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Pas de faveurs aux entreprises frauduleuses

Le président du Conseil du trésor, Stéphane Bédard, a précisé vendredi, en exposant les conséquences de ce refus d’autorisation, que ces entreprises ne pourront plus obtenir quelque contrat public que ce soit aussi longtemps qu’elles n’auront pas fait la preuve de leur réhabilitation. Cet interdit touche tous les contrats émanant d’un ministère, d’un organisme public, d’une société d’État ou d’une municipalité, et ce, quel qu’en soit le montant.

« Notre objectif c’est de corriger le passé, mais éviter par quelque stratagème que ce soit que ce que l’on a vécu dans les dernières années puisse se reproduire au Québec. La Loi 1, ça demande un changement de culture », a déclaré le ministre lors d’un point de presse à Montréal. M. Bédard a cependant précisé que l’interdiction de cinq ans, comme celle imposée la veille à la firme de génie Dessau, peut être renversée beaucoup plus tôt si l’entreprise en fait la demande après avoir mis en oeuvre une véritable réhabilitation de ses pratiques. Il n’y aurait donc aucune raison, selon lui, de procéder à des mises à pied intempestives si la firme se plie aux exigences de l’AMF.

« Ce n’est pas cinq ans, a-t-il expliqué. Si l’entreprise ne fait pas de demande, ce sera cinq ans; si elle fait à nouveau une demande (de réhabilitation), elle sera jugée à la lumière des efforts qu’elle a faits en termes d’habilitation, du nettoyage interne, de tasser les mauvais dirigeants, les actionnaires, des administrateurs ou les principaux dirigeants. Tout ça va être regardé dans cette lorgnette-là. »

Quant aux firmes qui oeuvrent sur des contrats déjà en cours mais qui se retrouveraient sur le Registre des entreprises non admissibles aux contrats publics (RENA), celles-ci pourront obtenir la permission de compléter le contrat en se soumettant, à leurs frais, à des mesures strictes de surveillance et d’accompagnement. Pour accorder cette permission, Québec tiendra compte, entre autres, de l’intérêt public quant à la continuité des travaux, des efforts de réhabilitation démontrés, de l’infraction reprochée et du respect des lois.

Le ministre Bédard a assuré que Québec soutiendra les efforts de réhabilitation de toute entreprise qui se retrouvera sur le RENA, tout en avertissant du même souffle que des efforts cosmétiques seront insuffisants et qu’aucune entreprise ne pourra s’en tirer simplement en payant une compensation financière. « Ceux qui pensaient que strictement écarter un ou deux dirigeants serait suffisant ont tort. C’est un message clair qu’on envoie: faites le ménage, faites-le bien. Faites-le pour aujourd’hui, mais faites-le aussi pour l’avenir », a-t-il lancé.

Parmi les mesures de réhabilitation qui seront exigées, on note: l’exclusion d’administrateurs et de dirigeants fautifs, la cessation de pratiques d’affaires frauduleuses, un règlement avec l’impôt pour le paiement de sommes manquantes et l’implantation de mesures de contrôle.

L’AMF, avec le soutien de l’Unité permanente anticorruption (UPAC), doit procéder à une vérification complète des firmes qui soumissionnent sur des contrats publics. La première phase de l’opération consiste à analyser les dossiers de toute entreprise qui soumissionne ou qui oeuvre sur des projets de plus de 40 millions $. Celles qui ne répondent pas aux critères, comme ce fut le cas de Dessau et de Verreault construction, qui lui est associée depuis 2008, se font inscrire au RENA jusqu’à ce qu’elles rencontrent les normes de l’AMF.

Dessau pourra présenter une nouvelle demande afin de redevenir admissible à des contrats publics dans 90 jours. Bien qu’il n’ait pas voulu donner de détails, Stéphane Bédard a laissé entendre que Dessau ne s’était pas mis en mode réhabilitation assez rapidement et que ses efforts n’étaient guère à la hauteur des attentes qui seront désormais placées dans les entreprises en matière d’intégrité.

La prochaine étape, probablement à l’automne, sera de vérifier les entreprises impliquées dans des projets entre 10 millions $ et 40 millions $ et ainsi de suite en diminuant progressivement jusqu’à ce que l’ensemble des entreprises faisant affaire avec l’État aient montré patte blanche.