En dépit de cela, lorsqu’un consommateur curieux veut
acheter une bouteille de vin grec à une succursale de la SAQ, les préposés le
regardent avec des yeux sceptiques. Parfois, ils se souviennent que quelque
part, dans l’entrepôt, ils ont vu une bouteille de vin grec. Ce qu’ils
apportent le plus souvent, c’est du Retsina, un vin blanc dans lequel on a fait
macérer une boule de résine de pin et qui a un goût rébarbatif pour les non
initiés. Le Retsina est fait avec les pires vins, et la production est
insignifiante par rapport à la production grecque.
En Grèce, on trouve la gamme
la plus variée dans les rouges et dans les blancs. Les vins de liqueur sont
incomparables et les mousseux dignes des dieux de l’Olympe! Pourquoi, les
Québécois, sommes-nous privés de tels trésors?
L’autre jour j’étais invité à une dégustation de vins
de la maison Costa Lazaridi, qui avait lieu au restaurant La Queue de
cheval. J’ai été accueilli par Tony
Manarolis, président de l’agence Ampelopsis, et par l’œnologue Chrissa Giatra.
Plusieurs de mes confrères et consœurs étaient présents. Alain Lebel, des
Fidèles de Bacchus, qui rentrait justement d’une visite au domaine Lazaridi,
nous racontait son émerveillement.
Tony Manarolis prit la parole et nous dépeignit Kostas
Lazaridis comme un homme d’exception. Milliardaire, il décide de bâtir un
vignoble millionnaire à Drama, dans la Macédoine grecque. Au milieu de ses 230
hectares de vigne, il a construit un complexe vinicole d’avangarde, qui est une
merveille architecturale. Il l’a doté de l’équipement le plus moderne pour la
fabrication de vin et la distillation d’eau de vie. Le centre dispose de
services pour accueillir les visiteurs. Près d’Athènes, le promoteur a créé un
deuxième complexe de 113 000 pieds carrés qu’il a baptisé Oenotria Gi Costa
Lazaridi. On y trouve un cellier souterrain, un Musée du Vin et des facilités
intérieures et extérieures pour
accueillir des événements sociaux et d’entreprise.
Chrissa Giatra était assise à côté de moi, Elle
ressemble, en plus belle, à Angelina Jolie. Elle prit la parole et nous demanda
si elle pouvait s’adresser à nous en anglais. Je lui répondis que nous aimions
beaucoup son accent grec quand elle parle français, et lui croquai une photo.
Elle acquiesça de bonne grâce et nous expliqua que l’équipe de techniciens et
de scientifiques de l’entreprise Lazaridi était unique en Grèce et que c’était
le seul producteur de vins qui comptait avec les services de Michel Rolland. Le
Domaine Lazaridi fait de la culture biologique et n’hésite pas à assembler des
vins issus de cépages grecs et de cépages français et italiens, bien qu’il
produise aussi quelques vins de monoculture.
Elle nous présenta ensuite les principales
collections : L’Améthystos, qui se déclinent en blanc, en rouge, en rosé
et en cava. Le nom est inspiré de la pierre semi-précieuse qui, selon la
légende, a le pouvoir d’empêcher de s’enivrer ceux qui la portent comme
amulette. Après les Améthistos, Kostas Lazaridis a créé la série
Château Julia, en l’honneur de sa femme. Alain Lebel nous a témoigné de sa
beauté et de sa grande élégance. Les Châteaux Julia se déclinent en blanc et en
rouge. En blanc avec les Chardonnays de Drama et d’Adriani, l’Assyrtiko et le
Sémillon. En rouge, ils se déclinent en Merlot et en Refosco-Agiorgitiko.
Il y a la collection Domaine Costa Lazaridi, qui se
décline en blanc avec Syrah, Viognier, Viognier-Muscat et Mallagouzia-Muscat et
en rouge avec Cabernet Sauvignon et Syrah. La collection Oenotria Land, en rouge seulement, se
décline en Cabernet Sauvignon, en Agiorgitiko et en Syrah-Agiorgitiko, qui
porte la signature Michel Rolland. Le Domaine Costa Lazaridi a aussi une collection de
Magnums de 1,5 et de 3 litres, dont les bouteilles sont peintes à la main par
trois de ses artistes à domicile, Yannis Nanos, le créateur de toutes les
étiquettes du domaine, Konstantinos Kesrestetzis et Diana Papadopoulou. Ces
artistes expriment leur art sur chaque bouteille pour le seul plaisir des
collectionneurs.
Tony Manarolis nous a montré deux magnums qu’il a reçus
en cadeau et qui sont des œuvres d’art. Nous avons commencé la dégustation avec l’Amethystos
Sauvignon blanc 2009. Belle robe jaune. Bouquet complexe de vanille, de fruits
secs, de noix. Une touche minérale joyeuse et de la fraîcheur qui joue avec vos papilles. Il a
cinq ans de garde (Importation privée, 30 $). On nous a servi l’Oenodea White 2009, fait de
Mallagouzia et de Muscat. Robe cristalline or clair. Bouquet fleuri et fruité
plein de nuances. En bouche, ample, toujours fruité et minéral. Semi-sec, longue
finale élégante (Importation privée 18 $).
Commença alors la symphonie des rouges. On nous servit
d’abord l’Amethystos Red 2007, 80 % Cabernet Sauvignon, 15 % Merlot et 5 %
Agiorgitiko. Vieilli en cuves de chêne français pendant 12 mois avant d’être
embouteillé. Robe rouge foncé avec des reflets violets. Beau bouquet de fruits
rouges, de cardamone et de vanille. Belle amplitude en bouche, avec des nuances
de cerise et de groseille, des tanins fins, de la fraîcheur, beaucoup
d’élégance. Un vin à boire jeune (SAQ 24,85 $).
Le sommelier nous versa de l’Améthystos Cava 2004, 100
% Cabernet Sauvignon. Ce vin a maturé 18 mois en barriques françaises neuves et
2 ans en bouteille avant d’être vendu.
Robe rouge foncé, vin charnu qui laisse de belles larmes sur le verre.
Nez ample, épicé, nuances de café, de chocolat, de tabac blond et de framboise.
Complexe en bouche, des tanins puissants mais ronds qui tapissent vos papilles
avec élégance. Belle et longue finale. Un vin qu’on peut garder jusqu’à 20 ans
(SAQ 48 $).
On nous a versé un Domaine Costa Lazaridi Syrah 2006.
Robe rouge foncé, reflets violets. Arômes de petits fruits des bois, de
violette et de lavande. En bouche, ce sont les fruits qui prédominent, surtout
la cerise, mais il y a aussi des saveurs de pain d’épices, de réglisse, une
belle fraîcheur, des tanins ronds et bien fondus et une belle et longue finale
(Importation privée 35 $).
Le sommelier nous apporta un Château Julia
Refosco-Agiorgitiko 2006, qui est un assemblage de deux cépages, l’un italien
et l’autre grec. Belle robe, rouge foncé. Nez complexe de chocolat, de noix de
coco, de vanille, de fruits rouges. Ample en bouche avec beaucoup de fraîcheur,
des tanins fermes et une finale marquée par le boisé. C’est un vin de longue
garde (Importation privée 37 $ la bouteille, caisses de 6 bouteilles).
Pour finir, nous avons goûté l’Œnotria Land
Syrah-Agiorgitiko. Le raisin est vendangé lorsqu’il garde encore de sa verdeur,
pour qu’il ait un caractère structuré, masculin, riche. Les peaux sont laissées
longtemps en contact avec le moût pour qu’elles donnent au vin sa personnalité
et sa robe rouge foncé. Ce vin a vieilli 3 ans en barrique et un an en
bouteille. C’est le trésor de la gamme et il est signé Michel Rolland. Arômes
de figue et de chocolat, de prune et de vanille. C’est un vin élégant. En
bouche il est rond, caressant, tout en finesse, des tanins veloutés et une
longue finale à peine boisée. C’est un vin superbe dont nous avons eu l’honneur
de déguster la première bouteille arrivée à Montréal (Importation privée 100 $
la bouteille, caisses de 6 bouteilles).
Les verres ont été changés. Le banquet a commencé.
L’équipe de La Queue de Cheval nous a servi deux entrées, tout d’abord un Mezze
Ouzo – féta au four, olives Kalamata, sardines marinées, tomates rôties,
échalotes grillées – accompagnées d’une coupe d’Améthystos Sauvignon blanc. Chrissa Giatra leva son verre et nous souhaita « Yamas!
» – bonne santé – en grec. Je lui proposai de trinquer à la manière des moines
espagnols, en silence, car ils font des vœux de silence, et avec les yeux
fermés… et le miracle se produisit, nous fûmes traversés par un frisson qui fut
remarqué des autres convives. Tous les garçons voulurent trinquer avec Chrissa
comme des moines espagnols, mais Chrissa leur répondit, avec une moue fort
gracieuse, qu’ils devaient se satisfaire du « Yamas! »
On nous apporta une soupe Avgolemono : bouillon
de poulet maison, riz, émulsion d’œufs et jus de citron. La conversation était
festive. Les confrères et les consœurs
journalistes gastronomes étaient en verbe; ils sont toujours fort
spirituels. On nous servit l’entrecôte USDA Prime, vieilli à la
perfection dans les celliers de La Queue de Cheval, servi avec des rognons
grillés et une salade féta. En accompagnement, on nous versa de l’excellent
Amethystos Cava 2004. Comme dessert, on nous apporta le typique :
yogourt, miel grec et noix, accompagné d’un Domaine Costa Lazaridi Viognier et
Muscat, un vrai délice. La Queue de Cheval a réussi un beau mariage mets et
vins.
Félicitations à Tony Manarolis pour le charmant repas
qui nous a permis de rencontrer Chrissa Giatra et de découvrir les trésors du
Domaine Costa Lazaridi.
Queue de Cheval : 514 390-0090