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Registre des armes À feu: les conservateurs font la fÊte

Si l’issue
du vote n’a surpris personne e gouvernement de Stephen Harper étant
majoritaire plusieurs ont cependant froncé les sourcils en apprenant qu’une
réception était prévue à cet effet, une célébration que l’opposition et les
groupes de victimes ont jugée de bien mauvais goût. Les
témoins et familles de la tuerie de l’École Polytechnique n’ont en effet pas du
tout le coeur à la fête, accusant le gouvernement Harper de trahir les victimes
d’actes criminels commis par une arme à feu.

Mercredi
matin, trois conservateurs ont tenu une conférence de presse, quelques heures
avant le vote en dernière lecture aux Communes du projet de loi C-19 abolissant
le registre des armes longues. Derrière eux, une image représentait la
silhouette de deux chasseurs de dos dans un champ, fusil à la main. L’un deux,
plus petit que l’autre, semblait être un enfant. C’est à ce
moment que le ministre d’État Maxime Bernier a confirmé officiellement qu’une
fête était bien prévue.

« Des
collègues à moi et certains membres du Parlement ont décidé de se rencontrer
pour souligner l’événement (…). C’est des gens qui ont travaillé depuis
plusieurs années pour l’abolition de ce registre-là », a admis M. Bernier. « Certainement
que si le temps me le permet, je vais aller faire un tour pour les
rencontrer », a-t-il ajouté. Heidi
Rathjen, de Polysesouvient, a qualifié cette fête « d’obscène », car
l’abolition du registre se traduira inévitablement par plus de victimes dans
l’avenir, à son avis. « Je
crois que c’est comme s’ils dansaient sur les tombes des victimes d’armes à
feu, non seulement celles qui ont payé de leur vie pour mettre en lumière les
lacunes de la loi qui existait dans le temps, mais aussi toutes les victimes
futures », a-t-elle déploré en entrevue.

Le
gouvernement du Québec, qui s’oppose au projet de loi, et surtout, à qui l’on
refuse le transfert des données du registre pour qu’il mettre sur pied sa
propre base de données, a jugé la célébration « inappropriée ». « Ils
ont droit à leur opinion, mais je pense que personne n’a à se réjouir de
l’adoption de ce projet de loi », a déclaré le ministre québécois de la Sécurité publique, Robert
Dutil, lors de la période de questions à Québec.

La chef
néo-démocrate Nycole Turmel et le leader libéral Bob Rae ont tous deux déploré
la tenue de la réception, jugeant qu’il s’agissait là d’un manque de
sensibilité flagrant à l’égard des victimes. Évoquant la mémoire des femmes
tuées à Polytechnique et Dawson, la bloquiste Maria Mourani a demandé en
Chambre à ce qu’elle soit annulée, sans succès.

MOMENT DE LA DESTRUCTION

Le projet
de loi prendra maintenant le chemin du Sénat, où il devrait être rapidement
adopté, puisque les conservateurs y sont également majoritaires. Après
qu’il ait obtenu la sanction royale, le gouvernement a l’intention de détruire
« aussi rapidement que possible » les données, malgré les demandes de
Québec de les préserver pour lui. Le
ministre de la Sécurité
publique, Vic Toews, a confié savoir parfaitement combien de temps cela prendra
avant que les données soient détruites, mais il a refusé de partager cette
information.

« Tout
ce que je peux dire, c’est que nous nous sommes engagés à nous débarrasser du
registre et cela inclut de disposer des données. C’est tout ce que je peux
dire », a-t-il conclu. Si Québec
veut obtenir une injonction afin de suspendre la destruction des données, il
devra donc faire très vite. La province assure de toute façon qu’elle a
l’intention de s’adresser aux tribunaux dès que C-19 aura reçu la sanction
royale. La
néo-démocrate Françoise Boivin a dit croire que le ministre Toews veut garder
secrètes ses cartes en raison du bras de fer qui s’annonce avec la Belle Province.

« Il
ne veut pas nécessairement dévoiler son jeu parce qu’il va peut-être y avoir un
petit jeu juridique qui va s’installer entre le Québec et le fédéral. Alors, ça
va être certainement à suivre », a soutenu Mme Boivin.

BRIS DE LIGNE DE PARTI

Même si
Nycole Turmel avait averti ses députés qu’il y aurait des conséquences pour
ceux qui briseraient la ligne de parti lors du vote, deux députés
néo-démocrates ont sorti des rangs afin de voter avec le gouvernement
conservateur. Les Ontariens
John Rafferty et Bruce Hyer se sont levés avec les conservateurs pour voter en
faveur de la destruction du registre, comme ils l’avaient d’ailleurs fait lors
du vote en deuxième lecture. Les
conséquences qui ont suivi le bris de la ligne de parti en deuxième lecture
seront donc prolongées. Ainsi, ces deux députés ne pourront pas poser de
question en Chambre, obtenir un poste de porte-parole, siéger sur un comité ou
encore faire de voyages. La durée de ces punitions n’est pas déterminée.