Hommage à Hélène Dorion

Le 20 juin 2024, Hélène Dorion recevait le « Grand Prix de Poésie » qui récompense une œuvre.

Le 20 juin 2024, Hélène Dorion recevait le « Grand Prix de Poésie » qui récompense une œuvre.

L’Académie française a enfin souligné une carrière immense. 40 ans de poésie et quelques essais. Une œuvre fondatrice au même titre que Bonnefoy et Jaccottet en France.  Son dernier livre, « Mes forêts » est inscrit au baccalauréat français. Sa poésie lève le voile sur l’intériorité. Une dimension sur le temps, les origines, l’infini.

La poésie, métaphysique matérialiste, qu’elle célèbre la vie quotidienne ou la vie éternelle. La poésie glisse à la surface des choses, sur l’épiderme du monde, toujours et qu’elle est réelle absolu.  Dans mon quatrième livre (1), en pleine pandémie, j’ai écrit un poème à Hélène Dorion.

Le désir secret de ladmiration

« Le temps pose des éternités

Puis, sans rien dire, les reprend

Amour, lumière, consolation (2)

Javais besoin de recopier vos mots

Une prière qui monte dans cette vie

Trop brève

J’aimerais tant vous parler. »

J’ai choisi trois livres pour vous rendre hommage. D’abord « Sous larche du temps », un essai sur la fragilité de la vie quotidienne. Nous sommes au cœur de la Parole.

« Je crois que l’écriture a ceci de particulier qu’elle permet d’explorer la capacité de la langue à mettre à l’épreuve la multiplicité de nos modes de connaissances, c’est-à-dire à la fois l’imagination créatrice, l’intuition, la réflexion, la mémoire, l’expérience sensible. Le matériau premier de l’écriture, le langage, devient ainsi un espace capable d’accueillir l’être humain dans sa totalité – corps, cœur, âme, esprit -, dans toutes les dimensions de notre existence. Donc, la vision du monde que transporte le poème à travers la langue tient bien sûr à la fois du sensible et du réflexif, qui me paraissent intrinsèquement liés dans l’écriture tout autant d’ailleurs que dans notre propre expérience » (3).

Je suis dans la chambre du poète, à lire vos merveilleux livres. La solitude n’existe pas. Le temps s’arrête. C’est le pouvoir magique de vos écrits. L’histoire de l’humain. La tête sous l’oreiller, j’aime bien me rappeler vos passages subliminaux. Pour m’oublier ou pour simplement me rappeler la vie que j’ai tant aimé.

L’étreinte des vents

« Comme l’écrit Rilke, nous sommes les abeilles de l’invisible. Nous butinons éperdument le miel du visible pour l’accumuler dans la grande ruche d’or de l’invisible. Les instants les plus ténus laissent en nous une empreinte indubitable. Toucher, goûter, humer, écouter : notre corps permet d’aller à la rencontre du monde, de nous relier, et par là, d’être entièrement dans cette présence aiguë qui unit. Les sens pointent vers le sens. Plus encore, ils nous le restituent. Ils posent de la joie dans notre bagage, recueillent, au milieu de l’éphémère des instants de grâce qui nous rappellent combien la vie est précieuse et, à travers le plus petit, ils nous libèrent de la nostalgie de l’infini. Laisser entrer le monde par nos pores, c’est permettre aux deux rives de ce fleuve ardent qu’est la vie de nous imprégner, de toucher tant l’ombre que la clarté; c’est consentir à ce que s’incarne en nous le miracle du bourgeon qui devient feuille, c’est habiter pleinement le passage. » (4)

Mes forêts, un livre-culte (5)

Abattre des forêts par centaine. L’anarchie baroque des consciences s’agite.  Cette anarchie d’impatience à civiliser, à changer le monde en un vaste écran. On va même jusqu’à déconstruire la forêt des mots. Le 21e siècle est un déluge de souffrances. L’autrice nous fait réfléchir :

« Un poème murmure

Un chemin vaste et lumineux

Qui donne sens

À ce qu’on appelle humanité. » (p. 111)

À ceux et celles qui n’ont jamais lu Hélène Dorion, ce livre est une représentation intimiste de son œuvre. À la fin de cette poésie pure, une très belle entrevue avec l’autrice.  « Mes forêts » est un livre de questionnement : « Comment faire du souci de la terre une question individuelle et collective? Que peut la poésie dans nos vies? » (p.153)

Pas même le bruit d’un fleuve. Hélène Dorion

Notes

1. Ricardo Langlois, « Lempire » 2021.

2. Citation, « Un visage appuyé contre le monde ».Le Noroit, 1990.

3. Hélène Dorion, « Sous larche du temps »Typo, essai, 2013.

4. Hélène Dorion, « L’étreinte des vents », Druide 2018.

5. Hélène Dorion, extrait de « Mes forêts » (livre de poche), Critique, La Métropole, 29 avril 2023.

La poésie du cosmos. La grande librairie. Hélène Dorion.

Ricardo Langlois a été animateur, journaliste à la pige et chroniqueur pour Famillerock.com

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