Construite en 1927 sur un terrain de 5 acres et acquise au coût de 1,05 M$ US, la propriété de 20 000 pieds carrés compte 29 pièces, dont une salle de cinéma, mais aussi une chute d’eau, des courts de tennis, une piscine, un spa gigantesque aménagé à même une grotte, un zoo et un… cimetière d’animaux. Un prix demandé gonflé car selon certains experts immobiliers californiens, la résidence de Holmby Hills, à Los Angeles, ne vaudrait tout au plus que 90 M$ US, si l’on se fie à des comparables vendus dans le secteur.
Il semblerait que l’édifice ait été laissé à l’abandon depuis plusieurs années et que de nombreuses rénovations soient requises. Son décor est resté figé dans les années ’80. Son prix de vente en fait l’inscription la plus chère des États-Unis. Mais pourquoi demander plus du double de la valeur marchande théorique sur laquelle certains experts s’entendent?
HISTOIRE ET ÉMOTION
Comme nous l’avons vu dans une chronique précédente, le vendeur accorde souvent une valeur subjective à sa propriété lorsque vient le temps de fixer son prix de vente. Les moments vécus au cours de la période d’occupation, les émotions qui s’y rattachent et le sentiment d’attachement sont autant de facteurs qui viennent biaiser l’offre. Si le vendeur n’est pas prêt émotionnellement à vendre sa maison, il peut, en quelque sorte, saboter le processus de vente inconsciemment. Il va vouloir bien souvent inscrire sa maison à un prix nettement plus élevé que la valeur du marché. Et au final, la propriété risque de ne pas se vendre, à moins de faire une ou quelques baisses de prix.
Dans le cas qui nous intéresse, l’aura Playboy, l’histoire entourant le Manoir, les nombreuses célébrités qui ont foulé son sol lors des nombreuses fêtes qui y ont été tenues durant les 40 dernières années, tous ces souvenirs joueraient peut-être un rôle-clé dans la fixation du prix de vente. Dans la même foulée, alors que l’entreprise a décidé de rhabiller ses « Playmates » à compter de l’édition de mars prochain (eh oui Messieurs!, si vous ne le saviez pas encore, l’édition qui est présentement en kiosque sera la dernière dans laquelle vous pourrez admirer les filles dans leur plus simple appareil), on pourrait également soupçonner un coup de marketing d’envergure de la part de Hefner, une restructuration d’entreprise ou peut-être même une forme de planification successorale?
Il y a soixante ans, l’idée de Hefner était, avouons-le, quelque peu téméraire, si l’on considère les valeurs morales de l’époque et la place qu’occupait l’Église dans la société. Les temps changent. Alors que plus de 5,6 millions d’exemplaires s’écoulaient mensuellement dans les années 70, on ne parle plus maintenant que de 800 000 revues qui trouvent preneur. 7 fois moins! Mais revenons au Manoir, si vous le voulez bien.
PLUS-VALUE CÉLÉBRITÉ
Selon l’édition du Los Angeles Times du 19 mai 2012, la célébrité aurait généralement peu d’impact sur le prix de vente. Un nom célèbre, associé à une propriété, aura cependant un effet d’attraction indéniable et pourrait même accélérer la vente, sans toutefois faire gonfler le prix vendu. Seules les icônes comme Elizabeth Taylor ou Marilyn Monroe ont réussi l’exploit. En 2011, la propriété de Liz Taylor a été vendue 8M$ US, soit 1115$ le pied carré, en comparaison avec les comparables du secteur vendus 850$ US le pied carré, un écart qui serait attribuable à son statut d’icône. On parle tout de même ici de 31% de plus. Rien à voir avec l’écart de plus de 120% demandé par Hefner. En termes plus simples, le magnat du magazine pour hommes demande plus de 10 000$ US (14 000$ CAD) le pied carré! Mais afin de tirer une conclusion valable sur la plus-value des icônes, il nous faudrait disposer d’un échantillonnage plus vaste de comparatifs.
ACHETEURS POTENTIELS
L’acheteur potentiel devra inévitablement avoir des « atomes crochus » avec toute l’histoire entourant la propriété pour accepter de payer un prix avoisinant le prix demandé. Mais, si la propriété est vendue, il y a fort à parier que le prix de la transaction sera moindre. Une chose est sûre, l’aura Playboy continuera certainement de planer autour de la propriété californienne.
Aux dernières nouvelles, Larry Flynt, propriétaire du magazine pornographique Hustler, aurait manifesté un intérêt pour le Manoir. Toutefois, comme il est un concurrent direct de Playboy, il ne serait évidemment pas intéressé à conserver Hugh Hefner comme locataire, et offrirait un prix nettement inférieur à celui demandé.
Ici, au Québec, on peut identifier sur les doigts d’une main les acheteurs potentiels (milliardaires) qui disposeraient de la capacité financière nécessaire pour acquérir le Manoir. Je n’avancerai pas ici de noms, mais je laisse libre cours à votre imagination. Il serait toutefois étonnant qu’il devienne propriété d’un Québécois. Reste à savoir maintenant si les acheteurs se rueront aux portes. Mais surtout, qui paierait plus du double de la valeur juste parce que c’est le manoir Playboy?
Détentrice
d’un baccalauréat en Criminologie de l’Université de Montréal, Mélissa a
d’abord œuvré dans ce domaine quelques années avant de se joindre au
réseau immobilier. Son professionnalisme, sa détermination, son amour du
détail, sa franchise et son sourire remarquable séduisent à coup sûr.
Passionnée par l’immobilier, Mélissa a développé une excellente
connaissance du marché depuis près de 14 ans.