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Le gouvernement a perdu sa lÉgitimitÉ

La chef
péquiste Pauline Marois a affirmé que les restrictions votées vendredi avec la
loi 78 n’ont eu aucun effet sur la situation. « Cette
loi, on le voit bien, malheureusement, n’a rien réglé et ne réglera rien »,
a-t-elle dit lors de la période des questions, à l’Assemblée nationale. Selon Mme
Marois, qui a réclamé une reprise des négociations avec les associations
étudiantes, le gouvernement a laissé dégénérer le conflit sur la hausse des
droits de scolarité. « La
crise qui secoue le Québec dépasse largement la question des droits de
scolarité, a-t-elle dit.

C’est la légitimité même du gouvernement qui est
remise en cause, soir après soir. » Le chef de
la Coalition
avenir Québec, François Legault, a fait le même constat d’échec de la loi
spéciale, au terme d’un week-end qui s’est soldé par des centaines
d’arrestations à Montréal, lors de manifestations illégales. « Ça
n’a pas réglé le problème, parce que le problème, ce n’est pas la loi spéciale,
ce n’est pas les frais de scolarité, c’est un manque de légitimité de la part
du gouvernement », a-t-il dit lors d’un point de presse.

Selon M.
Legault, le seul moyen de faire baisser la pression et les protestations serait
que le gouvernement s’engage à déclencher des élections après la Fête du travail, pour un
scrutin en octobre. « Est-ce
qu’il va réussir à retrouver la paix sociale dans les prochaines semaines s’il
ne fait rien d’autre? Je pense que, s’il annonçait une date d’élection en
octobre, ça pourrait aider à baisser la pression », a-t-il dit. En
Chambre, le premier ministre Jean Charest a tenté de minimiser les contraintes
imposées avec la loi 78, faisant valoir que d’autres villes exercent aussi un
contrôle sur les manifestations.

Répondant
à l’appel de Mme Marois, M. Charest a rappelé que la négociation est toujours
possible avec les représentants d’associations étudiantes, dont les membres
s’opposent à la hausse des droits de scolarité décidée par le gouvernement. « Le
gouvernement a toujours gardé la porte ouverte, a-t-il dit. Nous souhaitons
avoir l’occasion de discuter avec les représentants des associations
étudiantes, et cette porte restera toujours ouverte. »

Lors d’un
point de presse, la ministre de l’Éducation, Michelle Courchesne, a affirmé
qu’elle était disposée à rencontrer tous les représentants étudiants, incluant
ceux de la Coalition
large de l’association pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE), malgré
l’appel de ses porte-parole à défier la loi 78. « Oui,
nous souhaitons que les discussions se poursuivent. Il peut y avoir une entente
après l’adoption de la loi », a-t-elle dit. Des
dizaines de milliers de personnes ont défilé dans les rues de Montréal, mardi
après-midi, pour signifier leur opposition à la hausse des droits de scolarité
et à la loi spéciale.

Plus tôt,
en marge d’un dîner-conférence de Jacques Rogge, président du Comité
international olympique, M. Charest avait condamné les affrontements de la fin
de semaine à Montréal, les qualifiant de « déplorables ». Le premier
ministre a défendu la légitimité de la loi 78, faisant valoir qu’elle a été
votée par un Parlement légitimement élu. « La
loi, elle est là. La loi, elle est juste », a dit le premier ministre. « La
loi est là autant pour protéger les manifestants, sinon plus, que les autres
citoyens du Québec », a-t-il ajouté.

Juste
avant la période des questions, le ministre de la Sécurité publique, Robert
Dutil, a rencontré la presse, muni d’un tableau exposant les conditions qui
régissent les manifestations dans plusieurs grandes villes d’Europe et
d’Amérique. La loi 78
impose aux organisateurs de manifestations de plus de 50 personnes de donner à
la police leur itinéraire huit heures d’avance en plus d’empêcher les
manifestants de défiler à moins de 50 mètres des institutions d’enseignement. Selon M.
Dutil, en France, les manifestants doivent obtenir un permis 20 jours d’avance,
tandis qu’à New York, une demande de permis doit être faite cinq jours
d’avance.

Alors que la Fédération étudiante
collégiale du Québec (FECQ) veut contester la loi 78 devant les tribunaux, M.
Dutil a pris les devants en soutenant que le texte respecte la Charte canadienne des
droits et libertés. Le ministre
a toutefois donné des munitions à l’opposition en affirmant qu’il avait hâte
que la question soit tranchée. En
Chambre, le député péquiste Bertrand St-Arnaud a pressé le gouvernement de
s’adresser lui-même à la Cour
d’appel pour obtenir un avis sur la légalité de la loi 78. « Vous
en avez le pouvoir, vous pouvez le faire rapidement, et on aurait un jugement
rapidement, a-t-il dit. Agissez! »

Par
ailleurs, le Service de police de la ville de Montréal n’a pas encore eu
recours aux sanctions prévues dans la loi 78. Un
porte-parole du SPVM, Ian Lafrenière, a déclaré que les nombreuses arrestations
de la fin de semaine ont été effectuées en vertu du code criminel. « On
n’a pas appliqué la loi 78 », a-t-il dit lors d’une entrevue téléphonique. Les
policiers montréalais souhaitent trouver un moyen simple qui permettra aux
organisateurs de manifestations de faire connaître leur itinéraire.