L’été 2024 m’a permis jusqu’ici de rencontrer mes fidèles lecteurs-lectrices. Je suis reconnaissant envers vous. J’écris pour rendre hommage à la littérature du Québec, mais aussi au Réel au Sacré. Voici mes suggestions (un seul livre français, celui de Christian Bobin) pendant les vacances.
Étienne Beaulieu, « Les rêves du Ookpik » ( Varia 2022, essai).
Ce livre qui rend hommage au territoire est une méditation écologique. Le Québec qui vit dans une sorte d’enfermement. Il explique notre relation toxique avec le territoire. Pour comprendre nos racines, notre rêve du pays, le profond malentendu entre les cultures autochtones et l’Europe. Il cite la grande poétesse : Joséphine Bacon.
Dans le chapitre, « Parmi les épinettes noires », il rend hommage au groupe Harmonium, au roman « Maria Chapdelaine », au Peuple invisible de « Richard Desjardins », à Raoul Duguay, à l’abbé Proulx. Il fait référence à l’ethnocide. C’est un grand livre d’histoire, un beau travail d’écriture. Il dira : « Je marche en écrivant sur la forêt, sur l’art, sur l’autre, sur l’amour ». Quelle est la place du Québécois dans le monde ?
Dominique Fortier, « Les villes de papier » (Alto, 2020 )
Un grand roman. Une réflexion sur une figure mythique des lettres américaines. Emily Dickinson, c’est la poétesse qui n’a jamais publié de son vivant. Comment est-ce possible? Elle rêve de poèmes qu’on lirait dans les astres si enfin on apprenait le langage de leurs obscures constellations (1 ).
Mireille Cliche, « Le règne des incendiaires » (Écrits des Forges 2024).
Il y a une gravité des faits. Tout bouge tellement vite. Le Temps, l’âge, le silence. Notre amie Mireille explore l’intériorité d’une vie :
« Un lointain jour d’été Dieu est mort
Et ne s’est plus manifesté
Je voguais sur ma bicyclette
J’ai continué de tourner
En quelle langue le cosmos me
Parlait-il… »
Germaine Beaulieu, « Murmure à l’inconnu », (Mains Libres 2024). Les questions existentielles, des murmures dans la narration intimiste. Un appel obscur.
« Nimbée de chaleur
La mort
Cale au milieu du lit
Une consolation
Tu imagines l’autre vie
Au-delà du corps
Conscience féconde. »
S’inventer un autre monde. L’ex-psychologue explore des sphères, le bricolage linguistique. Lire tout haut ce qui se dit tout bas.
Christian Bobin, « Le muguet rouge » (folio 2024 en livre de poche).
Quand on lit Bobin, il faut voir des anges qui existent dans l’inexistence. Il faut quitter ce monde. Apprendre à vivre dans la nuit. Découvrir la chair du silence. Aller lire dans notre chambre secrète pour redécouvrir nos joies d’enfance.
Parce que le monde ne voit pas la Lumière. Parce que le monde vit dans les images. La vie vous fait mal. Elle va. Elle vient. Je veux renaître avec des souliers neufs parce que je suis inadapté à la souffrance. Il faut laisser couler la vie, sans perdre notre innocence. Il faut guérir de la maladie d’un monde en cavale. La souffrance est un langage muet. (2 )
Note
- Dominique Fortier, critique 21 décembre 2020 sur La Métropole.com
- Christian Bobin, critique 18 février 2023 sur La Métropole.com
Photo principale : Étienne Beaulieu