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Des trÉsors vinicoles du jura

RH – Parlez-nous de vous, du lieu où vous êtes né, de votre rapport avec la terre et de votre rapport avec le Domaine de Saint-Pierre.

FD – Je suis né dans la jolie petite ville d’Arbois, qui est une appellation à part entière et qui représente la moitié du vignoble du Jura. Fils et petit fils d’agriculteur, malheureusement pas de viticulteur.

J’ai commencé par travailler dans une coopérative et un jour, j’ai rencontré Philippe Moine, qui avait planté des vignes une dizaine d’années auparavant et qui m’a proposé de faire un bout de chemin avec lui. À mon arrivée au domaine,  il y a une dizaine d’années, il y avait trois hectares de vignes, et le travail était de type conventionnel. Aujourd’hui, il y a six hectares de vignes et nous pratiquons l’agriculture biologique et la biodynamie, parce que la terre ne nous appartient pas, nous l’empruntons à nos enfants. Mon objectif est de la leur redonner la plus propre possible et de cette façon, nous produisons aussi des vins plus sains.

RH – On dit que le vignoble du Jura est d’origine ancienne.

FD – Je ne saurais vous dire quand a démarré le vignoble dans le Jura; on y a toujours cultivé la vigne et jusqu’au début du 20e siècle notre vignoble, qui avait 20 000 hectares, était même plus important que le bourguignon.  Malheureusement, à cause du phylloxéra et des guerres successives, on a délaissé la viticulture pour le développement de l’agriculture laitière. La surface viticole aujourd’hui est rendue à 2 000 hectares.  

RH – Sur combien d’appellations s’étend le Domaine de Saint-Pierre?

FD – Le Domaine de Saint-Pierre cultive deux appellations, mais 95 % est sur l’appellation Arbois et une toute petite partie sur l’appellation Côtes du Jura.

RH – Comment sont les terroirs?

FD –  Sur Saint-Pierre, nous avons un sol très calcaire avec énormément de cailloux, ce qui donne des vins avec un côté très aérien et très minéral. Sur la colline de Pupillon, nous sommes sur des marnes plus argileux, qui donnent des vins beaucoup plus lourds.

RH – Combien de vins vinifiez-vous?

FD –  Nous avons une dizaine de cuvées; toutes ne sont pas élaborées chaque année, c’est plutôt le profil du millésime, la matière première qui nous guide dans notre façon de vinifier et d’élever les vins.

RH –  En nombre de bouteilles, quelle est votre production?

FD – Sur nos six hectares, nous produisons aujourd’hui 20 000 bouteilles; notre objectif est d’en faire 25 000. Ce qui a été assez difficile à atteindre cette année, car les récoltes étaient faibles. Nous avons un domaine à taille humaine.

RH – Vous vendez vos vins principalement à la propriété, n’est-ce pas?

FD – Oui, et l’objet de notre visite, c’est de vendre aussi nos vins au Québec, puisque nous avons découvert énormément  de gens passionnés et très cultivés dans le monde du vin.

RH – Nous sommes très curieux pour les vins du Jura, qui ne sont pas encore très connus, mais que nous découvrons et apprécions par leur complexité et leur caractère unique.

FD – Les Québécois sont très curieux du vin en général, des amateurs éclairés, beaucoup plus que les Français, ce qui nous fait un plaisir immense. C’est vrai que cette typicité, ces vins si particuliers que nous avons, c’est quelque chose qui est intéressant à découvrir et que les gens aiment ici.

Fabrice Dodane m’avait apporté trois vins qu’il produit au Domaine de Saint-Pierre. Il a d’abord ouvert un Château Renard 2007, qui est un assemblage de Chardonnay Savanien, peu répandu au Jura, dont la robe est claire, dorée, transparente, vraiment très belle.   

FD – Nous avons voulu que ce vin soit un vin d’apéritif, avec des notes d’agrumes. Le sol très caillouteux transmet à ce vin un côté très minéral. On va avoir une bouche un peu tendue, c’est le profil de 2007. C’est un vin qui convient parfaitement avec le crabe des neiges et tous les fruits de mer. Sa texture, sa droiture, permettent de bien relever ces plats.

RH – En bouche, la trame vive de ce vin apporte beaucoup de fraîcheur; c’est excellent pour accompagner tous les fruits des mers. Un vin de début de repas.

Fabrice Dodane a ensuite ouvert un vin rouge Domaine de Saint-Pierre, assemblage de Pinot noir et de Poulsar.

FD – C’est une parcelle coplantée avec ces deux cépages. Nous respectons cette parcelle et nous vinifions ces cépages ensemble.

RH – La robe est d’un rubis soutenu avec des notes violettes, une très jolie robe qui annonce un vin d’une belle maturité.

FD – Comme la vue nous le laissait supposer, il a des arômes de fruits rouges et de fruits noirs, beaucoup de matière. Un petit côté épicé qui est apporté par le Ploussard, qui laisse augurer d’une bouche riche et plaisante.

RH – C’est un vin facile à boire, un vin agréable, d’une belle approche.

FD – Voulu ainsi par moi. Nous sommes sur une vinification relativement douce; nous n’avons pas cherché les tanins, nous voulions avoir surtout les fruits, la finesse. Nous avons une bouche bien présente, mais les fruits dominent. C’est un vin que je mettrais sur un magret de canard ou du thon, tout simplement.

Fabrice Dodane avait apporté un troisième vin. Le Domaine de Saint-Pierre, cépage Savagnin, cuvée du Lion, appellation Arbois, 2003.

FD – Je ne pouvais pas amener des vins du Jura au Québec sans parler du cépage Savagnin, qui est typiquement jurassien; c’est le cépage exclusif pour l’élaboration du vin jaune. Ici, nous allons goûter à un vin de Savagnin, qui n’est pas du vin jaune, mais qui a 48 mois d’élevage sous voile. Nous changeons complètement de registre; les notes sont déjà plus jaunes, c’est un vin qui a évolué.

RH – On sent des arômes de noix verte, de champignons, de graphite.

FD – Qui sont des arômes caractéristiques de l’élevage du Savagnin sous voile, un élevage unique au monde que seuls les Jurassiens maîtrisent.

RH – Il y a beaucoup de puissance dans ce vin, énormément de profondeur. 

FD – La bouche vient confirmer la puissance. Une attaque pleine, intégrale, un milieu de bouche très présent et une finale qui n’en finit jamais, toujours sur des arômes de bois, de graphite, de champignons de sous-bois, de fruits secs. Ce vin va et vient dans votre bouche et le goût peut rester jusqu’à une heure. C’est un vin très puissant.

RH – C’est un régal, et j’ai l’impression que c’est aussi un vin qui peut se garder très longtemps.

FD – Plus longtemps que nous, la seule condition étant de ne pas ouvrir la bouteille. Une petite idée, si vous passez dans le Jura, la poularde au vin jaune et aux morilles, un des accords les plus traditionnels, certes. On peut mettre un petit risotto au comté par-dessus et là, c’est un moment magique.

RH – C’est magique et cela nous donne envie d’aller passer des vacances dans le Jura.

Voici les coordonnées de Fabrice Dodane; ne manquez pas de lui rendre visite au Domaine de Saint-Pierre lorsque vous allez dans le Jura :
6, rue du Moulin 39600 Mathenay
Téléphone : 03 84 73 97 23
[email protected]

REPRÉSENTÉ AU QUÉBEC PAR :
Vincent Lafortune
LLP Experts en vin
[email protected]

Samy Rabbat