Paris, vingt ans après…

Le Musée du Louvre à Paris présente une superbe collection, complétée par une fontaine sereine devant lui. Le Musée du Louvre à Paris présente une superbe collection, complétée par une fontaine sereine devant lui.
Paris vingt ans après… le Noël 2018 des gilets jaunes

Paris me manque. A-t-elle changé ? Les Parisiens, sont-ils différents ? Comment vivre cette période de fin d’année après vingt Noël et jours de l’an passés à Montréal ? Les journaux et la famille, au téléphone, ne parlent que des gilets jaunes. Images choc à la télévision. La France est en colère. Comment vont se dérouler les derniers jours 2018 dans cette capitale tant aimée ?

De retour à Montréal, les sentiments sont partagés. Paris reste toujours Paris. C’est indéniable. Fabuleuse et flamboyante. La ville vibre en nous. Clichée ou intime, elle émeut et touche. On retrouve une part de soi dans Paris… Le plaisir de déambuler rue Montorgueil, dans le 2e arrondissement, quartier Bobo par excellence, qui l’était déjà il y a vingt ans. Le « Bobisme », à l’époque, s’appelait la «gauche caviar ». Paris reste et demeure cette ville époustouflante. Elle ne s’oublie pas. Quelques minutes suffisent et les « manières » parisiennes resurgissent. La capitale est ancrée. Indélébile. Elle s’imprègne. En soi.

Les Parisiens, quant à eux, ont changé sans avoir changé. Le noir est toujours de rigueur. La capitale de l’élégance n’est pas plus colorée qu’il y a vingt ans. Elle reste toujours en mode « petite robe noire». En revanche, très bonne surprise : ils sont charmants et plutôt relax. Paris semble avoir fait de gros efforts pour dire « bonjour », « merci » et « s’il vous plaît ». Les serveurs, les tabagiques et les vendeurs sont souriants. Très souriants. Vraiment ! Cela fait plaisir. Et puis, il y a plein de vélos et de trottinettes ! Les Parisiens sont drôles et mignons comme tout, déambulant, l’air léger, entre les voitures, un brin ridicules. Le « bobisme » et » l’hypsteurisme » les ont transformé en écolos BCBG, sans casque pour ne pas se décoiffer, avec un look un tantinet dandy. Il y a comme une nostalgie des années Saint- Germain-des-Prés chez les jeunes Parisiens branchés. Les spectres de Vian et des Signoret-Montand ne sont pas très loin. On les imagine bien, alors, chantant « La bicyclette… ». Là encore, c’est touchant.

En revanche, Paris-Noël 2018 est décevante. La Ville Lumière est un peu pâlichonne. En dehors des Champs (grandiose) et des grands magasins (classique), il n’y pas grand chose. Place Joachim-du-Bellay, aux Halles, seul le MacDo arbore deux sapins scintillants. Les rues commerçantes ont fait quelques efforts d’éclairages, mais le cœur ne semble pas de la partie. Paris ne scintille pas. Elle est en sobriété. Tristounette. Les citadins ne sont pas affairés. On ne ressent aucune excitation de leur part. Ils font leurs courses. Voilà tout. La frénésie de la fin d’année n’est pas au rendez-vous.

Bien sûr, il y a les gilets jaunes. Les Parisiens ne parlent que de ça. Ils semblent incrédules. On ne perçoit pas de colère de leur part devant la violence des provinciaux. Ils se font petits et tentent d’en expliquer les raisons. Ils ne prennent pas vraiment partis. Comme s’ils culpabilisaient devant la réalité criante d’une « France ras-le-bol » d’être méprisée par une capitale suffisante et tape à l’œil. Les Parisiens font profil bas. Ils acceptent. Mais leur gêne est palpable. On voit les dégâts dans les rues. Les vitrines des commerçants et des banques sont placardées de planches. Oui, ça se voit ! Paris s’est fait agressé et ce n’est pas fini. Il a fallu se barricader dans une des boutiques chics de la rue Etienne Marcel à cause des échauffourées. Les gens couraient devant la violence montante. La peur semblait palpable. Mais, en y regardant de plus près, les nombreux badauds étaient plus hilares qu’effrayés. Beaucoup d’entre eux s’amusaient à alimenter leur page Facebook et Instagram à coup d’iPhone. La parade violente des « serins » mécontents se donnait en spectacle et les gens en revoulaient…

Le pire restera, cependant, le réveillon de Noël. La messe de minuit. 19 h à Saint Ferdinand dans le XVIIe. L’armée était présente. Aux portes de l’église. Kalachnikov ou autre fusil d’assaut bien en vue. L’image était terrifiante. L’absurdité du monde dans toute sa splendeur. L’incarnation de la honte humaine. Le paradoxe affligeant de réaliser, qu’aujourd’hui, l’état laïc protège l’église qu’elle décapitait il n’y a pas si longtemps…. Et les fidèles baissent la tête, entrent discrètement dans l’église et prient…

Revenons à une note plus joyeuse : Paris Culture. La capitale semble au top de ses événements culturels et ça marche. Miró affiche complet au Grand Palais, la fondation LVMH fait mouche avec Basquia et les spectacles battent leur plein. La qualité est au rendez-vous… Philippe Decouflé à la MC93 : le chorégraphe solo.  Très beau solo de Decouflé créé il y a une quinzaine d’années. Le spectacle est drôle et magistralement chorégraphié. C’est beau. Touchant. intelligent. Poétique. Un peu vieillot en chipotant. On aime ce spectacle pour le chorégraphe, mais on l’aime aussi, intensément, pour le public présent ce soir-là.

La première chose qui frappe en entrant à la Maison de la Culture de Seine-Saint-Denis de Bobigny c’est son public. Nous sommes en semaine, à quelques jours de Noël et une foule de jeunes, d’enfants et d’ados, sont présents, en bande, avec l’école, pour aller voir un show de danse ! Les « Junior Black-Blanc-Beur » se déplacent pour un danseur vieillissant. Et ces derniers « tripent vraiment leur moment » comme on dit au Québec. Ils réagissent devant cet homme qui leur danse ses émotions et ses fantaisies. Ils réagissent joyeusement quand c’est drôle et sont concentrés tout au long du spectacle. À la fin, ils applaudissent chaleureusement et se lèvent pour féliciter Decouflé visiblement heureux d’être là.

Les jeunes Parisiens se foutent royalement de la gueule des habitants du « 93 » mais, en voyant la salle ce soir-là, on est en droit de se demander qui sont les plus ridicules…  Derniers jours de l’expo On Air carte blanche à Tomás.

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