Devenir membre

Chypre : une île divisée sous contrôle de l’ONU depuis 50 ans.

L'île de Chypre est toujours coupée en deux et traversée par par une zone tampon contrôlée par l'ONU. Ouest France @AFP L'île de Chypre est toujours coupée en deux et traversée par par une zone tampon contrôlée par l'ONU. Ouest France @AFP
L'île de Chypre est toujours coupée en deux et traversée par par une zone tampon contrôlée par l'ONU. Ouest France @AFP

Une île  à l’histoire mouvementée

Chypre, d’où selon la mythologie grecque, Aphrodite, la déesse grecque de la beauté, de l’amour et de la fécondité, sortit des eaux[1] est la troisième plus grande île (avec 1 200 000 habitants[2]) de la Méditerranée (9253km2). Un espace insulaire convoité depuis plusieurs millénaires pour sa position géographique stratégique à l’est de la Méditerranée dans le bassin Levantin (distant de moins de 100 kilomètres des côtes turques et du rivage libanais), au carrefour de plusieurs monde entre l’Orient et l’Occident. Ce territoire fut conquis[3] par les Mycéniens et les  Achéens (qui hellénisèrent l’île),  les  Assyriens, les  Egyptiens,  les Perses,  les Romains,  les Byzantins. Puis au XIIᶱ siècle, Richard Cœur de Lion  s’en empara et le vendit  aux Templiers qui à leur tour le cédèrent à Guy de Lusignan, seigneur poitevin, lequel y établit un royaume franc de 1192 à 1489[4]. L’île tomba ensuite sous le contrôle de la Sérénissime République de Venise, époque de grande prospérité puisque Chypre devint alors la première place commerciale de la Méditerranée orientale mais durant laquelle les chrétiens orthodoxes subirent une forte oppression (leurs lieux de culte furent fermés) tout en étant assujettis au paiement de lourdes taxes.

En 1571, Chypre fut  soumise par les troupes ottomanes, une domination  qui s’étendra sur trois siècles et qui fut  à l’origine d’une mixité de la population, racine des antagonistes contemporains entre les deux principales communautés linguistiques et religieuses (grecque et turque) de l’île. Si Chypre appartient culturellement au monde grec, les Chypriotes turcs actuels sont les descendants des Turcs originaires d’Anatolie qui furent ainsi transférés jusqu’au milieu du XVIIIᶱ siècle dans l’ensemble de l’île selon le bon vouloir de La Sublime Porte dont l’intention n’était pas tant  de coloniser que de repeupler et de rétablir l’économie[5] . Durant la longue présence ottomane, le travail forcé et le servage furent abolis et on ne releva pas de rivalités intercommunautaires fondées sur une appartenance religieuse. Outre la liberté des cultes, une autonomie fut octroyée au clergé  orthodoxe qui reçut le privilège d’être l’interlocuteur unique de tous les chrétiens ; l’archevêque n’était pas que le chef spirituel, mais également l’ethnarque, c’est-à-dire le représentant politique et national de son peuple dans ses relations avec le gouvernement ottoman[6] (il percevait le montant des taxes pour le compte de celui-ci). En 1878, grâce à l’habileté de Benjamin Disraeli, la Grande-Bretagne obtient du Sultan l’administration de l’île. Durant la première guerre mondiale, l’empire Ottoman et le Royaume-Uni évoluent dans des camps opposés[7], ce qui constitua l’une des raisons pour lesquelles les Britanniques décidèrent unilatéralement l’annexion de Chypre, le 5 novembre 1914 ; une souveraineté qui fut reconnue par la république Turque (proclamée le 29 octobre 1923) par le traité de Lausanne en juillet 1923.

Durant plusieurs siècles, les deux communautés linguistiques, les grecs orthodoxes (qui sont majoritaires) et une minorité musulmane turque  se côtoient pacifiquement, auxquels il faut ajouter une petite communauté maronite[8] (qui est estimée à 10 000 fidèles répartis entre 12 paroisses et divisée par la ligne de démarcation qui sépare l’île[9]) et une communauté  arménienne principalement composée des descendants des réfugiés du génocide de 1915[10].

Dans les années 50, on dénombrait à Chypre 622 villages dont 392  étaient chrétiens orthodoxes hellénophone, et 123 musulmans  turcophones et 114  qui étaient mixtes[11]. La coexistence culturelle harmonieuse ainsi que  la collaboration féconde entre les deux principales ethnies furent dépeintes avec talent par l’écrivain britannique, Lawrence Durrell, dans son célèbre roman « Bitter Lemons of Cyprus[12] » (1957). Mais cette « symbiose » entre chrétiens et musulmans (qui commerçaient  ensemble, il n’y avait pas d’économie séparée entre eux[13]) commença à sérieusement s’émousser lorsque l’Eglise orthodoxe organisa sous l’égide de l’archevêque Makarios,  le 15 janvier 1950, un référendum officieux auprès des Chypriotes grecs sur la question du rattachement de leur île à la Grèce qui fut approuvé à la quasi-unanimité des participants (96%).  Ce résultat en faveur de « l’Enosis » (union) était sans surprise, d’innombrables mémoires et pétitions ayant jalonné les années 1880-1914[14]  portaient cette revendication irrédentiste de l’unification avec la « mère patrie » (qui avait commencé à s’éveiller peu à peu depuis l’indépendance de la Grèce en 1830). Des lors, la minorité turque s’inquiétait légitimement pour son avenir, ne souhaitant aucunement être marginalisée et absorbée dans l’espace hellénique.  

Les heurts  interethniques

Les colons britanniques soucieux de maintenir leur influence instrumentalisèrent les appartenances confessionnelles et linguistiques, jouant les uns contre les autres, appliquant la règle « diviser pour mieux régner » pour asseoir leur pouvoir, contribuant au renforcement des mouvements nationalistes grec et turc.  Ainsi pour contrer le nationalisme hellène, ils favorisèrent les musulmans en les intégrant au sein de l’administration et dans le corps de police. La lutte de libération de l’île menée par l’EOKA[15], un  mouvement nationaliste clandestin fondé en 1955 par le colonel Georgios Grivas[16] (qui était doté d’un nombre limité de combattants implantés dans les villes et les montagnes  et qui agissaient sous forme d’embuscades) prit peu à peu de l’ampleur  avec le large  soutien de  l’Eglise, en l’occurrence de l’archevêque orthodoxe Makarios III. Et dans ce combat contre la puissance colonisatrice,  fait plutôt rare à souligner, on dénombra plus de morts parmi les forces militaires britanniques que parmi les insurgés[17].

Mais cette guérilla  qui  fut ainsi réprimée par les policiers auxiliaires d’origine  turque  avait  pour  motivation principale,  non pas la libération, mais l’unification avec la Grèce. Face à cette crainte de « l’Enosis », les musulmans chypriotes s’organisèrent  en  créant en 1957 avec le concours et le financement de la Turquie, le TMT (Türk Mukavemet Teskilati) une organisation de résistance para militaire. Ce mouvement aussi réactionnaire et nationaliste que son pendant  grec, Eoka, promouvait  la partition de l’île. A  partir de là, il s’en suivit un repli identitaire de plus en plus prononcé au sein des deux communautés (chacune avec ses fêtes, ses commémorations, ses idéologies) s’appuyant sur leurs « mère patrie » respectives  conjugué à des heurts intercommunautaires. Ce « choc des nationalismes[18] »  grandissant au sein des deux ethnies a irrémédiablement nourri le séparatisme.

En 1958, le développement des affrontements fut à l’origine  du premier  déracinement et transfert de  population.  Des Chypriotes turcs fuient peu à peu les villages où ils sont isolés ainsi que  les quartiers hellénophones des villes ;  des Chypriotes grecs adoptent une démarche similaire.  Des bribes de partition ethniques se mettent en place lesquelles n’eurent de cesse de prendre de l’ampleur.

Le 16 août 1960, Chypre accéda à l’indépendance. Mais celle-ci est relative, encadrée par un Traité de garantie qui interdit l’union avec un autre pays et accorde aux trois puissances signataires (la Grande-Bretagne, la Grèce et la Turquie) le droit d’intervenir dans les affaires intérieures chypriotes afin de préserver l’indépendance, la souveraineté et la sécurité de l’île.  Par ailleurs, le Royaume-Uni obtient d’y conserver deux bases militaires stratégiques qui représentent une superficie de 254 Km2 soit 3% du territoire chypriote : « Akrotiri » près de Limassol, s’avère la plus importante base du Royal Air Force implantée en dehors du Royaume uni et « Dhekelia » (Royal Navy) qui est localisée à la frontière avec la RTCN[19]. C’est un atout précieux qui permet aux anciens colonisateurs de maintenir leur influence au Proche et au Moyen-Orient[20] . Le Traité d’alliance prévoit quant à lui la protection militaire de l’île qui est assurée par le stationnement d’un contingent de soldats turcs (650) et grecs (950) [21].

La Constitution du nouvel Etat indépendant (qui ne fut ni élaborée par une assemblée constituante ni soumise à référendum) tente d’équilibrer les institutions en faveur des deux communautés (la présidence est assurée par un grec et la vice-présidence par un turc, chacun élu par leur communauté respective détient un droit de veto). Quant à la répartition des postes dans le domaine public et des sièges  à la Chambre des députés, elle relève de la règle suivante : 70% pour les Grecs et 30% pour les Turcs ; une disposition qui se révèle difficilement recevable pour les hellénophones qui sont  fortement majoritaires dans l’île (au moment de l’indépendance de Chypre en août 1960, ils représentaient 81% de la population pour 18% de Turcs répartis sur l’ensemble du pays). Le texte est inapplicable dans les faits et lorsque le Président, prélat, Makarios s’emploie à réduire le poids des musulmans dans la vie politique, c’est la rupture. Les fonctionnaires turcs sont expulsés ; les dirigeants de la minorité turque quittent les institutions de la république.

Une situation qui débouche sur des tensions  intercommunautaires de plus en plus virulentes,  la situation dérape et dégénère en décembre 1963 avec une semaine de massacres à Nicosie, Larnaca et dans des villages (désigné sous le vocable du « Noël sanglant ») avec plus de trois cent morts essentiellement des Turcs. Afin de prévenir toutes velléités de reprise d’affrontements entre les deux communautés, en  mars 1964, le Conseil de sécurité des Nations unies (résolution 186 du 4 mars 1964) décida l’envoi d’une force chargée d’une mission de  maintien de la paix (U.N.F.I.C.Y.P) ;  6000 casques bleus se déploient dans l’île[22] (forces canadiennes dans le Nord, les Britanniques au Sud, les Suédois dans l’Ouest, les Irlandais à  l’Est).

Le phénomène préexistant de regroupement des Chypriotes turcs dans des enclaves communautaires (au nombre de 45[23] )  lesquelles étaient disséminées du nord au sud  de l’île croît entre 1964 et 1974. Certaines de ces poches ethniques peuvent être minuscules, tel un village, ou un quartier dans une ville comme à Limassol, Paphos ou Larnaca ; elles sont le plus souvent surpeuplées, misérables,  isolées, coupées du monde et dirigées par des milices du TMT dont la revendication est le Taksim (la partition). On peut ainsi soutenir que les deux populations confessionnelles et linguistiques ne sont déjà plus mêlées à partir de ce moment-là.

L’invasion turque et la partition de l’île

Les nationalistes grecs, qui n’ont pas renoncé à l’Enosis et entendent chasser les Turcs de l’île, fomentent un coup d’Etat avec l’appui de la junte au pouvoir à Athènes. Ils  renversent,  le 15 juillet 1974, le président archevêque Makarios[24] qui réussit à s’enfuir à Paphos (sa ville natale) pour rejoindre ensuite en hélicoptère la base britannique d’Akrotiri.  Le président déchu est remplacé durant quelques jours par Nikos Sampson, chef de l’Eoka-B, une organisation para militaire créée en 1971, qui avait  multiplié les attentats et assassinats à l’encontre des forces de police et de la minorité turque chypriote surtout depuis que Mgr Makarios avait peu à peu abandonné ses aspirations à l’unité hellénique, optant pour la consolidation de l’indépendance.

La réaction de la Turquie ne se fit guère attendre, quelques jours plus tard, le 20 juillet débuta l’intervention militaire, les troupes turques débarquèrent  à Kyrenia, nord de l’île. Cette opération sous le nom de code  « Attila » s’affichait  comme « une mission paix pour Chypre » destinée à protéger les Turcs des exactions grecques.  Des milliers soldats turcs se répandent dans le  nord là où sont principalement installés les Chypriotes turcs, ils sont soutenus par 300 chars et appuyés par des bombardements aériens au napalm sur les populations civiles (qui seront à l’origine de la mort de 5000 Chypriotes grecs[25]) ; entre le 14 et le 18 août, la deuxième phase de l’opération permis un nouveau grignotage territorial. L’occupation de l’île entraîna de facto une partition de celle-ci entre deux groupes ethniques homogènes avec une zone nord et une zone sud ; ce sont les lignes de cessez-le feu des combats qui délimitèrent les deux parties de l’île. L’invasion fut à l’origine d’un vaste  mouvement de migration interne,  les grecs installés au nord (142 000) fuirent précipitamment en abandonnant toutes leurs possessions pour le sud et les turcs résidant (45 000) dans le sud firent le chemin inverse.

En 1974, il n’y eu pas de réaction de  l’Union européenne, Chypre, qui est d’ailleurs à l’époque un pays non aligné, est perçue comme un confetti d’Europe perdue dans la Méditerranée orientale  et elle n’est pas membre de l’UE. Deux entités politiques séparées coexistent depuis lors, la République de Chypre au sud qui est reconnue par la communauté internationale et le territoire occupé qui est administré de fait par la République turque de Chypre du Nord (RTCN) ainsi proclamée unilatéralement en 1983 par son leader Rauf Denktash[26], laquelle n’est reconnue officiellement que par un seul Etat souverain, la Turquie. La RTCN occupe un espace qui est disproportionné par rapport à la densité de la population puisqu’il représente 37% du territoire pour 18% des habitants de l’île.

Cette entité est dépourvue d’existence internationale légale (dans sa résolution 541 du 18 novembre 1983 et  dans sa résolution 550 du 11 mai 1984, le Conseil de sécurité  des  Nations unies considère la création de la RTCN comme « nulle et non avenue » exigeant le retrait des troupes turques). Mais dans les faits, il existe néanmoins de nombreux représentants de la RTCN  à l’extérieur (aux Etats unis, Belgique, Italie, Hongrie, Pakistan, Suède, Finlande, Oman…[27]). Ce territoire est placé sous embargo international depuis des décennies. Ainsi en matière de transports aériens, les vols vers l’aéroport d’Ercan  (doté d’un nouveau terminal et d’une nouvelle piste inaugurée en juillet 2023[28]) sont  interdits à l’international, ils ne peuvent s’effectuer uniquement que depuis la Turquie ; tous les avions de ligne en provenance d’autres pays qui ont Chypre du nord pour destination doivent faire escale en Turquie[29] (la situation est identique pour les ports de Famagouste et Kyrenia qui ne peuvent  être utilisés que par les compagnies turques).

La partie nord de Chypre est  sous perfusion économique et très dépendante de la Turquie (qui fournit entre 15 et 30% de son budget annuel). La Livre turque a cours légal dans le pays depuis 1983 (mais les devises étrangères, dollars, euros, livre sterling sont acceptées). Les entreprises turques investissent dans les deux secteurs-clefs de l’économie : les universités privées (qui attirent près de 50 000 étudiants étrangers issus d’Afrique, du Moyen orient et du sous-continent indien[30]) et le tourisme[31] (la chute  de la Livre turque ces dernières années a  rendu les prix très attractifs) ; elles contrôlent la distribution de l’eau, le secteur bancaire, les télécommunications,  les transports aériens[32].

Depuis l’été 1974, la partition de Chypre est matérialisée par une barrière physique de 180 kms qui s’étend de Kato Pyrgos sur la côte Nord-ouest à la côte orientale au sud de Famagouste. Elle  parcourt essentiellement des paysages ruraux ainsi que le cœur historique de la capitale  intitulée  sur le plan international Nicosia/Nicosie[33] mais « Lefkosia » (Nicosie sud) pour les Chypriotes grecs et « Lefkosha » (Nicosie Nord) pour les Chypriotes turcs et qui recèle la triste caractéristique, d’être désormais, la seule capitale divisée dans le Monde. En fait, cette cicatrice est dénommée « Green Ligne » (Ligne verte). L’origine de ce terme remonte au tracé effectué avec une encre verte par un général britannique, le 29 décembre 1963, pour séparer les deux populations antagonistes de l’île, limité à l’agglomération de Nicosie à l’époque. Mais les Turcs la désignent sous  le vocable de ligne « Attila », nom du général qui mena l’invasion de l’île en 1974.  Cette ligne de démarcation est composée d’une zone tampon de 346 Km2 dont la largeur peut varier de 3 à 7,5 kms dans la partie la plus large et seulement quelques dizaines mètres dans sa partie la plus étroite (qui sont localisés dans certains quartiers de la capitale).

C’est une aire où ni les militaires turcs qui occupent le Nord de l’île ni l’administration de la République de Chypre ne peuvent prétendre agir. Elle relève ainsi du seul contrôle de l’ONU, soit un mandat classique de maintien de la paix qui est également assorti d’une dimension bon office dans le conflit intercommunautaire qui divise l’île ; il est renouvelé tous les six mois depuis lors et traduit  une forme de souveraineté onusienne baroque[34]. La zone tampon (ou « Buffer zone » en anglais) fut longtemps infranchissable et ceci jusqu’en 2003, date à laquelle quelques points de passage furent ouverts (par décision unilatérale des autorités de la RTCN) puis d’autres dans les années qui suivirent. On en dénombre neuf actuellement,  la plupart pouvant être traversés par les véhicules[35] ; deux situés à Nicosie sont réservés exclusivement aux piétons : « Ledra Palace » (ouvert depuis 2003[36], il doit son nom à l’hôtel adjacent qui antérieurement à 1974 était l’un des plus prestigieux hôtels de la capitale et servit jusqu’en 2017 de quartier général  à l’UNFICYP[37])  et celui de « la rue  Ledra » (dans le centre historique). 800 soldats de la paix sont affectés à la surveillance de la « Buffer zone » qui dispose d’outils de haute technologie (caméras) pour détecter les incursions non autorisées[38].

Le président chypriote Nikos Christodoulides (D) aux commémorations des 50 ans de l’invasion turque de l’île méditerranéenne, le 20 juillet 2024. La Provence. Photo @AFP / Iakovos Hatzistavrou

La réunification, un vœu pieux

Les cycles de négociations de paix se sont multipliés ces quarante dernières années ; entre 1984 et 1992 sous l’égide des Nations unies, mais en vain, puis à partir de 1999.  Le plan Annan (nom du Secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan) présenté en 2002 fut amendé à plusieurs reprises. Sa cinquième version, sans  remettre en cause les puissances garantes, proposait plusieurs avantages indéniables pour les Chypriotes grecs : un ajustement territorial, c’est-à-dire une extension du territoire (de 7 à 9%) qui  leur serait dévolu[39] au sein d’une fédération bizonale et bicommunautaire (avec un Etat commun, intitulé « République unie de Chypre[40] », détenteur de la souveraineté externe ainsi  qu’une entité fédérée chypriote grecque et une entité fédérée chypriote turc ; chacune conservant sa constitution et bénéficiant d’une large autonomie[41]) ; le retour des réfugiés grecs ayant dû fuir en 1974  dans leurs anciennes demeures et terres du nord ;  la réduction du nombre de colons turcs (environ 100 000 sur 200 000) autorisés à demeurer sur l’île ; un retrait graduel des forces militaires turques qui ne maintiendraient plus, à partir de 2018, qu’un contingent de 650 hommes[42] (une concession  majeure, puisque jusqu’alors près de 35 000 soldats turcs stationnaient sur le territoire de la RTCN). Ce nouveau plan de règlement du conflit fut soumis à l’approbation populaire de chaque côté de l’île, le 24 avril 2004, soit quelques jours avant l’entrée officielle de Chypre au sein de l’UE (la procédure d’adhésion entamée en 1998 était d’ailleurs censée fournir l’impulsion internationale qui manquait jusqu’alors au processus de réconciliation mais auquel les dirigeants de la partie nord de l’île refusèrent de participer tant que – condition sine qua non- la RTCN n’était pas reconnue comme un Etat souverain[43]).

Les Chypriotes grecs  attachés au sacro-principe de de la réunification étaient néanmoins divisés sur le plan Annan (médias et principaux partis politiques appelaient au non[44]) et ils furent les artisans du rejet[45] (qui représenta 76% des suffrages[46]). Ils écartèrent ainsi  tout compromis, la Turquie étant toujours perçue comme une menace perpétuelle, les grecs craignant également les coûts exorbitants que générerait indubitablement le rattrapage économique du nord de l’île, et ils se montraient peu satisfaits par certaines dispositions du règlement de paix dont le nombre jugé trop restreint de réfugiés grecs autorisés à se réinstaller au nord[47]. A l’inverse, la population chypriote turque se déclara majoritairement en faveur de la réunification  (65% de votes favorables[48]) mais aucunement son dirigeant, Rauf Denktas, président de la RTCN, qui a toujours empêché toute avancée vers une fédération de l’île[49], prônant une double souveraineté et qui ainsi s’était prononcé pour le non. Ce dernier a toujours estimé que l’identité chypriote était un leurre, une invention des Chypriotes grecs, il fut d’ailleurs l’auteur de cette fameuse boutade : « Il existe seulement un vrai chypriote, c’est l’âne chypriote »[50]. Pour de nombreux Chypriotes turcs, la fin de la partition était perçue comme un moyen de s’extirper de la stagnation économique (le PIB de la RTCN avoisinait  à l’époque les  5000 dollars par habitant, de l’autre côté de la Ligne verte, il était de 18 000 dollars par habitant[51]) mais également d’enrayer l’émigration des Chypriotes turcs de souche, de développer le potentiel touristique considérable de la côte nord ….  Ankara soutenait le plan Annan, l’AKP (Parti de la justice et du développement, islamo conservateur) au pouvoir depuis 2002 caressait l’espoir d’arrimer leur pays à l’Union européenne (la Turquie était officiellement candidate à l’entrée dans l’Union européenne depuis 1999[52]). Mais son intégration n’était aucunement  envisageable avec le statu quo d’une île occupée par son armée, c’est la raison pour laquelle  la Turquie était ainsi prête aux concessions.

Si depuis mai 2004, l’île entière du nord au sud est un Etat membre de l’UE, la législation communautaire ne s’applique pas au territoire sous contrôle de la Turquie[53] (elle est ainsi différée jusqu’à l’adoption d’un règlement pacifique du conflit, une disposition qui cristallise la division de l’île au sein de l’UE). Bien que les Chypriotes turcs, soient des citoyens européens, ils ne participent pas au renouvellement du Parlement européen[54].

Les espoirs de parvenir à un accord définitif étaient forts en juillet 2017, lors des pourparlers de Crans-Montana en Suisse sous l’égide de l’Onu avec les trois puissances garantes. Mais au terme d’une semaine de négociation, « aucun accord ne fut possible » (le maintien des militaires turcs au nord de l’île demeurant la principale pierre d’achoppement), chaque partie ayant soin de rejeter sur l’autre la responsabilité de ce nouvel échec. Depuis lors aucune proposition créative n’émergea. Bien que les sociétés civiles des deux entités distinctes de l’île fussent totalement exclues des tentatives de négociation du règlement de la paix, celles-ci entendent néanmoins peser pour que les discussions continuent. Le camp de la paix s’exprime ainsi par des manifestations des deux côtés de la Ligne verte plaidant pour la réunification[55]. Un sondage conduit par l’Observatoire hellénique de la London School of Economic  révèle que 66, 5% de Chypriotes grecs et 63, 6% de Chypriotes turcs souhaitent un accord mutuellement accepté qui aboutira à une fédération bizonale et bicommunautaire[56].

Depuis 2017, Ankara et les officiels de Chypre du nord sont revenus à leur positionnement traditionnel, soit une solution à deux Etats ou une confédération « lâche[57] ». Le cinquantième anniversaire de l’invasion turque et de la cession de l’île, le 20 juillet 2024, fut honoré  et fêté au Nord tandis qu’il fut appréhendé comme un désastre au Sud[58]. S’exprimant depuis la partie nord de Nicosie (sous contrôle turc) pour la célébration de l’évènement, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, qui assistait à un défilé militaire déclara : « On ne peut pas se baigner deux fois dans la même eau. On n’arrive à rien en ignorant les réalités sur l’île. Nous pensons qu’une solution fédérale n’est pas possible à Chypre. Dire, reprenons les négociations là où nous les avions laissées en Suisse, il y a des années, n’est utile à personne[59] », des propos corroborés par Ersin Tatar, le président de la RTCN (nationaliste très proche d’Ankara, élu en octobre 2020[60]).

La diplomate colombienne, Maria Angela Holguin Cuéllar, Envoyée personnelle du Secrétaire Générale des Nations Unis (Antonio Guterres) pour Chypre[61],  indiquait  dans une lettre ouverte au début du mois juillet 2024 qu’il était nécessaire de « s’éloigner des solutions du passé » et de « penser différemment[62] », mais pour l’heure, il n’y a aucune perspective d’éclaircie sur le dossier du règlement de paix de l’île.

La situation demeure ainsi figée et ceci dans un contexte de tensions récurrentes avec Ankara autour de l’exploitation de gisements gaziers off-shore qui furent découverts progressivement depuis 2011 (à environ 170 kms au sud de Limassol[63]) soit dans la zone économique exclusive chypriote[64] (découpée en 12 blocs potentiellement riches en  énergie fossiles[65]). Or la Turquie, à défaut  de détecter des ressources gazières au large de ses côtes, conteste les délimitations déjà conclues et  émet des prétentions sur une partie de la ZEE chypriote, celle qui est située à l’Ouest et au Nord de l’île[66].  Les Turcs organisent des exercices militaires dans les zones contestées afin de dissuader les entreprises internationales  de mener des opérations de prospection ou ils envoient des navires de forage dans les zones maritimes chypriotes[67]. La présence également d’hydrocarbures dans les eaux sous souveraineté égyptienne[68] et israélienne[69] ainsi que leur exploitation sont devenues un enjeu géopolitique majeur en Méditerranée orientale et source de contentieux entre les Etats riverains.

Par ailleurs, au grand dam de la Turquie qui s’offusqua de ce revirement, les Etats-Unis décidèrent de lever en septembre 2022 l’embargo commercial de vente d’armes qui était appliqué depuis 1987 à l’ensemble de l’île (ceci dans l’espoir de prévenir la course aux armements et également d’encourager la résolution pacifique du conflit entre les deux communautés[70]).  Le président de la république de Chypre du nord, Ersin Tatar,  estime qu’avec  une telle décision, les Chypriotes grecs vont se procurer des armes d’attaque, ce qui dépasse le cadre de la défense avec pour conséquence de faire monter les tensions[71].

Le diplomate et célèbre poète grec de la diaspora, Georges Séféris[72], évoquait à propos de Chypre « le pays où le miracle existe encore[73] ». Mais celui-ci n’a que trop tardé pour les Chypriotes, la réunification semble malheureusement devenue un mirage.

Notes

[1] Le mythique lieu de naissance de la déesse de la beauté se situe sur la côte sud-ouest de l’île dans la région de Paphos.

[2] Avec une densité de 135 habitants/km2.

[3] L’historien voyageur britannique, W. Hepworth Dixon, écrivait en 1887 : « Tout peuple qui veut conquérir l’Orient doit partir de Chypre, c’est ce que firent Alexandre, Auguste, Richard et Saint Louis. Tout peuple qui veut conquérir l’Occident doit partir de Chypre, c’est ce que firent Sargon, Ptolémée, Cyrus, Haroun el-Rachid », cité par Christophe Chiclet, « Nicosie dernière capitale divisée de l’Europe », Confluences Méditerranéennes, décembre 1995.

[4] La bulle du pape Célestin III de 1196 fait de l’Eglise catholique la principale église de Chypre, ce qu’elle restera jusqu’à la conquête ottomane.

[5] « Avec l’invasion ottomane, la plupart des populations italiennes et européennes qui s’étaient engagées dans des activités marchandes ont quitté l’île », Mathieu Petithomme, « Les Chypriotes, des Lusignan, à l’Empire ottoman (1184-1878) : l’émergence des relations intercommunautaires gréco-turques », Cahiers Balkaniques, 42/2014.

[6] Ibidem.

[7]  Après le bombardement de ses ports par la flotte ottomane, la Russie déclara la guerre à l’empire Ottoman, le 2 novembre 2014 suivie par ses alliés Français et Britanniques.

[8] Le gouvernement  chypriote a reconnu officiellement l’arabe maronite (un dialecte arabe teinté de grec, le Sanna)  comme langue minoritaire en novembre 2008.

[9]  Antoine Sfeir, « Les Maronites de Chypre, des chrétiens d’Orient en Europe », https://lanef.net, 11 août 2021.

[10] Jusqu’en 1963, les Arméniens vécurent dans un quartier de Nicosie à majorité turcophone. Avec la multiplication des conflits interethniques, la communauté d’environ  3500 personnes migra vers le sud pour vivre au sein de la majorité chypriote grecque, Irene Dietzel, www.eurel.info, 12 septembre 2012.

[11] Julie Alev Dilmac, « La migration des Turcs à Chypre du Nord après 1974 : de l’identification à la différenciation », Migrations société, 2019, n° 177.

[12] Publié en français sous le titre Citrons acide, 1961.

[13] Aréti Demosthénos, « De la coexistence à la division : comment chypre devient une société divisée culturellement », Etudes balkaniques 2009/1.

[14] Liliane Princet, « Près d’un siècle de luttes du peuple chypriote », Le monde diplomatique, mai 1968.

[15] Ethniki Organosis  Kipriakou Agonos (organisation nationale de lutte chypriote).

[16] Décédé en janvier 1974.

[17] 371 militaires et 18 policiers et 26 civils britanniques perdirent la vie ; les forces de sécurité britanniques tuèrent 90 membres de l’EOKA ; 238 Chypriotes grecs et turcs furent abattus parce qu’ils étaient considérés comme traîtres ou communistes, Stélios Marathovouniotis, « How did 400 mens flight  Bristish Empire », https://in-cyprus.philenews.com.

[18] Gilles Bertrand, « Chypre l’adhésion ratée », Outre-Terre 2005/1, n°10.

[19] Il s’agit également d’une station  de collecte de  renseignements électromagnétiques (télécommunication, signaux radars)  intégrée au réseau Echelon qui est une alliance entre les services de renseignements britanniques, américains, canadiens, australiens et néo-zélandais ; elle offre une surveillance couvrant une vaste zone, incluant l’Afrique du nord et le Moyen Orient et le sud de l’Europe.

[20] Laurent Lagneau, « Les bases britanniques contestées à Chypre », www.opex360.com, 4 janvier 2012.

[21] Le traité prévoit l’établissement d’un quartier général tripartite assuré à tour de rôle pour une période d’un an par un officier général chypriote, grec, ou turc.

[22] Résolution 186 du Conseil de sécurité, 4 mars 1964.

[23] André Louis Sanguin, « Nettoyage ethnique, partition et réunification à Chypre », revue géographique de l’Est, n° 1/2005 vol 45.

[24] Elu en décembre 1959, le président Makarios avait pris ses fonctions le 16 août 1960, réélu en 1968 et en 1973, il décède en 1977.

[25] Le monde diplomatique, « Occasion perdue pour les Chypriotes », juillet 2004.

[26] Il fut réélu de 1983 à 2005.

[27] Elle a un statut d’observateur à l’Organisation de la coopération islamique  et également à l’Organisation de coopération économique, Patrice Moyeuvre, « La RTCN : un Etat pas vraiment reconnu ? », www.irisfrance.org, juin 2024.

[28] Pour un investissement de 450 millions d’euros.  Sa capacité est de 10 millions de passagers (4 millions ces dernières années).

[29] Les vols directs sont interdits, la RTCN n’étant pas reconnue par l’OACI (Organisation de l’Aviation Civile Internationale) qui contrôle seulement l’espace aérien du sud de l’île.

[30] Corentin Bainier Erika Bainier, « Etudiants étrangers à Chypre-Nord », www.france24.com, 19 mai 2023.

[31] La RTCN a franchi en 2016 le cap d’un million de touristes, essentiellement  des Turcs.

[32] Quentin Raverdy, « Crise en Turquie : Chypre du nord en carafe »,  www.liberation.fr, 17 décembre 2018.

[33] Située dans la région centrale de la Mésorée entre les monts Troodos et la mer Méditerranée.

[34] Depuis novembre 2021, Colin William Stewart est le représentant spécial et chef de la Force des Nations Unies chargée du maintien de la paix à Chypre.

[35] A l’est : Permagos, Deryneia, Strovilia ; Agios Dometios-Metchan (en banlieue de Nicosie, il s’agit du point de passage le plus important de l’île avec des milliers de traversées chaque jour) ; à l’ouest : Lefka-Apliki kato,  Kato Pyrgos, Astromeritis-Zodia.

[36] Avant cette date et depuis 1974, ce point de passage était exclusivement réservé à la traversée  du personnel de l’ONU  et  au personnel des deux bases militaires britanniques.

[37] United Nations Peacekeeping Force in Cyprus.

[38] Menelaos Hadjicostis, https://apnews.com, 15 juillet 2024.

[39] L’état fédéré turc conservant Nicosie Nord, Famagouste, Kyrenia, l’aéroport d’Ercan.

[40] L’Etat fédéral serait dirigé par un Conseil présidentiel  de 6 membres (4 Chypriotes grecs et 2 Chypriotes turcs) élus pour cinq ans ; la fonction de chef de l’Etat étant assurée pendant 20 mois par l’un des membres grecs puis 20 mois par  l’un  des membres turc sur la durée du mandat en alternance.  Un parlement bicaméral : un Sénat composé de 24 Chypriotes grecs et 24 Chypriotes turcs  et une chambre des députés de 48 membres au prorata des deux communautés.

[41] La référence est le modèle Suisse.

[42] Présence de troupes grecques limitée à 950 soldats après 2018.

[43] Le Conseil européen d’Helsinki en décembre 1999 indiqua qu’un règlement politique faciliterait l’adhésion de l’île mais que celui-ci ne constituait pas une condition préalable à l’entrée dans l’UE. Quant à la Grèce, elle menaçait de paralyser l’ensemble du processus d’adhésion des pays d’Europe centrale si l’UE décidait de conditionner l’intégration de Chypre à sa réunification préalable.

[44] Le président de la République de Chypre, Tassos Papadopoulos, mais également l’un des plus grand parti grec, l’AKEL (communiste) prônaient le rejet ; en fin de campagne, la chaîne publique de télévision interdit d’antenne le commissaire à l’élargissement, Günter Verheugen ainsi que le représentant de l’ONU, Alvaro Soto, cité par Niels Kadritzke, « Occasion perdue pour les Chypriotes », Le monde diplomatique, mai 2004, p. 20.

[45] Côté grec, seul le Disy (parti conservateur) appelait à l’approbation du plan de paix.

[46] 89, 18%  des électeurs se sont rendus aux urnes dans cette partie de l’île où le vote est obligatoire, Corinne Deloy, Fondation Robert Schuman, 24 avril 2004.

[47] Il était précisé que ce nombre ne pouvait pas dépasser 18% de la population locale turcophone de 200 000 personnes. Ce qui répondait à la crainte des Chypriotes turcs d’être submergés par un retour massif des réfugiés grecs.

[48] Avec un taux de participation de 87%, Corinne Deloy, op. cit.

[49] Pierre Blanc, « Chypre, Du déclaratoire à l’opératoire », Confluences méditerranéenne, 2008/4, n° 67.

[50] Mathieu Petithomme, « Les Chypriotes turcs face à l’immigration turque », Critique internationale, 2015/2, n°67.

[51]Josselin Gauny, « L’échec du plan Annan pour Chypre : un passage de témoins entre l’ONU et l’UE », www.diploweb.com.

[52] Les négociations d’adhésion ouvertes en 2005 sont gelées depuis 2018  (en 2016, le coup d’état et la répression qui s’en suivit éloignèrent le pays du respect des critères politiques de l’adhésion.

[53] Mais afin  de mettre fin à l’isolement de la communauté chypriote turque, la Commission européenne a mis en œuvre un programme de soutien au développement socio-économique, à la modernisation des infrastructures. Entre 2006 et 2018, l’UE a alloué 520 millions d’euros à ces projets.

[54] Lors des dernières élections européennes (juin 2024), le taux de participation s’établit à 58% contre 45% en 2019. Ce sursaut de participation, selon certains observateurs et experts, pourrait être attribué à l’effet « Fidias  Panayiotou», nom d’un jeune youtubeur de 24 ans très actif sur les réseaux sociaux. Sans expérience politique ni affiliation, il lança une campagne incitant les jeunes à voter (un message qui a semble-t-il été entendu). Il a été élu député indépendant avec 19,45% des suffrages exprimés, illustrant le rejet des partis traditionnels.

[55] La jeune génération née dans les années 2000 ne connaît Chypre que dans l’Union européenne, elle est lassée par le statu quo de la division perçue comme un héritage de la génération précédente.

[56] Noémie Belkacemi, « ThucyBlog n°175-Chypre : Vers la fin de près de cinq décennies d’un statu quo confortable ? », www.afri-ct.org, 29 novembre 2021.

[57] Hasan Selim Ösertem, notes de l’Ifri, juillet 2021.

[58] Les sirènes retentirent à l’aube (à 5 heure 30, heure locale) dans la capitale pour commémorer les raids aériens turcs de 1974.

[59] www.euronews.com, 21 juillet 2024.

[60] Il a battu son prédécesseur, Mustafa Akinci, qui se représentait et qui était partisan de la réunification.

[61] Elle fut nommée à ce poste en janvier 2024.

[62] « 50 ans après l’invasion de Chypre, Chypriotes et Turcs campent sur leurs positions », www.la-croix.fr, 19 juillet 2024.

[63] Gisement «  Aphrodite » (bloc 12) découvert en 2011 par la compagnie américaine, Noble  Energy  (il est estimé de 130 à 200 milliards de mètres cubes de gaz). Le gisement Calypso (en 2018) dans le bloc 6 est estimé entre 170 et 230 milliards de mètres cubes ;  celui de Glafcos (2019) dans le bloc 10 est estimé entre 142 à 227 milliards de mètres cubes, Jean-François Drevet, « Géopolitique de Chypre, première partie, Pourquoi la guerre du gaz ? », www.diploweb.com, 19 septembre 2021.

[64]  L’espace maritime est divisée en zones économiques exclusives (ZEE) définies dans la convention des Nations unies sur le droit de la mer de Montego Bay (Jamaïque) de 1982 entrée en vigueur en 1994. Mais pour des Etats relativement proches, appliquer la règle des 200 miles marins (321 kilomètres) stipulée par la convention n’est pas possible car les ZEE se chevaucheraient.  Ainsi pour définir le contour de cette zone, la République de Chypre a signé des accords bilatéraux avec les pays voisins côtiers (Israël en 2010,  Egypte en 2003,  Liban en 2007) ; ce sont des accords de gestion partagée. Mais la Turquie n’est pas signataire de la convention de Montego Bay et ne reconnaît pas la République de Chypre, il n’y  a pas de relations diplomatiques entre les deux Etats.

[65] Cette manne  permettrait à Chypre de couvrir ses besoins énergétiques et de revendre le surplus.

[66] La RTCN revendique également des portions de la ZEE chypriote.

[67] Envoi en 2018 du navire forage « Fatih » dans le bloc 7 de la ZEE  chypriote, envoi du navire « Yavuz »  dans la même zone en 2019.

[68] Le gisement Zohr découvert en 2015 par ENI est estimé à 850 milliards de mètres cubes.

[69]  Près des côtes de Haïfa,Le gisement Leviathan (exploité depuis 2020), le gisement  Tamar (exploité

[70] Cette décision était avant tout une pression pour réduire l’influence russe à Chypre, la condition posée était que Nicosie refuse aux navires de guerre russes d’accéder à ses ports.

[71] www.liberation.fr, 17  septembre 2022.

[72] 1900-1971.

[73] Cité par A.G Leventis, Le Monde diplomatique, août 1968.

Laurent Beurdeley est Maitre de conférences à l’Université de Reims, ses travaux de recherches portent sur le Maghreb, les sexualités et les questions de genre (il a notamment publié, « Le Maroc, un royaume en ébullition, éditions Non Lieu). Passionné de cinéma, il a esquissé un portrait de Xavier Dolan (« L’indomptable », éditions du Cram, 2019) et rédige des chroniques de films.