J’ai toujours identifié les initiales de la
STM comme étant Société de Transport de Merde. Et encore une fois, cette
administration de patachon agite les grands bras en annonçant toute une
nouveauté, à savoir que sur une trentaine de lignes d’autobus, il y aurait des
fréquences de dix minutes seulement. Bien voyons donc. Quiconque a du poil au
menton se souvient qu’avant l’avènement du métro, toutes les lignes d’autobus
étaient opérées de la sorte. Même mieux, aux cinq minutes. Plus, on n’attendait
jamais sur les lignes les plus fréquentées.
J’ai toujours vécu en grande partie
à Verdun. Quand j’étais haut de même, je me souviens que les autobus qui
roulaient sur l’avenue Verdun, pour ne nommer que celle-là, qui pourtant
n’était pas, et n’est pas encore, une ligne achalandée, eh bien les autobus
étaient cordés à la queue leu leu. Tu n’attendais jamais un autobus! C’aurait
été de la science-fiction. Avec l’arrivée du métro, on s’est senti dans
l’obligation de couper partout, puisqu’on se disait que le réseau souterrain
faisait en quelque sorte compétition avec les autobus.
DU TEMPS OÙ LES CHAUFFEURS TRAVAILLAIENT
Et mes amis, ce n’était pas les chauffeurs
arrogants que l’on connaît maintenant et dont a appris récemment que certains
vont se chercher avec le temps supplémentaire jusqu’à 133 000 $ par année!
C’est des cennes, ça. Pendant des décennies, les chauffeurs donnaient la
monnaie et poinçonnaient les correspondances. On bossait sur un joli temps.
Maintenant, ils ont de la misère à faire leurs arrêts et à ouvrir les portes.
UNE MISE EN SCÈNE COÛTEUSE
L’annonce de ce « nouveau » service
aux dix minutes a fait l’objet d’un point de presse où le président du conseil
d’administration de la STM, Michel Labrecque, faisait son rigolo en montrant les
dix doigts de ses mains, écartées comme s’il venait de proclamer la trouvaille
du siècle. Et ça coûte des sous, ces niaiseries de conférences de presse. On a
produit pour l’occasion des gadgets promotionnels et tout un petit décorum pour
la circonstance. Quand je dis que l’ardoise a du être salée, c’est que la STM,
dans ces moments-là, lance son argent par les fenêtres. J’en sais quelque
chose. Permettez-moi de raconter encore une anecdote tirée de ma vie, comme
vous semblez les aimer tant.
J’ÉTAIS M. GUIMARD
Ça se passait il y a quelques années. La STM
voulait signaler la fin des travaux de restauration des enluminures Guimard en
fer forgé qui surplombent l’édicule de la station de métro Square Victoria,
comme on en voit au-dessus des stations de métro à Paris. La décoration en
question avait été offerte par la RATP (Société des transports parisiens) et la
ville de Paris à la ville de Montréal, à l’occasion de l’Exposition universelle
de 1967. Comme ça se passe toujours ensuite, l’intérêt pour la bébelle s’étant
émoussée, on l’avait laissé là, exposée aux intempéries québécoises.
Conséquence, la rouille avait fini par ronger le métal. Bref, on restaura à
grands frais. Et pour marquer le tout, on organisa une réception. Pour
que tout soit au point, on avait embauché une firme de relations publiques,
alors que la STM a le sien. La directrice de l’agence extérieure m’avait
demandé d’incarner M. Guimard, qui a laissé son nom à ces enseignes comme
créateur éminent en Art nouveau. Il fallait bien faire les choses. Imaginez, la
présidente de la RATP était venue spécialement pour l’occasion.
Donc on m’amène
chez le costumier faire l’essai de redingote, haut de forme, moustache
postiche. Tout le toutim. J’avais juste un petit boniment à faire de quinze
minutes! Et tenez-vous bien, j’ai touché un cachet de 800 $. Qu’est-ce que
j’avais à me plaindre. Et je l’ai empoché avec plaisir. Je pense qu’avec ce
pactole, je m’étais acheté une copie d’un meuble d’époque chez Bombay. Une
réception suivit, avec la boustifaille d’usage. Je n’ai jamais su comment ce
cérémonial ubuesque a pu coûter, mais j’ai certainement été indirectement la
cause de l’augmentation des tarifs cette année là.
POUR CES FAMEUSES DIX MINUTES…
Alors imaginez, par déduction et inflation
aidant, ce que le point de presse de M. Labrecque a dû coûter. Vous seriez sans
doute indignés. Cher M. Labrecque, au lieu de remettre à la mode une idée d’il
y a un demi-siècle, commencez donc par vous occuper de choses sérieuses.
D’abord de cesser de chicoter sur le contrat de construction des nouvelles
rames de métro, qui est entrain de provoquer la ruine de l’usine Bombardier à
la Pocatière. Mais surtout, je veux évoquer ici une horreur que tous les
usagers du métro vivent au quotidien.
RAMES DE MÉTRO INSALUBRES
Nous avons été éprouvés, cet été, par des
journées de canicule. Et particulièrement quand nous nous sommes retrouvés
entassés dans les wagons par une chaleur accablante. J’ai vu des passagers
s’étirer le cou pour chercher de l’air. C’était absolument malsain. On
dégoulinait de toutes parts. C’est dans ces moments là, que j’observais une
minute de silence pour tous ces juifs que l’on conduisait à Auschwitz, dans des
wagons plombés sans aucun oxygène. Si ma chemise était au sec à Angrignon, elle
se trouvait toute mouillée à Saint-Laurent.
Et dire qu’il y a des spécialistes
en santé publique dans les CLSC et au Ministère de la santé. Personne n’a pensé
à dénoncer ces conditions infectes. Je comprends qu’aux salaires qu’ils gagnent,
ils roulent en voiture climatisée. Un spécialiste en santé, mes pauvres petits
lecteurs, ça gagne pas moins de 45 $ dollars de l’heure. Tu peux t’offrir une
BMW et les paiements ne te font pas peur. C’est vrai, aussi, il n’y a pas de
vaccins payants à vendre… Ne venez pas me dire que la technologie ne permet pas
de mieux ventiler l’intérieur des wagons.
Et l’hiver c’est la même chose, parqués
comme des sardines avec notre gros manteau de laine, notre foulard et dessous
le gros manteau, trois pelures, quatre pour les vieillards qui n’ont plus de
gras. Là non plus, je ne comprends pas l’absence d’aération. Vous allez me dire
que si l’haleine du bœuf et de l’âne ont réussi à réchauffer Jésus dans la
crèche, le nôtre peut tout aussi bien faire l’affaire. Dites donc, à la STM,
avez-vous toujours de vieilles idées de même?