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Luka rocco magnotta, personnalitÉ mÉdiatique de l’annÉe 2012?

L’homme de
30 ans a été choisi par 22 pour cent des médias qui ont pris part au sondage. Même si
les horribles crimes qui sont reprochés à Luka Rocco Magnotta ont eu lieu à
Montréal et que sa cavale a fait l’objet d’une intense couverture médiatique au
Québec, aucun média de la province n’a voté pour lui. Luka Rocco
Magnotta a été arrêté à Berlin, en Allemagne, le 4 juin, après avoir été
reconnu par un employé dans un café Internet à l’issue d’une vaste chasse à
l’homme transfrontalière.

Il aurait expédié certaines parties du corps de sa
victime aux partis conservateur et libéral à Ottawa ainsi qu’à deux écoles de
la région de Vancouver, en Colombie-Britannique. L’un des
amis proches de la victime croit que le suspect originaire de Scarborough, en
Ontario, serait fort satisfait de sa sélection à titre de personnalité ayant le
plus marqué l’actualité en 2012. « De
toute évidence, c’était ce qu’il recherchait, n’est-ce pas? », a suggéré
Benjamin, qui s’est entretenu avec La Presse Canadienne
à condition que son nom de famille ne soit pas publié.

« C’était
quelque chose qu’il voulait depuis très longtemps, et il l’a eu. Mais il l’a
obtenu au détriment de la vie de notre ami », s’est-il désolé. Depuis la
création du sondage annuel visant à élire la personnalité médiatique de
l’année, en 1946, très peu d’individus ont hérité du titre en raison des gestes
sordides qu’ils ont posés. Il y a
bien eu, en 2010, Russell Williams, cet ex-colonel des Forces canadiennes
condamné à la prison à vie pour le meurtre de deux femmes. Mais règle générale,
les personnalités sélectionnées par les responsables des salles de rédaction
sont des héros sportifs, des diplomates ou encore des politiciens.

D’après
Romayne Smith Fullerton, professeure associée en journalisme à l’université
Western Ontario, l’affaire Magnotta avait tout pour piquer la curiosité du
public: du sexe, un meurtre, un (présumé) méchant à l’air angélique, une
intrigue, des traces laissées sur Internet et un volet international. Elle a
tenu à prévenir que même si le public a le droit d’être informé sur les crimes
qui sont perpétrés dans leur communauté, les médias se doivent de réaliser
qu’un battage médiatique peut permettre à certains individus d’obtenir ce
qu’ils recherchent: leurs 15 minutes de gloire.

« Ce
genre de notoriété, certaines personnes comme Magnotta pourraient vraiment s’en
régaler », a-t-elle affirmé. Le
rédacteur en chef du Lethbridge Herald, Doyle MacKinnon, a accordé son vote à
celui que l’on a surnommé « le dépeceur de Montréal » ou encore
« Canadian Psycho » par certains médias étrangers. Il se
désole néanmoins que les noms de Luka Rocco Magnotta et de Russell Williams
soient si connus alors que de nombreux Canadiens ignorent qui est Kateri
Tekakwihta, première femme autochtone d’Amérique du Nord à être élevée au rang
de sainte en octobre dernier.

« Sur
le plan de l’actualité, des histoires beaucoup plus significatives ont touché
notre pays. Mais la réalité, c’est que ceux que le public honnit sont
invariablement à l’origine des plus grosses nouvelles », a exposé le
rédacteur en chef de cette publication albertaine. « Le
caractère dépravé des accusations qui pèsent contre Magnotta démontre que la
vérité dépasse vraiment la fiction », a pour sa part commenté Victor
Krasowski. Le chef des nouvelles de la station CJUK/CKTG à Thunder Bay, en
Ontario, a également sélectionné le présumé meurtrier comme personnalité
médiatique de l’année.

Luka Rocco
Magnotta est actuellement en détention dans un pénitencier de Montréal. Il
demeurera détenu jusqu’à la tenue d’une conférence préparatoire le 9 janvier 2013. L’enquête
préliminaire suivra en mars prochain. L’accusé, qui a plaidé non coupable aux
cinq chefs d’accusation qui pèsent contre lui _ dont meurtre prémédité, outrage
à un cadavre, corruption de moeurs et diffusion de matériel obscène _ a choisi
de subir son procès devant juge et jury.

AUTRES FINALISTES

AMANDA TODD

L’adolescente
britanno-colombienne Amanda Todd, qui s’est enlevée la vie après avoir publié
en ligne une vidéo où elle dénonce l’intimidation qu’elle a subie, est arrivée
en seconde position avec 18 pour cent des votes.

GARY BETTMAN

Le conflit
qui fait rage dans la Ligue
nationale de hockey a également retenu l’attention des médias canadiens. Ils
ont été 15 pour cent à voter pour le duo formé par le commissaire de la Ligue nationale de hockey,
Gary Bettman, et le directeur de l’Association des joueurs, Donald Fehr.

JUSTIN TRUDEAU

Le
candidat à la direction du Parti libéral du Canada Justin Trudeau suit le duo
de près. Avec huit pour cent des votes le député de Papineau est arrivé ex
aequo avec le collectif « manifestant étudiant québécois ».

MAGNOTTA PERSONNALITÉ MÉDIATIQUE:  » DÉGOUTANT  » DIT BOB RAE

La sélection du présumé meurtrier Luka Rocco Magnotta à titre de personne ayant
le plus marqué l’actualité en 2012
a suscité colère et indignation sur les réseaux sociaux
et les sites Internet du pays. L’ancien
danseur nu, qui est accusé d’avoir assassiné et démembré l’étudiant chinois Jun
Lin, a été choisi par 22 pour cent des médias qui ont pris part au sondage de La Presse Canadienne,
une enquête qui est effectuée à chaque année dans les salles de nouvelles aux
quatre coins du Canada.

Le chef
intérimaire du Parti libéral du Canada, Bob Rae, est l’un des premiers à avoir
exprimé sa colère et sa déception, dimanche matin. Il s’est tourné vers le
réseau social Twitter et a publié sur son fil, qui compte plus de 33 000
abonnés, que cette sélection était « véritablement dégoûtante ». Après
avoir échangé avec l’un de ses abonnés, M. Rae a ajouté que La Presse Canadienne
avait eu recours à un « sensationnalisme de bas étage » et que « de
nombreuses personnes avaient eu plus d’impact et généré plus de couverture
médiatique ».

Même si
les horribles crimes qui sont reprochés à Luka Rocco Magnotta ont eu lieu à
Montréal et que sa cavale a fait l’objet d’une intense couverture médiatique au
Québec, aucun média de la province n’a voté pour lui. Sa
sélection a cependant été décriée par de nombreux Québécois sur les réseaux
sociaux ainsi que sur les sites internet qui ont publié l’article. « Je
trouve cette ‘nomination’ inadmissible, éhontée et épouvantable. Peut-on au
moins avoir la décence d’éviter de donner autant de ‘gloire’ à un personnage
aussi sordide, et montrer ainsi un minimum de respect pour sa victime? », a
écrit une internaute sur le site web de Radio-Canada.

Une
pétition en ligne a également été initiée en réaction à la sélection de Luka
Rocco Magnotta. Son instigateur, Andrew Schiestel, demande à La Presse Canadienne
de lui retirer son titre. En fin de journée, dimanche, moins de 100 internautes
l’avaient signée. Le
rédacteur en chef de La
Presse Canadienne, Scott White, a tenu à préciser que le
titre de personne ayant le plus marqué l’actualité (« Newsmaker of the
Year ») n’était « pas un concours de popularité ».

M. White a
précisé que ce sont « les journalistes du Canada _ ceux qui choisissent ce
qui se retrouve à la une et qui élaborent les bulletins de nouvelles _ (qui)
déterminent quel Canadien a eu le plus d’impact dans l’actualité pendant l’année »,
ajoutant que « les nouvelles (…) sont parfois déplaisantes et laides (et)
ce choix reflète cet état de faits ». Depuis la
création du sondage annuel visant à élire la personnalité médiatique de
l’année, en 1946, très peu d’individus ont hérité du titre en raison des gestes
sordides qu’ils ont posés.

Il y a
bien eu, en 2010, Russell Williams, cet ex-colonel des Forces canadiennes
condamné à la prison à vie pour le meurtre de deux femmes. Mais règle générale,
les personnalités sélectionnées par les responsables des salles de rédaction
sont des héros sportifs, des diplomates ou encore des politiciens.