(Nitro), d’après le livre Avant de
m’en aller de Mario Roy, Gerry
suit la forme du biopic classique.
La vie de Gérald « Gerry »
Boulet y est racontée de façon
chronologique et conventionnelle,
sans digression temporelle. Le film traverse d’abord assez
rapidement la jeunesse de Gérald
Boulet, évoquant son enfance à
St-Jean-sur-Richelieu et ses débuts
comme musicien avec son
frère Denis au sein du groupe Les
Gants Blancs. À partir de là, tout s’enchaîne
très vite. Gerry rencontre sa première
femme, Denise, qui tombe
rapidement enceinte.
Le groupe
change de nom pour Offenbach
Soap Opera et croise sur sa route
Pierre Harel, qui voit en eux les
« Rolling Stones du Québec » et
qui convainc Gerry à chanter en
français. Offenbach se fait offrir peu de
temps après de s’installer en
France pour le tournage d’un documentaire
(Tabarnac). C’est là
que Gerry rencontre Françoise
Faraldo, de qui il tombe éperdument
amoureux et qui le suivra
au Québec à son retour. La suite est plus connue: déchirures
au sein du groupe, succès,
tour nées, rupture, show
d’adieu, carrière solo écourtée
par un cancer ravageur…
SANS COMPLAISANCE
Bien remplie, mouvementée et
tragique, la vie de Gerry Boulet
avait, d’emblée, tous les éléments
dramatiques pour construire un
bon scénario (écrit par Natahlie
Petrowski). En près de deux
heures et quart, le film d’Alain
DesRochers survole donc la vie et
la carrière de ce pionnier du rock
québécois, sans oublier trop de
chapitres importants. Si certains épisodes ne sont
abordés qu’en surface et que plusieurs
séquences semblent beaucoup
trop arrangées avec le gars
des vues, le film parvient à brosser
un portrait honnête et sans
complaisance du rocker.
La réussite de ce drame biographique
repose en grande partie
sur la performance magistrale
de Mario Saint-Amand, qui
prête son corps, sa voix et son
âme au personnage de Gerry. Loin de se contenter d’imiter
le célèbre rocker, Saint-Amand a
su l’incarner de l’intérieur, en
puisant dans son propre passé
parfois douloureux. Poignant, il
nous fait entrer dans la vie de
Gerry, ses amours, sa passion,
son drame. Son jeu est carrément
époustouflant.
LEGS MUSICAL
Autour de Saint-Amand, d’autres
acteurs ont su tirer leur
épingle du jeu: Louis-David Morasse
en grand frère dans l’ombre,
la Française Capucine Delaby
en amoureuse lumineuse,
Marc-François Blondin en fidèle
et fragile complice. D’autres, en revanche, ont été
confinés à des rôles plus superficiels
frôlant parfois même la caricature:
Jonas (John McGale),
Maxime Morin (Marjo) et Stéphane
Archambault (Alain Simard),
notamment. L’imposant legs musical de
Gerry Boulet est, bien sûr, au
coeur de l’oeuvre de DesRochers.
La trame musicale qui occupe
plus de la moitié du film a le mérite
de refaire découvrir tous ces
classiques du rock québécois. On
les entend en répétition, en écriture
ou en spectacle et on ne s’en
lasse jamais.
À la barre de ce film ambitieux,
le réalisateur Alain DesRochers
a accompli un boulot colossal
et rigoureux. La reconstitution
d’époque est impeccable, la
direction artistique irréprochable.
Soignées et tout à fait crédibles,
les scènes de spectacles valent
à elles seules le détour. Même s’il n’est pas parvenu à
éviter certains pièges propres au
genre (réalisation convenue et
académique, récit linéaire, clichés
du sexe, drogue et
rock’n’roll), DesRochers a su relever
le défi haut la main. Poignant et touchant, son
Gerry est un hommage senti à
l’homme et son oeuvre. Et un succès
assuré au box-office.
Source: QMI