Non seulement le baseball majeur vient de perdre un de ses grands ambassadeurs
mais c’est aussi une page de l’histoire des Expos qui disparaît avec lui. Il a
été le meilleur joueur et aussi le plus populaire de la concession. Il a été le
premier à être intronisé au Temple de la renommée avec la casquette des Expos —
l’autre étant Andre Dawson en 2010 — et il était le catalyseur de l’équipe
quand tout le monde parlaient des Expos au début des années 1980.
Carter, que l’on surnommait «The Kid», a évolué pendant 19 saisons dans les
ligues majeures — 12 avec les Expos. Choisi à 11 reprises au sein de l’équipe
d’étoiles, il a conservé une moyenne de ,262, claqué 324 circuits et produit
1225 points. Il a été proclamé le joueur par excellence des Expos à quatre reprises — 1975,
1977, 1980, 1984 — et il a contribué à la conquête de la Série mondiale par les Mets
de New York en 1986. Toujours disponible pour les médias, étant souvent le dernier après les
matchs à monter dans l’autobus de l’équipe parce qu’il était occupé à signer
des autographes, Carter était le champion des relations publiques en plus
d’être un des meilleurs joueurs de son époque.
Carter adorait son métier, c’était évident. Son enthousiasme déteignait sur les
partisans des Expos et même si ses coéquipiers estimaient qu’il faisait un peu
trop sa propre promotion, tous reconnaissaient son grand talent, sa fougue et
surtout, sa capacité d’élever son jeu quand l’enjeu était important. Le numéro 8 des Expos était à son mieux quand les projecteurs étaient braqués
sur lui. Il a été choisi le joueur par excellence du match des étoiles à deux
reprises, claquant deux circuits lors de la rencontre de 1981 au retour de la
grève qui avait paralysé le baseball majeur au milieu de la saison. Il a également
réussi un circuit lors de la rencontre des étoiles de 1984 pour procurer la
victoire à l’équipe de la Ligue
nationale.
Au début des années 1980, les Expos formaient l’équipe la plus talentueuse des
ligues majeures avec Carter, Andre Dawson, Tim Raines, Steve Rogers, Bill
Gullickson, Scott Sanderson, Jeff Reardon, notamment. Mais ils ont été éliminés
par les Dodgers de Los Angeles lors de la Série de championnat de la Ligue nationale en 1981 — la
seule participation des Expos aux séries d’après-saison. C’est finalement avec les Mets de New York en 1986 que Carter remportera la Série mondiale, deux ans
après avoir échangé en retour de quatre joueurs — Hubie Brooks, Mike
Fitzgerald, Floyd Youmans, Herm Winningham.
Même s’il commençait à ressentir le poids des années, Carter, alors âgé de 32
ans, a été un des éléments clés dans la conquête des Mets, qui avaient remporté
108 victoires en saison régulière. Il a produit neuf points lors de la Série mondiale contre les
Red Sox de Boston, claquant deux circuits dans le quatrième match par-dessus le
«Green Monster», la clôture du champ gauche au Fenway Park. À son premier match avec les Mets, Carter avait d’ailleurs donné un avant-goût
de ce qu’il réservait aux partisans de l’équipe en donnant la victoire aux Mets
lors du match d’ouverture de 1985 grâce à un circuit en 10e manche.
Frappeur droitier redoutable, Carter a réussi 11 grands chelems au cours de sa
carrière et il a connu un match de sept points produits à sa deuxième saison
avec les Mets. Il a aussi signé deux matchs de trois circuits et réussi cinq
coups sûrs dans un match à deux reprises. Mais Carter était plus qu’un excellent frappeur. Il excellait aussi en
défensive. Il a remporté le Gant d’or à trois reprises. Il avait un bras
puissant et il était tellement agile derrière le marbre que Keith Hernandez, le
joueur de premier but des Mets, l’avait qualifié de «grillage humain».
Carter a évolué avec les Expos de 1974 à 1984 et avec les Mets de 1985 à 1989.
Il a poursuivi sa carrière en Californie avec les Giants de San Francisco et
les Dodgers de Los Angeles avant de revenir au bercail pour une dernière
saison, en 1992. À son dernier match au Stade olympique, le jour où les Expos retiraient son
numéro 8 contre les Cubs de Chicago, il a réussi un double au champ droit
par-dessus la tête de son ancien coéquipier Andre Dawson, le seul autre ancien
joueur des Expos à avoir été admis au Temple de la renommée.
Né le 8 avril 1954 à Culver City en Californie, Carter s’est joint aux Expos en
1972. Quart-arrière dans l’équipe de football de son école secondaire, il avait
été approché par l’Université UCLA avant d’être réclamé par les Expos lors de
la troisième ronde du repêchage. Son surnom «The Kid» lui a été donné au début
de sa carrière par Tim Foli, Ken Singleton et Mike Jorgensen, impressionnés par
l’ardeur au jeu du jeune joueur au camp des Expos en 1974.
Carter évoluait à l’arrêt-court quand il a signé avec les Expos et il a été
converti en receveur dans les rangs professionnels. Il a frappé son premier
circuit dans les ligues majeures en septembre 1974 contre le gaucher Steve
Carlton. À ses premières années avec les Expos, il évoluait aussi au champ
droit, partageant le travail derrière le marbre avec Barry Foote, puis il est
devenu le receveur attitré de l’équipe au milieu de la saison 1976. Il a connu
sa meilleure campagne avec les Expos en 1984, conservant alors une moyenne de
.294 en 159 matchs et produisant 106 points.
N’ayant jamais oublié ses racines, Carter gardait un excellent souvenir de son
séjour à Montréal. Lors de son discours d’intronisation à Cooperstown en 2003,
il a prononcé quelques phrases en français, disant que ce fut un grand honneur
et très agréable de jouer à Montréal. Ému, il regrettait alors que son père, décédé quelques mois plus tôt à l’âge de
84 ans, ne soit pas présent tout comme sa mère, morte de leucémie alors qu’il
n’avait que 12 ans. Carter a épousé Sandy Lahm en 1975 et le couple habitait à Palm Beach Gardens,
près de West Palm Beach, où les Expos tenaient leur camp d’entraînement
printanier en Floride. Ils ont eu trois enfants, deux filles, Christy et Kimmy,
et un garçon, D.J.
L’ancien receveur étoile se dévouait souvent pour des causes humanitaire,
organisant entre autres un tournoi de golf annuel au profit de la Société américaine contre
la leucémie. Il a aussi écrit un livre intitulé «A Dream Season», relatant la
conquête de la Série
mondiale par les Mets en 1986.