Les manifestants ont défilé avant de se rejoindre un rassemblement massif à la place des Festivals, où s’est tenu un concert auquel ont participé plusieurs chanteurs, dont Paul Piché. L’ensemble des activités a pris peu avant 16 heures, et le Service de police de la ville de Montréal n’a signalé qu’une seule arrestation, pour entrave.
Plusieurs syndicats ont profité de l’occasion pour y souligner, quelques jours avant le 1er mai, la Journée internationale des travailleurs. Pour les syndicats, cette réforme constitue une attaque sans précédent contre les travailleurs, en imposant des conditions exagérées pour accéder à l’assurance-emploi. La présidente de la CSQ, Louise Chabot, a affirmé que cette réforme attaque les travailleurs les plus précaires de notre société, plus particulièrement les femmes. Elle y est même allée d’un slogan au micro: « Stephen Harper stoppe ton bulldozer. »
Les protestataires trouvent également « scandaleux » que le gouvernement fédéral impose sa vision sans aucune consultation alors qu’il ne met plus d’argent dans la caisse d’assurance-emploi depuis 1990. Le président de la Fédération québécoise des municipalités (FQM), Bernard Généreux, s’est adressé aux journalistes devant le Complexe Guy-Favreau. Il a exhorté le gouvernement Harper à faire preuve de souplesse et de respecter le caractère particulier des économies locales et régionales, souvent basées sur la « saisonnalité ».
Ce mouvement de contestation contre la réforme est concentré au Québec et dans les Maritimes, où se trouvent plusieurs emplois saisonniers. Les militants opposés à cette réforme redoutent les impacts à long terme de ces changements sur les régions et la vie familiale de plusieurs travailleurs. Pierre Céré, porte-parole du Conseil national des chômeurs, a affirmé dans son discours aux médias que 40 pour cent des travailleurs saisonniers qui demandaient de l’assurance-emploi se trouvaient au Québec. Pour lui, le gouvernement Harper avait fait « une déclaration de guerre aux travailleurs et aux travailleuses saisonnières ».
Sylvie Turcotte, âgée de 58 ans et venue du Lac-Saint-Jean pour manifester, est une de ces travailleuses saisonnières. Elle a raconté que son emploi, dans une usine de congélation qui traite notamment des bleuets, dépendait de la récolte. Elle et ses collègues sont au chômage pendant la saison creuse, qui peut durer de deux à six mois, selon le succès de la récolte, a-t-elle indiqué. « De nous trouver un travail ailleurs, ça va être dur en région, ça va être soit un peu plus loin, un peu moins cher (payé). Et tout dépendant de l’âge, à 58 ans, 60 ans, c’est assez difficile se trouver un travail », a-t-elle confié, ajoutant que plusieurs de ses collègues étaient inquiets. « Il faut grouiller, il faut sensibiliser les gens (…) Espérons que le gouvernement va abolir » la réforme, a-t-elle résumé.
Hans Marotte, du Mouvement Action Chômage de Montréal, a souligné que ce n’était pas que les travailleurs saisonniers des régions qui étaient touchés par les réformes, mais aussi les gens des grands centres qui ont des emplois atypiques qu’ils ne peuvent occuper toute l’année. Il a illustré que son groupe d’aide avait déjà reçu des demandes d’aides de travailleurs affectés par les réformes. La manifestation s’est déroulée dans une ambiance pacifique et joyeuse, les services de sécurité des syndicats étant beaucoup visibles que la police.
Plusieurs manifestants portaient des ballons, des drapeaux et des affiches aux couleurs de différentes centrales syndicales, de même que les pancartes arborant le visage du premier ministre Harper sur lesquelles on pouvait lire « Chez nous, c’est NON au saccage de l’assurance-emploi. » De nombreux enfants étaient dans la foule, qui marchait au bruit de trompettes, de sifflets, de clochettes et de la musique. Un groupe de percussionnistes a également déambulé avec le cortège le long de la rue Saint-Catherine.
Âgée de 51 ans, Sylvie Vaillancourt, de Montréal, a confié qu’elle en était à sa première manifestation. C’est son opposition à la réforme de l’assurance-emploi, mais aussi aux coupes dans l’aide-sociale québécoise, et son raz-de-bol en général de la classe politique, qui l’ont fait descendre dans la rue. « On tape toujours sur les plus petits, c’est tellement facile (…) Je suis pour le fait que les gens soient protégés. Ce n’est pas en coupant les gens qui ont peu de moyens que l’on va limiter les abus », a-t-elle scandé.
La manifestation de samedi était organisée par la Coalition québécoise contre la réforme de l’assurance-emploi, un groupe composé de nombreuses associations et de syndicats.