ils parlent forts au cellulaire, mettent les pieds sur le banc d’en face, accrochent tout le monde avec leur sac à dos. Encore un peu et à ce rythme on ne cédera plus la place à une femme enceinte. C’est contre cette dérive que la relationniste Sandra Paré a rédigé un petit traité des convenances à l’usage des jeunes filles. Mais pourquoi seulement pour les jeunes filles ? Est-ce que les mêmes règles de civilités ne s’appliquent pas à l’identique ? « Oui, mais il y aura un autre livre du même genre pour les garçons, mais à la différence s’y trouvera un chapitre qui les concernent spécifiquement sur le thème de l’affirmation de soi face à l’élément féminin. Car on le voit bien au Québec, la masculinité est absente du paysage. Et j’ai des choses à rappeler à ce chapitre. »
L’ÉTIQUETTE REVUE ALLÉGÉE
Quand elle était jeune, Sandra a été élevée en partie chez les sœurs dont elle admirait le sens de l’organisation. « Ça m’a toujours impressionné. Au point que j’ai longtemps songée à en devenir une ». Si nous avons perdu une future sainte nous avons gagné au change une femme sensuelle qui aurait eu, un peu beaucoup, du mal avec le vœu de chasteté. Mais ça c’est une autre affaire. A notre époque des droits et libertés et où les droits l’emportent rageusement sur les devoirs, c’est comme si la surestimation du « je » avait complètement évacué le « nous ». Il n’y en a que pour soi. Après moi le déluge.
Au début c’était bien beau, cette revendication du soi, mais la perte de l’altérité (mot savant qui veut dire l’autre) nous mène à des écarts de conduite inadmissibles. Sous le titre « Savoir vivre c’est facile » et en sous-titre « Guide de savoir-vivre pour les filles », elle adapte et allège l’étiquette en fonction de notre époque. C’est bien entendu qu’on n’est plus au temps où il était de bon ton que les dames demeurent coiffées à l’église. Vous voyez bien que le savoir-vivre a aussi évolué. Sans tomber dans les niaiseries non plus du genre de la grande prêtresse du protocole en toutes choses, Louise Masson, qui avait mis hors de lui Jean-Pierre Coallier en voulant faire une démonstration sur l’art de peler une banane avec des ustensiles…
Non vous ne trouverez pas ce genre de sottises dans le livre de Sandra Paré qui est très populaire en passant dans les écoles où elle vient donner des conférences sur le sujet. Les jeunes l’adorent et les directions des établissements d’enseignement aussi. On s’est rendu compte qu’on ne peut plus se comporter comme des sauvages. Qu’un minimum de décence est requis. C’est si important que même dans l’emploi, un candidat bien élevé risque de l’emporter à valeur égale avec un diplômé de même calibre.
DES USAGES DU CELLULAIRE
Je ne pouvais pas ne pas demander en terminant à cette chère Sandra, ce qu’elle pense des usages immodérés que les usagers font du cellulaire. Voici ce qu’elle dit à ce propos :
« À quoi cela sert-il de se rencontrer autour d’une bonne table, si c’est pour passer la soirée à envoyer des textos à une autre personne ? Le cellulaire ne devrait jamais être déposé sur la table, à moins que vous ne soyez médecin de garde ou une personne « sur appel ». Vous devez vous s’excuser en déposant le téléphone sur la table près de vous (la tonalité sur vibration). Je conseille par contre, aux jeunes de TOUJOURS répondre à leurs parents (en s’excusant et en se levant de table pour le faire).
Au timbre de la première sonnerie, vous vous excusez aux autres convives et vous vous levez sur le champ, au deuxième, vous vous éloignez immédiatement de la table vers le vestibule ou l’entrée de l’endroit où vous vous trouvez, au troisième vous appuyez sur le bouton et vous devriez être rendu assez loin des gens présents, pour saluer votre parent. À votre retour vous vous excuserez à nouveau auprès des gens, dérangés par votre appel. Sinon abstenez-vous d’y répondre. »
Comme on le voit, le civisme c’est comme on disait jadis « une foule de petites choses » Et les religieuses si chères à Sandra se faisaient forts de dire : « Une place pour chaque chose, et chaque chose à sa place »
Amen !