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Mariage du classique et du jazz

La « guerre » si ont peut s’exprimer ainsi, ne venait pas tant des musiciens et chanteurs qui aiment vagabonder en autant que la beauté soit au rendez-vous, mais bien de mélomanes coincés qui ne peuvent se faire à l’idée de faire coïncider dans un même programme des genres opposés. Et la démonstration éclatante a été faite du contraire avec ce récital de toute beauté réunissant la mezzo-soprano d’origine suédoise Anne Sofie von Otter et le pianiste de jazz réputé Brad Mehldau.

Ça fait deux ans que ces deux-là travaillent ensemble, et le musicien lui a même offert un cycle de sa composition intitulé Love Songs qui clôturait d’ailleurs cette soirée. Au programme une ouverture avec des mélodies venant de sa Scandinavie avec des compositeurs tels que Edvard Grieg, Whilelm Peterson-Berger, Whilelm Stenhammar et Sibelius. Et même si le suédois nous est étranger aux oreilles, c’est la force de la cantatrice de nous faire planer en sa compagnie vers des univers quasi célestes, parfois amusants.

UN PIANISTE HORS PAIR

Puis Mehldau a laissé sa partenaire reprendre son souffle en interprétant un intermezzo de Brahms qui a remplacé le Capriccio en si mineur prévu au programme. Puis il a enchaîné avec le Capriccio en sol mineur toujours du même compositeur. Cet homme pétri par le jazz est à la base un musicien d’exception et il est capable comme on l’a vu, d’emprunter le sentier du classique où il est tout aussi à l’aise. Et il a en plus la délicatesse de l’accompagnateur, toujours attentif envers celle qu’il va servir avec brio. La première partie s’est clôturée avec trois lieder, toujours de Brahms et duex de Richard Strauss dont l’évocateur Die Nacht. La deuxième partie était constituée des fameux Love Songs dont je parlais plus haut.Beaucoup de couleurs dans le phrasé et de l’attendrissement. Un petit bijou.

Ensuite Mme von Otter, très décontractée et que l’on soupçonne d’être une bonne blagueuse, est allée de pièces diverses dans des univers aussi variés que Michel Legrand avec un air des Demoiselles de Rochefort, Dis quand reviendras-tu ? popularisé par Barbara et qui ici, prenait une teinte inédite, pleine d’élévation, presque un lied. Et le français de la chanteuse irréprochable. Du Leonard Bernstein et Joni Mitchell complétèrent. Bref il y en avait pour tous les goûts. Ma seule restriction c’est que les gens applaudissaient à tout bout de champ. Même, si à part les Love Songs ce n’étaient pas des cycles proprement dits, il aurait fallu attendre à la fin d’un bloc d’un compositeur donné pour manifester son approbation. Ainsi on aurait réussi à mieux préserver ces instants de grâce. Et aussi ces chuchotements de spectateurs entre chaque pièce. Mais qu’ont-ils tant à se dire qu’ils ne peuvent se réserver au sortir de la salle ?