La famille de l’ancien boxeur
originaire de la Caroline du Sud a confirmé la nouvelle dans un communiqué. Frazier, qui a livré trois mémorables
combats à Ali durant les années 70 _ incluant l’épique « Thrilla in
Manilla » recevait des traitements dans un centre de soins palliatifs
depuis qu’il avait été informé, le mois dernier, de la maladie qui
l’affligeait, selon un ami de la famille. Jusque là, Frazier participait
régulièrement à des séances d’autographes, la plus récente remontant au mois de
septembre à Las Vegas, malgré des difficultés d’élocution provoquées par la
multitude de coups qu’il a reçus au fil de sa carrière.
« Il était tellement gentil avec
tous les gens », de raconter Gene Kilroy, l’un de ses meilleurs amis, qui
était allé le voir à cette occasion. Né le 12 janvier 1944 et surnommé
« Smokin’ Joe », Frazier était petit de taille, ne faisant osciller la
balance qu’à 205 livres. Mais il était doté d’un comportement acharné, et
multipliait les attaques notamment grâce à un dévastateur crochet de la gauche,
qu’il a fréquemment utilisé pour mettre fin rapidement à ses combats. C’est ce crochet de la gauche qui
lui a permis d’envoyer Ali au plancher lors du 15e round du fameux « Combat
du siècle », et ainsi remporter le premier duel entre les deux hommes, en
mars 1971 au mythique Madison Square Garden, à New York.
Dans un bref communiqué, Mohammed
Ali affirme qu’il admirera et respectera Joe Frazier pour toujours. Ali exprime
aussi ses condoléances à la famille et aux proches de son rival. « Vous ne pouvez mentionner Ali
sans parler de Joe Frazier », a fait remarquer Ed Schuyler fils, un ancien
journaliste affecté à la couverture de la boxe pour l’Associated Press.
« IL A BATTU ALI, NE L’OUBLIEZ PAS »
Mais Frazier devait perdre les deux
autres affrontements aux mains d’Ali, dont le spectaculaire « Thrilla in
Manilla », en 1975 à Manille. Et pendant de nombreuses années, il a affiché
de l’amertume face au traitement qu’Ali lui a maintes fois réservé. Mais plus
récemment, il avait confié avoir pardonné son fameux rival. Bien que le « Combat du
Siècle » fasse partie des grands moments de la boxe, Ali et Frazier ont
livré un spectacle encore plus magnifique
lors de leur troisième affrontement, présenté sous une chaleur accablante dans
un aréna de Manille, en 1975.
Virtuellement rendu aveugle par les
coups d’Ali, Frazier tenait néanmoins à se lever et livrer le 15e round,
mais en a été empêché par son entraîneur Eddie Futch. Ce combat a été si
violent que Ali, plus tard, a affirmé qu’il n’avait jamais frôlé la mort de si
près. À un certain moment du combat, Ali
et Frazier ont eu un bref échange verbal. « On m’avait dit que Joe Frazier
était fini », de dire Ali. « Ils ont menti », de
rétorquer Frazier, avant d’atteindre son rival d’un crochet de la gauche. Aussi spectaculaire fut cet
affrontement, il aura laissé des traces. Frazier ne livrera que deux autres
combats, un second contre George Foreman, qu’il perdra par mise hors de combat,
en 1976, et un dernier face à Jumbo Cummings, à l’issue duquel il devra se
contenter d’un verdict nul, en 1981.
« Ils auraient tous deux dû
prendre leur retraite après le combat à Manille », a déclaré Schuyler fils,
en parlant de Frazier et Ali. « Tout le talent qu’ils possédaient, ils
l’ont laissé dans le ring ce soir-là. » Ali était aussi pitoyable avec
Frazier à l’extérieur du ring qu’entre les câbles. Il l’a qualifié de
« gorille » et de « Uncle Tom ». Mais il le respectait comme
boxeur, surtout après que Frazier eut défendu son titre avec une victoire par
décision contre Ali, qui n’avait alors jamais subi la défaite. Le combat était si prestigieux que
Frank Sinatra prenait des photos sur le bord de l’arène. Les deux combattants
ont chacun touché des bourses de 2,5 millions $, une somme inimaginable à
l’époque.
Cette soirée au Madison Square
Garden, il y a 40 ans, est demeurée à jamais gravée dans la mémoire de Frazier.
Quelques mois avant de rendre l’âme, il a abordé ce fameux duel. « Je ne peux me rendre dans un
lieu public sans que l’on en parle », a-t-il confié à l’Associated Press.
« Ce fut le moment le plus merveilleux de ma vie. » Médaillé d’or des Jeux olympiques de
Tokyo, en 1964, Frazier a amorcé sa carrière professionnelle en 1965. Il s’est
rapidement bâti une réputation pour la puissance de ses coups, stoppant ses 11
premiers adversaires avant la limite.
Frazier est devenu champion du monde
des poids lourds en 1970 grâce à une victoire par mise hors de combat au
cinquième round face à son compatriote Jimmy Ellis, au Madison Square Garden. Frazier a défendu ce titre en quatre
occasions, avant de crouler sous les coups d’assommoir de Foreman, qui l’a
expédié six fois au tapis en mois de deux rounds lors d’un combat disputé à
Kingston, en Jamaïque, le 22 janvier 1973. Frazier n’a plus jamais porté la
ceinture du champion du monde et mis fin à sa carrière avec un dossier de 32
victoires, quatre revers et un combat nul.