RH – La Maison Laroche a été fondée en 1850, elle est intimement liée au Chablis. À cette époque il n’y avait ni délimitation officielle ni de classification des crus. Comment Laroche a réalisé son évolution jusqu’à aujourd’hui?
THIERRY BELLICAUD – Le domaine a en effet été fondé en 1850, mais c’est entre les années 1970 et 1980 qu’il s’est développé, alors que le vignoble connaissait également un essor fulgurant. Pour vous illustrer ce développement, notre superficie en propriété est passée de 6 à plus de 90 hectares en seulement 10 ans!
Les racines du domaine sont profondes, car l’Obédiencerie de Chablis est depuis le Moyen Age un haut lieu du vin. Les chanoines de Saint-Martin de Tours, qui étaient les propriétaires de l’Obédiencerie depuis le IXème siècle, étaient vignerons. C’est un héritage considérable, et un patrimoine bien vivant puisque nous continuons à vinifier et à élever nos premiers et grands crus dans ces caves historiques.
Thierry Bellicaud, directeur général
RH – Combien de domaines forment la Maison Laroche, et à Chablis quelle est l’extension de vos vignobles?
THIERRY BELLICAUD – La Maison Laroche détient deux domaines : le Domaine Laroche à Chablis (90 ha) et le Mas La Chevalière dans le Languedoc (40 ha).
RH – Vous dirigez Laroche depuis 2010. Quelle est votre préoccupation majeure?
THIERRY BELLICAUD – Prolonger les succès de la maison!
Par exemple, Laroche a une longue histoire en restauration, pas seulement en France, mais dans le monde entier. Nos vins sont appréciés pour leur finesse et leur caractère, ce sont des points importants pour un sommelier ou un restaurateur. Nous avons aussi, et j’en suis fier, la confiance de nos clients en retail; c’est important, car le nom de Laroche est gage de qualité, c’est un signe de reconnaissance fort. Mon prochain challenge est aussi de consolider cet atout.
RH – Comment se fait la gestion des domaines de Laroche?
THIERRY BELLICAUD – Laroche, c’est d’abord des hommes et des femmes qui travaillent avec moi depuis plusieurs années maintenant. Grégory Viennois est le directeur technique qui encadre le travail dans les vignobles et dans les chais, avec des équipes dédiées à Chablis et dans le Languedoc. Je peux par exemple vous citer Géraud Blanc, responsable du vignoble du Mas La Chevalière depuis plus de 5 ans.
RH – Parlez-nous de vos terroirs à Chablis de la qualité de vos sols et des climats.
THIERRY BELLICAUD – L’appellation est très diverse. Chaque climat, chaque sous-climat a sa propre personnalité. C’est là que se concentre tout notre travail : comment révéler ces personnalités dans le verre de la manière la plus précise qu’il soit. Prenons par exemple le premier cru Les Vaudevey, un climat frais, ensoleillé le matin mais à l’ombre en deuxième partie de journée. Les raisins mûrissent lentement. Ce vin est souvent le premier cru à la minéralité la plus ciselée de la gamme. A l’inverse, Vaillons est solaire naturellement généreux et donne des vins plus épicés.
Cela nous impose une grande flexibilité, notamment dans le choix des dates de vendange, de vinification ou de dosage du bois.
RH – On sait que dans le vignoble, votre but est toujours d’optimiser la qualité des raisins. Pour cela quel type d’agriculture pratiquez-vous?
THIERRY BELLICAUD – Nous travaillons selon les principes de l’agrobiologie. Prendre soin de nos sols, de nos vignes et de leur environnement, tout en travaillant la pérennité sociale et économique. Ce sont des valeurs fortes, ancrées dans l’ADN de la Maison et dans notre gestion.
RH – Quelle est votre philosophie du travail dans les chais?
THIERRY BELLICAUD –Grégory Viennois porte une attention particulière à l’identité du terroir et même de chaque parcelle. Nous avons investi dans de petites cuves et pressoir pour maîtriser encore plus le profil de nos vins lors des assemblages. En outre, nous travaillons à une limitation stricte des intrants, notamment du soufre.
Grégory Viennois, directeur vigne et vin
RH – Certaines maisons ont abandonné le bois et ne vinifient qu’en inox. Pour Laroche, le bois reste important. Qu’est-ce que vous réussissez à faire avec lui?
THIERRY BELLICAUD – Important mais cadré. Nous ne pouvons pas dire que le bois caractérise le style de nos vins. Par exemple, nous utilisons très peu de bois neuf et nous utilisons différents formats (barriques, demi-muids, foudres), de manière à maîtriser l’apport du bois. Ce qui caractérise nos vins n’est pas la marque plus ou moins forte du boisé, mais l’intensité de la structure minérale.
RH – Ce qui est fascinant chez Laroche ce sont les assemblages qui sont une sorte de symphonie très complexe d’une science très avancée, d’une précision microscopique et de l’intuition.
THIERRY BELLICAUD – C’est un très grand compliment, merci. Je pense que c’est surtout le reflet du travail de sélection parcellaire mais aussi de la précision des vinifications; disposer d’un éventail de petites cuves nous aide beaucoup. Au moment de l’assemblage, cela nous donne une plus grande liberté. Le meilleur témoignage pour moi est la Réserve de l’Obédience, qui est réalisée à l’aveugle à partir de toutes nos parcelles de Blanchots.
RH – Il y a un style des vins de Laroche. Vous avez des Cuvées emblématiques, des vins du Domaine Laroche, des vins du Mas la Chevalière et des vins du Nouveau Monde. Pouvez-vous nous donner un aperçu de ce que c’est le style Laroche dans chacune de ces catégories?
THIERRY BELLICAUD – Vous avez raison de parler de catégories, car rien ne nous déplairait plus que de produire des vins standardisés. Chacun de nos vins a un visage et une personnalité propres. Le seul fil conducteur, c’est la fraîcheur. A Chablis, nous recherchons la minéralité, car elle est typique du terroir, de son sol et de son climat. Au Mas, c’est l’adéquation du cépage et du terroir. Tous les vins ont l’accent méditerranéen par nature, mais nous recherchons l’équilibre. Et dans le nouveau monde, nous privilégions quand c’est possible les cépages autochtones pour rester fidèle à ce qui rend les vins particuliers.
RH – Comment Laroche a fait son intégration à ADVNI? Est-ce qu’ADVNI c’est plus qu’une force de vente et d’exportation?
THIERRY BELLICAUD –Laroche dispose d’une équipe dédiée mais nous pouvons nous appuyer sur les nombreuses forces d’Advini. C’est une chance.
RH – Depuis quand Laroche est sur le marché québécois? Quels sont les vins disponibles actuellement sur ce marché? Qu’est-ce que le Québec représente dans vos exportations?
THIERRY BELLICAUD – Nous avons parfois l’impression que Laroche et le Québec, c’est une histoire de toujours. Je peux vous dire en tout cas que ça se chiffre en dizaines d’années. Nous portons une attention toute particulière à ce marché majeur qui fait partie de notre top 10 et les québécois nous le rendent bien! Parmi nos vins présents, nous avons dans les magasins SAQ le Chardonnay et le Pinot Noir de la Chevalière, les 3 Grappes rouges et blanches, le Petit-Chablis et le Chablis St Martin du Domaine. Vous pourrez également déguster nos premiers et grands crus chez les licenciés.
RH – Merci de m’avoir accordé cette entrevue, Thierry Bellicaud.
THIERRY BELLICAUD – Merci à vous, ce fût un plaisir d’y répondre!
J’ai dégusté quatre vins en commençant par le Domaine Laroche, Chablis Premier Cru les Montmains 2010, 100% Chardonnay, 12° d’alcool.
Le vignoble se trouve sur la rive gauche du Serein. Sol argileux sur socle calcaire. 2010 est un millésime qui a donné un raisin sain, riche et équilibré.
Les grappes entières ont été pressées dans un pressoir pneumatique. Le moût a reposé à température contrôlée pendant 12 heures dans des larges cuves pour accélérer la sédimentation. La fermentation a été faite en cuve inox pendant 3 semaines, toujours à température contrôlée. L’élevage a duré 9 mois sur lies fines en cuves inox, sauf pour 12% du vin qui est élevé en fûts de chêne français. La filtration a été minimale pour conserver le caractère du vin intact.
Magnifique robe jaune intense avec encore des reflets verts. Nez intense et d’une incroyable diversité où on perçoit d’abord le parfum des fleurs blanches, ensuite des nuances d’agrumes blancs : pamplemousse, et citron, des fruits frais : pêche blanche et poire, des fruits secs : noisette, amande grillée, et biscuit et une minéralité très marquée. Bouche puissante, avec une grande fraicheur, mais très harmonieuse et d’une très grande élégance qui se termine dans une longue finale délicieusement gourmande.
Ce vin solaire avec du caractère peut se déguster tout seul, à petites gorgées, raisonnées. Dans ce cas je suggère de le servir à 8° C. Il peut aussi accompagner avec bonheur les fruits de mer et au premier abord, le crabe des neiges, le homard québécois, les langues d’oursin, le saumon en croûte de sel, la volaille noble : faisan, pintade, et les fromages de chèvre. Avec le repas il faut le servir à 10° C et on peut le laisser reposer en carafe pendant une heure.
J’ai ensuite dégusté le Domaine Laroche, Saint Martin 2013, AOP Chablis, 100% Chardonnay, 12,5° d’alcool. Issu d’une sélection des meilleurs raisins des parcelles du Kimmeridgien, du domaine. Le millésime 2013 a été exigeant et a demandé tout le soin des vignerons pour donner un bon raisin.
Le raisin a été pressé dans un pressoir pneumatique et le moût recueilli dans des larges cuves pendant 12 heures, à température contrôlée. Fermentation alcoolique pendant 21 jours en cuves inox, toujours à température contrôlée. 8 mois d’élevage sur lies fines en inox. Filtrage minimal pour ne pas altérer le caractère du vin.
Robe jaune doré avec des reflets verts. Arômes de fleur d’acacia et de chèvrefeuille. Un peu de pamplemousse, de poire, de noisette et d’amande grillée. De la fougère et du tilleul également et une minéralité qui exprime le terroir. En bouche ce vin répand une intense fraîcheur. Une belle harmonie entre les arômes de fruits mûrs, de fleurs blanches et son caractère minéral. Une fin de bouche harmonieuse qui invite à un autre verre. Ce vin s’accorde avec les huitres, les écrevisses, le carpaccio de poisson, les pétoncles caramélisées, avec les endives lorsqu’elles sont assaisonnées d’un simple filet d’huile et de sel. Le servir frais, autour de 8 °C.
Le vin que j’ai dégusté ensuite c’est le Laroche Petit Chablis 2014, 100% Chardonnay, 12° d’alcool.
Ce vin est élaboré à partir d’une sélection de raisins des meilleurs terroirs chablisiens des vignerons partenaires qui travaillent en osmose avec les équipes de Laroche. Selon la tradition le raisin est pressé chez le vigneron producteur par grappes entières. Le moût repose pendant 12 heures à température contrôlée. La fermentation alcoolique dure 15 jours et se fait en cuve inox. Elle est suivie de six mois d’élevage sur lies fines, toujours en inox. La maturation est complète, sans surconcentration. Filtration minimale avant la mise en bouteille à basse pression pour ne pas altérer le caractère du vin.
Robe jaune limpide. Nez fruité avec prédominance des fruits secs : amande grillée et noisette mais aussi avec une minéralité marquée. Bouche vive avec une bonne acidité, une touche de pain grillé et une minéralité qui exprime le terroir. Une finale fraiche et vivifiante. Ce vin s’accorde divinement avec les huitres, et en général avec les fruits de mer. Parfait avec les poissons à chair blanche, poilés et finis au four, bon également avec les fromages de chèvre. Il faut le servir entre 8° et 10 °C.
J’ai terminé la dégustation avec La Chevalière Pinot Noir 2013, IGP Pays d’Oc, 12,5° d’alcool. Le raisin de ce vin a été produit dans Nord du Gard, au pied des Cévennes, dans le Limoux.
Le millésime 2013 a été relativement frais et a demandé un temps de maturation plus long au raisin. Il a produit des grains en santé, qui ont donné des vins sans lourdeur. Le moût a fermenté durant 12 jours à température contrôlée en cuve inox avec remontages quotidiens, suivi d’une fermentation malolactique complète et 6 mois d’élevage en cuve inox. Filtration minimale avant l’embouteillage pour ne pas altérer le caractère du vin.
Robe rubis relativement pâle, typique du Pinot Noir. Bouquet de cerises noire et rouge, de griotte, avec un soupçon de pruneau et des notes de sous-bois. Une bouche riche en fruits, avec un bel équilibre entre les tanins souples, l’alcool et l’acidité. Une finale fraiche et gourmande. C’est un vin délicieux pour l’accompagnement de viandes blanches mijotées, parfait avec le poulet, merveilleux aussi avec des champignons farcis ou en sauce, sublime avec un plateau de fromages frais. Le servir à 16 °C.
VOICI LA LISTE DES VINS DE LA ROCHE, DISPONIBLES AU QUÉBEC :
DISPONIBLES À LA SAQ
DISPONIBLES EN IMPORTATION PRIVÉE
Thierry Bellicaud, directeur général
REPRÉSENTÉS AU QUÉBEC PAR SELECT VINS
Hélène Dion, ambassadrice – relations publiques
Cell: 450-223-9307
Julie Pion, ambassadrice – commercialisation (pour toute commande IP ou info produits SAQ)
Tél. : 514-709-8996