« Les deux parties sont incapables, jusqu’à maintenant et depuis plusieurs mois, d’en arriver à une entente », a-t-il expliqué au sujet des deux conflits de travail. « Ce gouvernement va agir pour protéger les intérêts supérieurs de l’économie canadienne et de la population canadienne », a argué le premier ministre aux Communes. La ministre du Travail a reconnu que, idéalement, la partie patronale et le syndicat en viendraient eux-mêmes à une solution négociée. Mais comme le litige ne se règle pas, Ottawa doit agir, a-t-elle plaidé. Or, l’opposition y voit le signe que le gouvernement conservateur n’appuie pas la libre négociation et le droit de grève, avec ce geste qualifié de « draconien » par le leader néo-démocrate Jack Layton.
« Ils (les conservateurs) envoient un coup de semonce à quiconque exerce ses droits de négociation dans le secteur public au Canada. (…) Ce n’est pas un gouvernement qui est sensible dans l’ensemble aux droits politiques des Canadiens, et encore moins aux gens qui travaillent dans le secteur public », a quant à lui scandé le chef libéral intérimaire, Bob Rae. Une loi spéciale aidera davantage l’employeur que les employés, selon le néo-démocrate Yvon Godin, qui prévient que son parti aura recours à tous les procédés parlementaires disponibles pour retarder son adoption, ce qui pourrait forcer les députés à siéger aux Communes au-delà de la fin de la session parlementaire prévue le 23 juin.
LIBÉRAUX ET BLOQUISTES VOTERONT
EUX AUSSI CONTRE LE PROJET DE LOI
Le gouvernement majoritaire de M. Harper pourrait toutefois imposer le bâillon, accélérant ainsi la démarche parlementaire. Cette possibilité n’a pas été exclue par un porte-parole conservateur. Après 12 jours de grèves tournantes et plusieurs semaines de négociations infructueuses, Postes Canada a décrété un lock-out mardi soir et annoncé la suspension de ses activités partout au pays. Une porte-parole de la société d’État, Anick Losier, a dit que cette mesure vise à « précipiter les choses ». « Le syndicat dans les dernières semaines n’a même pas été très sérieux à la table de négociations, et ça prend des discussions réalistes », a indiqué Mme Losier, réclamant la conclusion d’une entente négociée, en entrevue téléphonique.
Postes Canada affirme que l’accélération du déclin des volumes de courrier ainsi que l’impossibilité de le livrer à temps et de façon sécuritaire ont forcé le décret d’un lock-out. Le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) n’a pas tardé à répliquer, mercredi matin, en affirmant que l’attitude de la société d’État était « inacceptable », puisque Postes Canada a pris « d’une certaine façon une partie du courrier en otage, une partie de la population en otage ». En conférence de presse à Ottawa, le président national et négociateur en chef du STTP, Denis Lemelin, a réitéré la volonté syndicale de reprendre les négociations, en autant que la partie patronale revoie le mandat de ses négociateurs. Car après huit mois de pourparlers, la situation n’est toujours pas réglée.
Mme Losier a indiqué que le grand patron des Postes, Deepak Chopra, était prêt à rencontrer la partie syndicale. Syndicat et direction souhaitent poursuivre les négociations librement et se sont dits défavorables à une loi spéciale du gouvernement fédéral, avant que la ministre Raitt ne confirme son intention d’en déposer une. M. Lemelin a rappelé que ce scénario pourrait affecter les relations de travail pour les années à venir. Postes Canada prétend avoir subi des pertes totalisant près de 100 millions $ jusqu’ici, en incluant les grèves de mardi à Montréal et à Toronto. La direction croit qu’un lock-out était le meilleur moyen de résoudre rapidement l’impasse, puisqu’un écart important sépare toujours les parties sur plusieurs questions fondamentales.
La partie patronale estime ainsi pouvoir forcer le syndicat à examiner les propositions qui traitent de la baisse des volumes de courrier et du déficit de 3,2 milliards $ du régime de retraite.