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Charest joue aux  » apprentis sorciers  »

C’est la conclusion de la formation politique, après sa lecture d’un rapport troublant du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) portant sur les gaz de schiste. Ce document révèle que la plupart des puits inspectés par les autorités comportent des fuites. Le député péquiste Scott McKay estime que c’est « extrêmement troublant ». Dans une entrevue téléphonique mercredi, cet ancien chef du Parti vert du Québec a soutenu que le gouvernement libéral fait preuve de « laxisme » et de « complaisance » en prenant « la défense » de l’industrie du gaz de schiste.

« (Ce rapport) soulève plus de questions qu’il n’apporte de réponses, a-t-il commenté. Le gouvernement Charest joue aux apprentis-sorciers avec la qualité de l’environnement (au détriment de) la santé de la population. » Si ce n’était du BAPE qui a posé ces questions, jamais le ministère des Ressources naturelles, jamais sa ministre Nathalie Normandeau, et encore moins le ministre de l’Environnement, Pierre Arcand, ne les auraient soulevées, a-t-il dénoncé. « Ce manque de transparence inquiète », a-t-il poursuivi. À ses yeux, le rapport « donne raison » au Parti québécois qui demande un moratoire sur l’exploration et l’exploitation dans le domaine des gaz de schiste.

Daté du 7 décembre, le document du BAPE précise que des 31 puits inspectés par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune (MRNF), 19 laissaient échapper des « émanations de gaz naturel ». Ces puits, forés depuis 2006, sont répartis dans les trois principales zones ciblées par l’industrie gazière, soit les MRC de Lotbinière, de Bécancour et des Maskoutains. L’industrie « prend au sérieux » le rapport, mais tient à le remettre en contexte. Ces incidents ont été relevés sur plusieurs années et leurs conséquences sont « mineures ».

« Je ne veux pas prétendre que dans nos activités, il n’y a aucun risque: il y a des risques, mais ils sont quand même connus et bien encadrés », a déclaré le porte-parole de l’Association pétrolière et gazière du Québec, Stéphane Gosselin, en entretien téléphonique. « En aucun cas, on a mis en danger la sécurité des citoyens, des travailleurs sur les sites, ou même la sécurité environnementale. Donc, on parle vraiment de problèmes mineurs. » L’Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique (AQLPA) déplore qu’on ne puisse juger de la gravité des risques, en raison du manque d’information « crédible et indépendante ».

« On nous dit que ce sont des problèmes mineurs, mais au Québec, on n’a aucune loi, on n’a aucune information, ça (les activités de l’industrie) apparaît nulle part dans les bilans, et là, il faudrait croire l’industrie là-dessus! », s’est insurgé le président de l’AQLPA, André Bélisle. Dans une lettre datée du 22 décembre, le BAPE demande au ministère des Ressources naturelles quels risques représentent les fuites et quels sont les correctifs exigés par le ministère, le cas échéant.

L’attaché de presse de la ministre des Ressources naturelles a indiqué que Mme Normandeau n’était pas disponible pour commenter. Un responsable du ministère a pour sa part assuré qu’il prend « très au sérieux » les conclusions du rapport du BAPE. « On n’est pas inquiet de la situation pour la santé des gens, étant donné que le gaz est présent naturellement dans le sol, a tenu cependant à ajouter le directeur du Bureau des hydrocarbures au ministère des Ressources naturelles, Sébastien Desrochers. Il n’y a pas de risque pour la population si le gaz va dans l’air. »

Il a rappelé que le ministère poursuivra un programme d’inspection « systématique et rigoureux » et que les entreprises fautives devront effectuer les correctifs nécessaires. Un représentant d’un groupe d’opposants aux forages a quant à lui affirmé que les conclusions du rapport vont dans le sens de la demande de moratoire. « Ce (rapport) n’est presque pas une surprise », a fait valoir Pierre Batellier, du regroupement Mobilisation gaz de schiste, et qui est aussi coordonnateur en développement durable et chargé de cours en responsabilité sociale des entreprises à l’école des HEC.

Le regroupement se réunira vendredi soir pour discuter des suites à donner au rapport. Un porte-parole du ministre de l’Environnement, Pierre Arcand, a pour sa part affirmé qu’il revenait au ministère des Ressources naturelles de commenter ce dossier. Enfin, mercredi était la date limite pour signer la pétition officielle du site de l’Assemblée nationale réclamant un moratoire complet sur l’exploration et l’exploitation dans le domaine des gaz de schiste. En après-midi, elle comptait un peu moins de 120 000 signatures.