Le courage et la peur. L’armée des ombres, par Jean-David Morvant, Emmanuel Moyot, Benoît Lacou. D’après le grand récit sur la résistance de Joseph Kessel, Éditions Philéas.
En 1943, sur demande du Général de Gaulle, le journaliste et aventurier Joseph Kessel s’est attelé à la rédaction d’un roman mettant en scène les hommes et les femmes de la résistance. Contrairement à ceux qui se sont unis dans les derniers moments, l’Armée des ombres était composée de gens ordinaires, des hommes et des femmes qui se sont engagés dans la résistance clandestine en France libre. Ils ont accueilli des aviateurs abattus, aidé des agents parachutés et transmis des messages secrets, tout en surveillant les allées et venues de l’ennemi.
Comme l’écrira si bien Kessel : « Il n’y a pas de propagande en ce livre. Aucun détail n’y est inventé. On ne trouvera assemblés ici que des faits authentiques. Les sources sont nombreuses et sûres. Pour les caractères, les situations, la souffrance la plus nue et pour le plus simple courage, il n’y avait qu’un tragique embarras du choix. Je voulais tant dire et j’ai dit si peu ».
Ce roman a inspiré un film remarquable, en 1969, qui atteignait la même densité que le livre. Jean-Pierre Melville en était le réalisateur, avec une distribution d’acteurs de renom : Lino Ventura, Simone Signoret, Jean-Pierre Cassel, Paul Mruisse, Serge Reggiani, Christian Barbier et une musique inoubliable d’Éric Demarsan. Tout comme le roman, on devrait regarder ce film et lire cette bande dessinée, qui existe en deux versions : une édition prestige noir et blanc (5000 exemplaires) et une autre, « normale ».
Avec Jean-David Morvan et Emmanuel Moyot, qui ont signé la mémorable trilogie sur la résistante Madeleine Riffaud, nous sommes entre de très bonnes mains. Le récit s’ouvre sur l’hymne des partisans, composé par Kessel et Dron sur une musique d’Anna Marly. Il est suivi de l’introduction du roman, qui nous plonge dans l’univers de Gerbier et Mathilde, ainsi que du Bison de Luc Jardie et de tous les personnages qui peuplent cette histoire tragique.
Le texte est d’une beauté saisissante, et les illustrations, pour ceux qui ont la version en noir et blanc, ajoutent une touche de mystère et de terreur à l’ensemble. Au-delà de l’assaut, la résistance fut un patchwork d’actions mineures qui, finalement, contribuèrent à la victoire.
Mais à quel prix ! Alors que ces derniers héros de l’ombre s’apprêtent à rejoindre leurs frères d’armes, cette bande dessinée est un hommage que nous devons transmettre aux jeunes générations. Un simple devoir de mémoire.
L’Armée des Ombres (version restaurée)
Journaliste depuis 1990, formation en sciences politiques à l’UQAM( relations internationales). Recherchiste, réalisateur et chroniqueur pendant 20 ans à Radio-Canada, au Journal de Montréal pendant 17 ans( jazz, classique et autres). Couverture du Festival de jazz depuis 1990. Collaborateur à Sortiesjazznights depuis 20ans. Auteur des grands noms du jazz en 2000 ( Éditions de l’Homme) et aussi chroniqueur de livres pour le blogue : C’est livre et du bon
