On ne peut pas reprocher à
Hereafter d’être christiano-centriste; la société occidentale est
christiano-centriste. On ne peut pas non plus lui reprocher d’avoir des
croyances, tant qu’on en est assez conscient pour se faire sa propre idée. Mais
on peut lui reprocher la mollesse de son scénario et la simplicité de ses
thématiques. George habite à San Francisco. Il a un don de voyance mais refuse d’en faire
un commerce, lui qui voudrait plutôt mener une vie normale. Il aimerait bien
rencontrer quelqu’un et tomber amoureux, mais son don l’en empêche.
À Londres,
le jeune Marcus vit difficilement le décès de son frère jumeau Jason, et tente
d’entrer en contact avec lui dans le monde des morts, mais sans succès. Pendant
ce temps, la journaliste française Marie Lelay survit miraculeusement à un
tsunami, mais elle est hantée par une vision de ce qu’elle croit être l’au-delà.
Par un concours de circonstances, les trois vont se rencontrer à Londres. Le scénario souffre de plusieurs graves problèmes qui auraient dû être
diagnostiqués dès la préproduction.
La mise en place du dénouement (c’est à ça
que servent les deux premières heures du film, au fond) est basée sur une
coïncidence (un jeune Londonien se souvient du visage d’un Américain de San
Francisco qu’il a vu sur internet il y a plus d’un an alors que ce dernier fait
justement un voyage à Londres parce qu’il aime Charles Dickens, ça aurait très
bien pu ne pas se passer) particulièrement mince, et dont la portée symbolique
demeure plutôt douteuse. D’autant que le reste du récit n’est pas
particulièrement inspiré ou transcendant, se contentant de lieux communs.
Les personnages sont incohérents (pourquoi le jeune Marcus, après ses
nombreuses mauvaises expériences, fait-il encore confiance à un voyant, et
pourquoi à celui-ci en particulier? Les beaux yeux de Matt Damon?) et même
la mythologie du film est trahie pour que le récit puisse se poursuivre (disons
que l’explication du don de George n’était pas nécessaire). Les coïncidences
sont tellement fortes (et le message tellement quétaine), qu’on se surprend à
rire plutôt qu’à s’émouvoir. D’autant que le message est particulièrement
simpliste.
Une scène cependant est véritablement prenante : George (Damon) accepte
d’entrer en contact avec le père décédé d’une jeune fille qu’il vient de
rencontrer et qu’il aime bien. Cela donne l’occasion à Bryce Dallas Howard
de démontrer son grand talent, et la scène porte en elle une véritable émotion.
Contrairement au reste du film, réalisé mièvrement (incluant zoom-in incongrus
et musique envahissante) par Clint Eastwood, qui
se fait décidément vieux. Cela n’aide pas non plus que les jumeaux Frankie et
George McLaren soient de très mauvais acteurs.
Hereafter est un film qui aborde un sujet sensible et qui, n’allant
pas au bout de ses idées, se ridiculise en le faisant. Il se fait même
prédicateur en prétendant que « des preuves scientifiques existent » et que
c’est un complot savamment orchestré qui les empêche d’éclater au grand jour,
pour que tout le monde comprenne enfin le plus grand mystère de la vie : la
mort. Mais ce film ne sait pas se faire suffisamment inspirant pour
convaincre.
En salle dès ce vendredi 22 octobre 2010.
Source : cinoche.com