevant que malgré la grève générale, des commerces ou des restaurants
ouvraient à la demande. Vendredi, jour de fête nationale en
Bolivie, une grande manifestation à l’appel du comité civil local gréviste les
a tout de même incités à rester dans leurs hôtels.
Le consulat général de France, qui assure être en
« contact permanent » avec les touristes, leurs familles et les autorités de Bolivie,
a appelé les gens bloqués au « calme, à la patience et à la discrétion », en
attendant une détente qui permettrait des sorties de Potosi par voie terrestre
ou aérienne. Mardi, des cars de touristes munis
d’autorisations avaient réussi à quitter la ville et passer plusieurs barrages,
avant d’être refoulés à un autre. « Un mineur a menacé d’utiliser de la
dynamite contre le car si on ne rebroussait pas chemin », a raconté M. Le Du.
Au modeste aéroport, quelques touristes
ont tenté en vain vendredi d’embarquer à bord d’un petit avion assurant une
liaison quotidienne avec la ville de Sucre. Dans l’après-midi, les grévistes ont
occupé l’aéroport, jonchant la piste de pierres pour couper cet accès-là aussi. Les « bloqueos » de routes ou de villes à
l’occasion de conflits sociaux sont fréquents en Bolivie, prenant parfois au
piège des touristes, rappelait cette semaine le ministère français des Affaires
étrangères.
Mais ce conflit-ci semblait devoir
s’enliser jusqu’au début de la semaine prochaine, avec un dialogue au point
mort vendredi entre La Paz et les grévistes et un weekend de trois jours. Commerces ou hôtels, certains y trouvent
leur compte, estimaient quelques étrangers suspicieux, s’étonnant que « des
touristes aient pu entrer dans Potosi ces derniers jours, mais pas en sortir ».
Et qu’après une semaine de blocus, il y ait toujours des dollars aux
distributeurs : « ce blocus ressemble à un tri sélectif ».
Source : Agence France-Presse