vivre dans un monde sans papiers, où les riches et les pauvres n’existent pas,
où les chiens embrassent les chats, où on ne doit pas chercher la beauté et la
vérité. Je veux vivre dans un monde où les cons ne font pas de bruit.» Le monde
qu’Arno chante dans Je veux vivre, poignant blues urbain extrait de son nouvel
album Human Incognito, disponible le 15 janvier prochain est un beau monde,
mais il n’existe pas. « C’est une utopie », avoue le chanteur, auteur et
compositeur. « Mais il faut bien rester positif, hein? Être négatif n’a jamais
aidé à faire avancer les choses. Et moi, je veux avancer… »
Avec
l’expérience et l’inspiration instinctive qu’on lui connaît, le challenge pour
Arno aujourd’hui n’est pas tant d’enregistrer un nouvel album mais bien de ne
pas se répéter. « J’ai déjà fait trente-deux albums studio dans ma vie. Avec
Tjens Couter, TC Matic, The Subrovniks, Charles et les Lulus, Charles and The
White Trash European Blues Connection et sous le nom d’Arno bien sûr… À
chaque fois, je me dis que je ne dois pas faire la même chose que sur mon
disque précédent et c’est de plus en plus difficile. Il m’arrive de passer des
nuits blanches à cause de ça. Mais une fois que j’ai trouvé ce que je veux, ca
va très vite.
Je suis un
impulsif. Pour Human Incognito, j’ai souhaité privilégier une démarche
organique. Il y a beaucoup moins de synthés et de claviers que sur mes albums
précédents. Human Incognito, c’est ma voix, des guitares, une basse et une
batterie… Tu vois un peu le bazar? »
Quatre ans
après une première collaboration sur Future Vintage, Human Incognito a été
enregistré avec John Parish à la fin de l’été 2015 en une petite semaine au
studio ICP à Bruxelles. Alternant blues, ballades de poor lonesome European
cowboy, anglais et français, passé simple, indicatif du présent et futur
proche, Arno choisit de ne pas choisir et, du coup, reste imprévisible. Et
puis, il y a toujours ce sens de la formule qui n’appartient qu’à lui. Seul
Arno est capable de piquer là où il faut sans pour autant jouer au donneur de
leçon.
Alors,
faut-il le croire quand il chante « I’m just an old motherfucker », premier
extrait de l’album, sur fond de guitares rauques ? « Oui, c’est vrai, je suis
un old motherfucker. Il m’arrive aussi de parler comme un vieux motherfucker.
Je trouve ainsi que le rock est devenu beaucoup trop calculé aujourd’hui. Plus
personne n’ose prendre des risques. Ça manque de révolte. A l’image du monde,
le rock est devenu trop conservateur. » Heureusement, il y a encore des albums
70, rue Molière suite 201, Montréal comme Human Incognito pour nous prouver le
contraire.