Voilà le constat que fait la police du travail
accompli par le tueur qui a assassiné le patriarche de la famille
mafieuse Rizzuto, qui régnait sur Montréal depuis une trentaine
d’années.L’homme de 86 ans se trouvait dans la cuisine, juste devant une verrière, lorsque la balle l’a atteint à la tête. Habituellement fort tranquille, la rue Antoine-Berthelet qui
jouxte le boisé Saraguay avait les airs familiers de la série CSI, hier. Les experts de la police de Montréal ont passé au peigne fin les
alentours de la luxueuse maison du parrain, à l’aide de détecteurs de
métal et de chiens renifleurs.
IL N’A PAS PERDU SON PORTEFEUILLE
On s’est notamment attardé au boisé situé à l’arrière de la
maison non clôturée de la victime, où le tireur semble s’être installé
pour attendre le moment propice, et par où il aurait ensuite pris la
fuite. Tout tend à démontrer que la police a affaire à un professionnel. Aucun indice n’a été laissé derrière lui. Pas d’arme, pas de trépied, pas de gants. Pas même un mégot de cigarette. « Disons qu’il ne nous a pas fait le cadeau d’échapper son portefeuille en prenant la fuite », a illustré un policier. La police se retrouve avec peu de preuves pour se mettre aux trousses de l’assassin.
CAMÉRAS DE SURVEILLANCE
Par ailleurs, les policiers ont pris possession des bandes vidéo
tournées par les caméras de surveillance récemment installées autour de
la maison de Rizzuto, a confirmé le commandant Denis Mainville, de la
Division du Crime organisé. Les policiers de la section des crimes technologiques analyseront
les images, afin de déterminer si l’assassin y a été filmé. Parions que
si c’est le cas, on ne pourra pas distinguer grand-chose de sa
physionomie.
CODE D’HONNEUR VIOLÉ
La police est persuadée que c’est pour passer un message que
l’assassin, ou son commanditaire, a agi de cette façon plutôt
audacieuse, en abattant ainsi sa proie devant ses proches. « On a violé le code d’honneur, qui dit qu’on ne s’attaque pas aux
femmes et aux enfants et qu’on ne fait rien en leur présence », dit le
commandant Mainville. Or, mercredi, Rizzuto a été abattu dans sa propre maison, en présence de son épouse et de sa fille. « Ça en dit long sur le non-respect qu’on accordait à M. Rizzuto », dit-il.
LES GRANDES DATES
– 1924 : Naissance de Nick Rizzuto dans le petit village de Cattolica Eraclea, au coeur de la province d’Agrigente, en Sicile. Plusieurs de ses futurs associés à Montréal naissent aussi dans cette région, tout comme plusieurs futurs hommes d’affaires prospères de la communauté italo-canadienne.
– 1933 : Son père, qui s’appelle Vito (le même prénom que portera son fils) est assassiné dans des circonstances troubles après être parti tenter sa chance en Amérique.
– 1945 : Il épouse Libertina Manno, fille d’un chef de la mafia local. Il a 21 ans, elle, 18.
– 1946 : Naissance du premier fils du couple, Vito Rizzuto, destiné à devenir le parrain de la mafia à Montréal.
– 1954 : Nick Rizzuto, son épouse et leur fils immigrent au Canada.
– 1974 : Arrêté par la police dans une maison de jeu clandestine, il écope d’une amende de 25 $.
– 1974 : Entré en conflit avec la faction calabraise de la mafia italienne à Montréal, le criminel ambitieux qu’est Nick Rizzuto s’exile temporairement vers le Venezuela, où il développe son vaste réseau de trafic international de drogue.
– 1978 : Le chef de la faction calabraise, Paolo Violi, est assassiné par les Siciliens de Montréal, comme certains de ses alliés. Les Siciliens, sous le leadership des Rizzuto père et fils, se hisseront au sommet de la pyramide du crime organisé dans la métropole.
– Années 1980, 1990 et 2000 : Le clan Rizzuto s’enrichit énormément par son implication dans une foule d’activités criminelles dont l’extorsion, l’importation et le trafic de drogues ainsi que les paris illégaux. Ils gardent d’importants intérêts au Venezuela.
– 1988 : Nick Rizzuto est arrêté et condamné à six ans de prison au Venezuela pour possession de cocaïne.
– 1993 : Libéré par les autorités vénézuéliennes, il revient à Montréal, où l’attendent ses proches.
– 1994 : L’épouse de Nick Rizzuto, Libertina, est arrêtée en Suisse et détenue quelques mois après s’y être rendue pour transiger dans des comptes bancaires de la famille.
– 2006 : Nick Rizzuto est arrêté dans le cadre de l’opération Colisée de la GRC. Il plaidera coupable à des accusations de gangstérisme et recel d’argent issu du crime. Il purgera deux ans de prison.
– 2008 : Il est libéré de prison.
– 2010 : Un tueur l’assassine chez lui, en présence de son épouse et de sa fille.
Sources : Canoë et ruefrontenac