Le sujet de l’amour est inévitablement accompagné de son
ombre, sa dualité, sa face cachée, soit cette invitée aux destinées différentes
qui s’appuie sur le passé personnel de chacun, le manque d’amour. Être propulsé
par l’amour sous-entend aussi la possibilité d’être pulvérisé par son absence.
Tout ce qui monte doit redescendre. Et à l’instar de toute montgolfière qui a
besoin d’air chaud pour prendre son envol et cesser d’être prisonnière du sol,
l’âme humaine carbure aux douceurs, à la tendresse, à l’amour inconditionnel de
sa mère, des gâteries de ses grands-parents et de l’accueil chaleureux de ses
amis.
L’Homme a besoin de « souffles chauds » pour s’élever.
L’humain, tel qu’on le connaît, est capable du meilleur
comme du pire. Au-delà des conditions défectueuses chez certains individus qui
n’ont pas le sens de la réalité, de la notion du bien et du mal, les blessures
d’amour que plusieurs portons en nous ont davantage dissous notre propre
sentiment de valeur et de mérite d’être aimé, causant ainsi une cascade de
comportements et réactions (inconscientes) tous plus maladroits et saboteurs
que les autres. Nos manques d’amour – ou doutes d’avoir été aimé – de la part
d’un parent ou d’une personne aimée sont intimement liés à notre incapacité de
nous aimer correctement, et par conséquent, avoir le réflexe et les habiletés
naturelles pour couvrir d’amour autrui – notre conjoint, membres de la famille,
collègues, voisins, etc. Aimer la vie et aimer sa vie de façon douce, constante, subtile mais puissante, sont
aussi conséquences à notre amour ou manque d’amour.
À titre d’exemple, voici un extrait de ce qu’un ami avait envie
de dire à une prétendante qu’il venait de rencontrer et dont il avait déjà peur
que son intérêt envers lui se dissipe momentanément :
« Au cas où tu
doutes d’une autre étape pour nous deux, j’ai envie que tu apprennes qui je
suis vraiment avant de dire non à notre suite… »
En se relisant, il s’est « entendu se parler » à
lui-même! Il sentait que c’était à lui qu’il
disait d’apprendre à se connaître avant de se dire non. Ouf! Ça frappe de réaliser que ce que l’on craint de
voir s’ériger comme comportement chez l’autre n’est en fait que la
manifestation de nos propres planchers fragiles. Mais surtout de se rendre
compte que le message est d’apprendre à savoir qui nous sommes vraiment avant
de se saboter, de se couper l’herbe sous le pied, de vouloir fuir aussitôt que
ça brasse un peu.
Mais on est humain, non? On a le droit de douter, d’avoir
peur de perdre l’autre, de ne plus être aimé, de ne plus être assez. C’est vrai
que le plaisir c’est près de la douleur. Pas moyen d’être amoureux sans que ça
fasse mal en quelque part un moment donné. Nous sommes ce que nous sommes. Mais
nous le sommes parce que nous avons d’abord cru que nous l’étions. Or pour
changer quoi que ce soit dans sa vie, pour transformer, renouveler, améliorer,
effacer, revitaliser ce que nous sommes, il est impératif de redessiner le
modèle que l’on a créé de soi. Du moins, accueillir et ensuite panser les
blessures qui nous ont modelées jusqu’ici. L’arme de combat numéro un dans le
jeu de l’amour sentimental, du métier, de ses enfants, son père et sa mère est
l’estime de soi. Construit sur les tissages de l’amour, du respect et de
l’admiration mutuels, le radeau en est un de connaissance et d’amour pour soi.
« L’amour est une
décision, un geste volontaire. » – Dr
Scott Peck
Dans son petit chef d’œuvre que j’ai lu quatre fois au cours
de ma vie, Scott Peck nous rappelle que l’amour est un choix. C’est l’amour qui
nous fait faire le taxi pour nos enfants les week-ends, aller chercher son ami
à l’autre bout de la ville en pleine nuit, agir en tant qu’aidant naturel
auprès de son conjoint malade – comme Cloé Ste-Marie l’a fait avec son amoureux
Gilles Carle. Or, l’amour est à ne pas confondre avec les envolées de
phéromones sécrétées dans notre corps lors d’une première rencontre avec Roméo
ou Juliette, Bonnie ou Clyde! Entre autres, une de nos richesses les plus
importantes – surtout à la fin de notre passage ici – sera celle des gens que nous
aurons touché, aimé, soigné, protégé, guidé, élevé, apprécié, validé, reconnu,
respecté, considéré. Et non pas ceux que nous aurons impressionné, dominé,
maté, jugé, méprisé, ridiculisé, dépouillé, humilié, insulté.
« La lumière est
trop douloureuse pour quiconque veut rester dans l’obscurité. » – Eckhart Tollé
Question de pousser la réflexion sur la rencontre amoureuse
un peu plus loin, Eckart Tollé, dans « Le
pouvoir du moment présent » nous rappelle l’essentiel dans le chapitre
huit.
« La raison pour
laquelle la relation amoureuse romantique est une expérience si intense et si
universellement recherchée est la suivante : elle semble libérer les gens
d’un sentiment profondément installé de peur, de besoin, de manque et
d’incomplétude. » Or, comme il dit : « Le véritable salut, c’est la satisfaction, la paix et la vie dans leur
plus grande plénitude. C’est être soi-même. Si, dans vos relations, vous
connaissez aussi bien l’amour que son opposé, c’est-à-dire l’hostilité, la
violence émotionnelle, etc., il est alors fort probable que vous confondiez
amour et attachement de l’ego, amour et dépendance affective. L’amour vrai n’a
pas d’ennemi. Si votre « amour » en a un, c’est que ce n’est pas de
l’amour mais plutôt un grand besoin de l’ego de se sentir plus complètement et
plus profondément soi. ».
L’importance de faire la distinction entre l’amour, l’ego,
nos dépendances, nos blessures et notre réel destin sur cette terre qui
consiste principalement à se connaître en se développant, tout en ayant l’amour
en soi qui rayonne en ce que nous faisons et sur les gens que nous côtoyons,
est la vraie rencontre avec notre divinité. Et ça, c’est pour moi le meilleur
manifeste que je peux vous soumettre aujourd’hui.
M’élever et donner le meilleur de moi-même pendant que les
autres restent au sol, ça ne fait carrément aucun sens. « Souffler
chaud » sur l’autre en dit beaucoup plus sur moi que quoique ce soit
d’autre. La meilleure façon de décoller est d’élever les autres.
Pleins de « souffles chauds » pour vous.