J’emprunte mon titre au poète français Stéphane
Mallarmé, qui devait être bien déprimé quand il affirma un jour que la chair
est triste et qu’il avait lu tous les livres. Il aurait sans doute dit la même
chose en parcourant cet album de très mauvais goût, tant dans le choix des
filles que dans l’absence de direction artistique. La Losique, qui s’apprête à
inaugurer sa chaîne érotique Vanessa, a eu l’idée de se mettre en scène à poil,
en faisant en sorte de cacher l’entrée de sa grotte céleste et la pointe des
mamelons.
Précisions anatomiques au cas où vous voudriez vous
« garrocher » pour la voir en tenue d’Ève. Dans une sorte de scénario
« on the road », elle croisera des filles qu’elle entraîne à sa suite
dans ses fantasmes.
J’adore le fait de vieillir, car on est moins à la
merci du sexe primaire. On le rationalise. Et les testostérones qui me restent
n’ont nullement été mises à contribution en voyant ces filles, pour la plupart
sans aucune classe, se faire des minouches. La seule photo esthétique est
celle de la jaquette, montrant en noir et blanc la productrice fumant une
clope, assise sur la ligne blanche d’une route. À sa façon, elle a voulu
reprendre, en infiniment moins provoquant bien sûr, l’album Sex de
Madonna.
Et d’ailleurs, je partage l’opinion de Nathalie Petrowski, qui a écrit
dans La Presse qu’en comparaison de la Material Girl, la Losique ne
faisait pas le poids. Mais alors pas du tout. Losique commande aux filles des
postures, mais elle prend bien soin, en ce qui la concerne, de ne dévoiler
qu’une partie de ce qu’elle veut bien montrer. Une certaine lâcheté, en somme.
Ou tu es libérée ou tu ne l’es pas. Ce n’est pas parce que tu tortilles ta
langue autour de celle d’une fille que tu deviens une cochonne diplômée. Ce
sont de vieux fantasmes éculés qui ne font même plus bander, à moins d’être un
attardé érotomane.
BUSINESS D’ABORD
Anne-Marie Losique, qui s’est donnée un petit coup
de pouce grâce à la chirurgie, est surtout une redoutable femme d’affaires. Une
bimbo business! Elle connaît la valeur de l’argent. On a beau rire
d’elle, elle s’en moque. Elle a réussi, reconnaissons ces mérites, à faire un
remarquable travail de productrice dans le créneau de l’érotique et dans le
monde de la télévision, qui est une jungle. Et le cul, comme disait feu
Arletty, c’est international. Sauf que ces Confessions sauvages vont
connaître une carrière très locale. Si, d’aventure, la maison d’édition Presses
libres veut exporter ce livre en France, elle devrait le diffuser dans les
maisons de retraites. Peut-être quelques vieux édentés, entre un morceau de
brie et un coup de pinard, auront-ils la surprise d’une petite humidité dans
leur caleçon.
Mais pour le reste, les Français ont produit des albums d’art (je
dis bien d’art) érotique qui relèguent celui de Miss Losique au rang de produit
vite fait et mal fait. Helmuth Newton est allé photographier en France des
filles sublimes. Les photos de Franca Perrotto, en revanche… Page 64, il y a
un sommet de vulgarité (et pour que je m’indigne, il faut que ce soit du
grandiose) où l’on voit une « gerda cheapo » avec un amoncellement de
frites entre les deux cuisses, se tenant les protubérances mammaires à pleines
poignées, la langue sortie entre des lèvres peinturlurées au gros rouge. Je me
suis demandé quel public la conceptrice veut séduire, avec ce cliché insipide.
LE VRAI PROBLÈME
C’est qu’Anne-Marie Losique n’a pas voulu mettre
tout son pognon dans l’affaire. Habituellement c’est elle qui produit ses
propres trucs, et avec talent (toute proportion gardée bien sûr). Mais là, au
lieu de produire l’album à compte d’auteur, elle s’assure qu’un éditeur prenne
les risques à sa place. Et l’éditeur n’a pas du cracher fort au bassinet. Car
voyez-vous, au Québec, c’est un marché beaucoup trop petit pour ce genre
d’édition érotique. Imaginez ici un Lavallois, père de famille, rentrer chez
lui avec ce livre en mains. Il va recevoir un coup de poêlon bien mérité
(surtout en raison de son manque de goût).
Ensuite, trouver des filles qui
posent, c’est difficile. On est toujours la fille ou la nièce de quelqu’un. Si
jamais l’affaire se savait. Déjà que les adolescentes sont craintives de se
foutre à poil devant une webcam, de peur de se retrouver sur Youtube, vues par
des millions de gens à travers la planète. Les grandes et belles
professionnelles qui posent pour la peine, le font pour pas mal de dollars à la
clé. Et si on veut produire pour le marché mondial, c’est un gros
investissement d’impression. Mais le jeu n’en vaut pas la chandelle car de
toute façon, ce n’est pas ce qui sort le plus en librairie. Marie Laberge n’est
pas menacée.
VANESSA À SUIVRE…
Si la programmation de la chaîne sexe Vanessa est
de même facture, j’ai peur pour l’avenir de la télévision canadienne. Losique
veut faire payer 15 $ par mois aux abonnés. Tant qu’à faire, payez plutôt un
abonnement à la chaîne Playboy. Les pitounes sont bien plus jolies. Ou que
canal V nous ressorte Bleu nuit le samedi soir, avec une énième reprise
d’Emmanuelle. La copie doit bien coûter 85 $ à la station et c’est dans ses
moyens. Et puis au moins on pourra encore se rincer l’œil en voyant Sylvia
Kristel se faire masser avec de l’huile dans un sauna vapeur. Me semble que là,
on parle.
Ce qui m’a amusé au lancement, c’est de voir que
Pierre Thibeault, l’ancien rédacteur en chef du défunt hebdomadaire Ici,
signe les textes de Confessions sauvages. J’ai été longtemps son
chroniqueur musique classique. Il ne m’a pas adressé la parole. Je comprends,
il devait être un peu gêné, lui le porte-étendard de la culture, la vraie,
d’être entouré d’autre chose que d’intellectuel. Celles gravitant autour de lui
font meilleure figure dans un party des Hell’s. Et puis coucou! Qui va là?
Francine Grimaldi, la vadrouilleuse. Ma foi, elle n’est pas chroniqueuse
culturelle? Que fait-elle là? C’est vrai que dans le mot culture, il y a
d’abord les trois premières lettres…
N.B. Mon copain Sylvain m’en a conté une bien bonne
de son crû. C’est une transsexuelle qui visite son médecin, au lendemain de la
grande opération. « Docteur, quand est-ce que je serai vraiment une femme? »
Et lui de répondre « Quand vous commencerez à blâmer les
hommes ».
Les opinions
exprimées sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles de
lametropole.com
L’AGACE DE BONNE FAMILLE
CONFESSIONS SAUVAGES
LE DON D’ORGANES