qu’il revient uniquement à nos peuples de décider de leur destinée commune », précise le Chef Picard.
En vertu des droits ancestraux et issus de traités, de notre statut de Nations et des lois internationales applicables, les partis politiques doivent être conscients qu’il est inutile de parler de référendum, de souveraineté et d’indépendance alors que l’incertitude sur la place des Autochtones et de leurs droits demeure entière. « Et, soyons encore plus clairs : le Québec peut décider ce qu’il veut sur le plan de sa culture, de son identité et de son développement, mais il ne peut pas prétendre à une souveraineté sur un territoire qui est encore, foncièrement, Première Nation », poursuit le Chef Picard.
Si, comme le suggèrent certains, le Québec devait se mobiliser et préparer la voie vers un autre référendum, les Premières Nations se donneront tous les moyens appropriés pour la protection des intérêts de leurs membres. « Les arrangements que nous recherchons avec les gouvernements qui se succèdent au Québec, visant à assurer notre place dans le développement du Québec, ne donne à personne le pouvoir de prendre des décisions à notre place. Nous possédons le droit à l’autodétermination et ce droit n’est pas négociable », conclut le Chef de l’APNQL.
À ROPOS DE L’APNQL
L’Assemblée des Premières Nations du Québec et Labrador est l’organisation politique regroupant 43 chefs des Premières Nations du Québec et Labrador. www.apnql-afnql.com
ÉLECTIONS : LE DÉBAT SUR LA SOUVERAINETÉ
NE PEUT PAS EXCLURE LES PREMIERES NATIONS
Ghislain Picard est innu, de la communauté de Pessamit et chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et Labrador.
Comme il fallait s’y attendre, la campagne a ramené sur la place publique le débat sur l’indépendance du Québec. On ne peut rien enlever à ceux qui militent pour cette option, mais il importe de rappeler qu’on oublie trop vite une réalité fondamentale qui est celle des Premières Nations et de leurs droits et titre sur l’ensemble du territoire au Québec. Il est aussi utile de revenir sur nos positions traditionnelles à l’effet que toute démarche vers un Québec indépendant sera confrontée à l’affirmation de ces droits par les Premières Nations. Nos opinions demeurent claires. L’argument que le Québec a tous les attributs pour devenir un pays ne lui est pas unique. Les Premières Nations ont leurs cultures, leurs langues, leur histoire et le territoire. Un territoire qui est encore, faut-il le rappeler, grevé d’un titre qui n’a pas encore fait l’objet d’un traité visant une paix durable. Ce débat, qui risque de suivre la campagne jusqu’à sa conclusion, soulève, par défaut, la place trop souvent négligée de nos enjeux.
Lorsque les Québécois ont été appelés aux urnes la dernière fois, nous avions défié les partis politiques de prendre position sur l’incontournable réalité des peuples autochtones dans le contexte québécois, particulièrement quant aux obligations de l’État québécois à l’égard des droits des Premières Nations. Le déni qui persiste à l’égard de nos droits pourrait sérieusement compromettre le développement du Québec si les Premières Nations décidaient de mettre fin à l’indifférence politique, d’une élection à une autre.
Mon souci constant à éviter la rupture en tentant plutôt de trouver le bon terrain, le bon moment pour favoriser l’engagement de part et d’autre dans une discussion visant à trouver des formules d’accommodement, risque aussi d’être pris à partie par ces milliers de membres de nos nations qui pourraient bien décider que notre bonne foi a fait son temps et qu’elle contribue uniquement à accumuler les frustrations. Alors que les paroles paraissent toujours sincères, les gestes qui les suivent ne sont malheureusement pas à la hauteur des engagements prononcés le temps d’un discours. Trop de fois, je me suis retrouvé devant des politiciens allochtones qui ont le réflexe de se réfugier derrière la soi-disant complexité du dossier autochtone et l’envergure des enjeux qu’il contient. Il est juste de dire qu’il faut une certaine dose de « bravoure » pour s’engager sur le terrain des ententes avec les Premières Nations. C’était vrai avec certaines nations, ce l’est encore plus avec d’autres nations vivant dans des régions plus fortement peuplées d’électeurs québécois…
Je ne me fais aucune illusion sur notre place dans cette campagne électorale, mais je souhaite malgré tout que le gouvernement qui sera aux commandes le 7 avril 2014 aura le courage politique, trop souvent absent, de jeter les bases d’une paix durable avec nos peuples. Si ce nouveau gouvernement veut initier un mouvement vers l’indépendance du Québec, il devra nécessairement affronter l’enjeu des droits territoriaux des Premiers peuples de ce territoire. Vouloir ignorer cet enjeu, ce serait s’assurer des lendemains bien compliqués…