de ces groupes, le mouvement Impératif français, a même lancé un appel au
boycott des produits Molson afin de démontrer son mécontentement. Selon son
président Jean-Paul Perreault, ce geste serait « la pénalité que (les
partisans pourraient) imposer à Molson pour sa grossière inconduite et sa mise
en échec à l’endroit du Québec ». Le
Canadien de Montréal est la propriété, notamment, des frères Geoff, Andrew et
Justin Molson.
Les deux premiers siègent même au conseil d’administration de
l’important brasseur Molson Coors, Andrew y occupant même le poste de président
du conseil. Impératif
français souhaite que les propriétaires de l’équipe reçoivent le message
rapidement. M. Perreault se demande si les partisans en ont assez de se faire
rire d’eux, ajoutant que « jamais au grand jamais les Maple Leafs de
Toronto, les Flames de Calgary ou les Canucks de Vancouver retiendraient les
services d’un entraîneur unilingue français. »
De
son côté, le président de la Société Saint-Jean-Baptiste, Mario Beaulieu a
durement critiqué l’embauche de l’Ontarien pour tenir les rênes de la seule
équipe la Ligue nationale de hockey basée au Québec. Selon
lui, le poids symbolique de l’équipe pour les francophones est très important,
ce qui rend la nomination de M. Cunneyworth encore plus insultante. Mais
la direction regrettera sa décision, prédit Mario Beaulieu, parce que de
nombreux Québécois se désintéresseront du hockey avec le temps, à mesure que le
sport s’éloignera de leur réalité. Il juge que la décision est
« inacceptable », faisant aussi remarquer « qu’il y a de moins en
moins de joueurs francophones dans l’équipe de Montréal ».
M.
Beaulieu a rappelé qu’au début de son existence, le Canadien était
« l’équipe des francophones ». Selon lui, « en s’éloignant de sa
clientèle francophone et en la délaissant à ce point-là, un moment donné, il va
y avoir moins d’intérêt pour le hockey ». Il
ajoute que la maîtrise du français devrait être une condition de base dans
l’embauche d’un entraîneur d’une équipe de hockey dans la province. L’interrelation
entre la politique de la langue et le sport peut paraître ridicule pour
certaines personnes, il reste que le Canadien de Montréal représente une
institution au Québec dont l’impact s’étend largement au-delà du sport,
soutient un expert.
« C’est
un aspect qui a toujours été rattaché à la vie politique de la province »,
note Nicolas Moreau, membre de la Faculté des sciences sociales à l’Université
d’Ottawa, et co-éditeur d’un nouveau livre sur le Canadien et la société
québécoise. « On le constate de nouveau aujourd’hui. » M.
Moreau a notamment rappelé les émeutes entourant la suspension de Maurice
Richard en 1955, perçues comme un premier exemple du nationalisme québécois
alors que des membres d’une minorité lésée se sont révoltés contre l’oppression
anglophone. Selon
Audrey Laurin-Lamothe, co-éditrice du même livre, le Canadien, à ses débuts,
était associé de très près à la communauté francophone de Montréal, et l’équipe
était composée presque exclusivement de joueurs de langue française.
« C’est
important pour les Québécois, non seulement à titre de passe-temps, mais aussi
parce que ça fait partie de notre identité, et le langage en est un
élément », explique Mme Laurin-Lamothe, qui complète un doctoral à
l’Université du Québec à Montréal. Du
côté politique, seul le ministre de la Santé, Yves Bolduc, s’est risqué à
commenté la nomination de Randy Cunneyworth, tout en demeurant prudent. Se
qualifiant lui-même d’amateur de hockey, le ministre a affirmé que pour sa
part, il aurait favorisé un entraîneur qui maîtrise la langue de Molière. Selon
lui, il est préférable qu’au Québec, il est préférable d’avoir un entraîneur
qui parle français.