C’est ce que touchera Michaëlle Jean à compter de jeudi de
cette semaine, jour de son départ. Je vais l’écrire avant vous, je suis jaloux.
Non mais il faut le faire. Tu bosses juste cinq ans, à te farcir des
réceptions, couper des rubans, serrer des mains, passer des armées en revue
puis après. tu reçois ton beau chèque. Là l’expression « remercier de ses
services » prend un tout autre sens. Quelques mots sur cette femme qui a fait beaucoup jaser et
que j’ai eu le loisir de côtoyer du temps où elle et moi étions à Radio-Canada.
Elle venait faire des remplacements le weekend à la salle des nouvelles comme
chef d’antenne. Et j’étais rédacteur. Elle a toujours été une camarade de
travail impeccable, au charme indéniable. Tout le monde l’aimait. Ce n’était
pas difficile, on ne l’entendait jamais parler contre qui que ce soit. Et à
Radio-Canada qui était, et qui est encore une sorte de cour de Versailles des
coups de couteaux, elle savait assez bien tirer son épingle du jeu. Et un haut
cadre de l’information que je ne nommerai pas ici, n’en voyait plus clair à son
propos.
Et c’est ainsi qu’elle s’est retrouvée animatrice sur les deux réseaux,
français et anglais, de l’auguste société d’État. À l’interne, j’ai eu vent de
secousses quand il a été question de la réaffecter aux Grands reportages à la
présentation du Téléjournal de fin de semaine. Mais encore là, le carriérisme
ne partait jamais de Michaëlle. Les promotions sont venues quasi d’elle-mêmes.
Puis la fille avait de l’abattage, polyglotte (cinq langues, je crois) et
sympathique auprès du public. C’est avec elle que je ferai mon unique
« direct » à la télé le soir du réveillon de 1999, tandis qu’une
avalanche fit quelques morts dans le Grand nord québécois.
représentante de la Reine! Je m’en souviendrai toujours. Je vivais alors dans
un presbytère. Il était 7 h 30 le matin et tout en vaquant à des occupations
intellectuelles de haute volée, j’écoutais la radio de Radio-Canada qui
annonçait que le premier ministre Paul Martin l’avait élevée à la dignité
suprême. Heureusement que je ne mangeais pas un truc avec un os… je l’avalais
tout rond. Quoi!? Mais ce n’était pas possible. Nomination qui fut faite comme
on le sait dans la controverse, puisqu’on rappela ses sympathies d’antan avec
les souverainistes.
Puis le temps passa, elle prit assez rapidement le pli de
la fonction. Elle était plus souveraine qu’un monarque. À la différence de Lise
Thibault, qui n’était jamais redescendue sur terre, Michaëlle Jean ne s’est pas
lancée des dépenses somptuaires. À peine pouvait-on lui reprocher de faire des
discours grandiloquents chaque fois que se braquait un micro sur elle. Au point
de devenir une caricature. Plus récemment, apprenant que notre cher Harper ne
renouvelait pas son mandat, j’ai tenté de la joindre à Rideau Hall.
Étrangement, son attachée de presse est également une ancienne de la salle des
nouvelles de Radio-Canada que j’ai bien connue aussi.
D’autant plus que je
pouvais me prévaloir de cette relation privilégiée pour obtenir de sa patronne
une entrevue exclusive pour Métropole. Est-ce que je pourrais lui parler
quelques minutes la semaine prochaine? Et l’autre de me dire : « Oh!
Je ne crois pas que ce soit possible. Elle revient d’une tournée à l’étranger,
épuisante, et nous avons déjà une pile de demandes d’entrevues. Mais je vais
voir ce que je peux faire ». J’attends encore! La fonction change la
femme. Mais Harper, en plus de lui gratifier de son beau salaire, lui a trouvé
toute une planque comme envoyée spéciale de l’Unesco pour Haïti. Son poste de
base sera à Paris.
Toute un job. Imaginez! Durant son mandat de cinq ans, elle
n’avait qu’à mettre de côté son salaire annuel, car tout était payé, la formule
tout compris haut de gamme. Puis là s’ajoute une pension annuelle à vie de 128 000
$ par année, plus son salaire de l’Unesco. Julie Snyder n’en donne pas autant
au Banquier.
En passant, la dernière statistique à ce jour recense 30 000
itinérants à Montréal et le chiffre va en grandissant. C’était ma façon de vous
dire que l’écart entre les riches et les pauvres va s’agrandissant.