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Retour convaincant des annÉes folles

Patrick Huard dans le rôle de Bastien,
inspiré de la chute de l’animateur vedette
de l’époque Alain Montpetit, nous
montre l’acteur de métier et de talent
qu’il est. Son jeu tout en nuances fait à lui
seul le succès du film. On y croit du début
à la fin à son Bastien. À ses côtés, il y a Paul Doucet, le Douglas
Leopold de l’époque. Les premières
images de l’homosexualité assumée. Il
n’est pas bon, il est excellent. Tantôt exubérant,
tantôt touchant, mais surtout
réel. Et que dire de Raymond Bouchard
en propriétaire du Starlight qui hait ce
que l’arrivée du Parti québécois est en
train de faire au Québec.

La trame politique
du film est d’ailleurs un beau rappel
à l’ordre et un retour à ces années où
ça se passait en anglais à Montréal.

UN SCÉNARIO FORT

Bravo à Steve Gallucio, l’auteur qui,
après plus de deux ans de recherches,
offre un scénario de grande qualité tant
sur le plan social que politique. Funkytown
aurait pu tellement tomber dans le
gros cliché et le futile de toutes ces années,
mais au contraire, en se servant habilement
de ces personnages, l’auteur
fait des rappels historiques fort pertinents
et intéressants.

Et sa façon de parler de l’homosexualité
est très éloquente. Heureusement, il y a
eu une belle évolution sur ce point, car
combien de vies ont été brisées comme
ce jeune Tino, interprété magnifiquement
par Justin Chatwin, à cause de tous
ces interdits et du silence. Au fait, c’est la vérité des personnages
qui fait de Funkytown un film attachant.
On passe définitivement un bon moment
malgré sa durée de plus de deux heures,
preuve de la richesse de cette époque folle
de Montréal fin des années 70.

UNE RÉALISATION HABILE

Daniel Roby, le réalisateur, a su éviter
les pièges en se servant magnifiquement
bien de la richesse des personnages qui
jouent avec vérité et droiture.
Résultat : nous sommes totalement
transportés pendant deux heures dans ce
Montréal vivant, libertin, libéral, qui savait
prendre des risques. Les François Létourneau en fils soumis
qui explose au bon moment, Geneviève
Brouillette en vedette déchue qui sait rebondir,
Sophie Cadieux en secrétaire fidèle
qui sait se dévoiler, et l’actrice Sarach
Mutch en Adriana qui séduira totalement
les cinéphiles sont tous des
conditions gagnantes qui font de Funkytown
un film à succès.

Il faut saluer le travail juste du réalisateur
Daniel Roby, l’audace du producteur
André Rouleau de Caramel Films, qui a
cru à son projet et a su demander le budget
qu’il fallait, 8 M$, car une période
aussi riche ne pouvait pas se réaliser
avec peu de moyens.

UN AUTRE PAS POUR NOTRE CINÉMA

Avec Funkytown, le cinéma québécois
fait un autre pas de géant. Le disco était
la période de liberté où tous les risques
étaient permis ou presque. Certains ont
gagné, d’autres y ont perdu leurs illusions,
voire leur vie. Funkytown, c’est le disco, la musique, le
rire, la danse, les défis, le sommet, la
drogue, suivie d’une chute brutale pour
certains. Et cette chute, le réalisateur Daniel
Roby nous la fait vivre avec brio en
compagnie de son personnage de Bastien.

Allez voir Funkytown pour vibrer au
rythme des années du disco à Montréal,
mais également pour réfléchir sur comment
vivre avec le succès, comment équilibrer
sa vie, comment accepter l’autre
tel qu’il est. L’auteur Steve Gallucio sert
plus qu’un show du samedi soir à la disco
dans Funkytown. Il nous livre une leçon
de vie. À noter le travail du directeur photo Ronald
Plante, les décors de Jean Bécotte et
la musique qui présente de véritables
trésors sous la direction de Jean Robitaille
aidé de Mario Lefebvre, qui a su négocier
pour aller chercher les plus
grands succès de l’époque. Funkytown, un party totalement réussi
où l’humain danse et joue avec sa vie.

Source: QMI

PATRICK HUARD

RAYMOND BOUCHARD