Chronique d’une exposition remarquable. Par Roger Huet
L’Année 2023 est une année faste pour l’art et l’artisanat de Lachine, car elle renoue avec des expositions prestigieuses après plusieurs années de dormance. Du premier au trois avril s’est tenue une exposition de sculpture sur bois, de céramique et d’art textile dans la Maison du Brasseur du Complexe culturel Guy Descary. Le clou de l’événement était l’exposition de sculpture sur bois dans la grande salle du complexe, où se tenait également l’exposition, plus petite des céramistes de Lachine.
Le foyer de la production des sculptures sur bois se trouve au Club Les Pic-Bois, qui est un club particulier car il n’y a pas de professeur. Il est ouvert à tous ceux qui aiment la sculpture sur bois. On s’inscrit à n’importe quel moment de l’année pour être membre. Aucune preuve de formation n’est requise. Les ateliers libres du lundi, mardi et samedi sont donc ouverts autant aux débutants qu’aux artistes chevronnés. Comment un débutant sans aucune connaissance en sculpture sur bois peut prospérer sans professeur? Les professeurs sont les membres plus expérimentés qui conseillent les novices. Personne n’est payé pour cet enseignement. Il y a quand même plusieurs personnes qui se dévouent au Club les Pics-Bois. Normand Lemaire est le maître à penser et celui qui a guidé presque tous les membres. Normand est un sculpteur chevronné aux cheveux blancs qui est une encyclopédie en matière de sculpture et de bois. Il y a aussi des jeunes talents, comme Fréderic Michaud l’artiste du Dremel qui peut tailler une plume, ou une écaille de serpent, à la perfection.
Envie de faire un canard ou un serpent dans le moindre détail? Frédéric vous montrera comment le faire de A à Z, et cela donne des résultats! Vous monterez un ou dix canards et vous deviendrez à votre tour un guide pour ceux qui veulent s’initier. Les Pic-Bois est un foyer de passionnés. Qui dit travail du bois dit aussi gouges et ciseaux. Le club a ses propres outils de sculpture qu’il met gratuitement au service de ses membres, en atelier. Lorsqu’on travaille avec des gouges on a besoin d’affûtage; ce qui est un art difficile par la diversité des formes et des techniques. Justement aux Pic-Bois il y a deux spécialistes : Dan Grimard qui est un artiste de la lame fine et Normand Lemaire.
Chaque atelier est accueillant parce qu’il y a du bon café que les membres préparent chaque jour et plusieurs fois par jour. Le secrétaire André Beaulieu veille à ce que le café ne fasse jamais défaut.
L’exposition de cette année est donc le fruit de cette ambiance d’amitié, d’émulation et de bonne humeur. Voici les exposants :
Serge Sirois, et ses chefs d’œuvres : son colibri, sa rose, son Hibiscus et son mésange.
Son Hibiscus a remporté le Prix du public.
Son Pierrot est le premier travail qu’il a produit en bois. Chapeau pour un premier travail !
Marc Tanguay est un artiste créatif qui a le souci de la finition.
Ses fenêtres ont des animaux parfaitement reproduits, son canard est une beauté, mais au-dessus de tout il aime les pièces qui cachent d’autres pièces comme cette corne d’orignal qui cache une scène de la forêt boréale.
Son échassier renferme une bonne dizaine d’animaux aquatiques et aussi une coccinelle et une libellule; et son ours polaire cache des animaux du grand nord : le renard, le loup, le morse, le phoque, la baleine, encore une coccinelle et tant d’autres.
Dans ses temps libres, Marc aime tailler au canif, des moineaux. Il en a taillé des centaines, un par un.
Fréderic Michaud est un des membres les plus jeunes en âge, mais il compte avec une expérience de plusieurs années en sculpture. Il n’utilise jamais le maillet, rarement les gouges et les ciseaux, c’est un spécialiste du Dremel. Pour ceux qui l’ignorent, le Dremel est un petit tour électrique qui travaille à 30000 tours à la minute. Il est doté de toutes sortes de minuscules pièces pour tailler, creuser et polir.
Fréderic réussit des pièces qui exigent une grande précision. Le voici avec son serpent, son canard et son pic-bois.
Fréderic s’est découvert une deuxième passion pour les chevaux et l’équitation, d’où son chapeau.
Normand Lemaire, notre généreux mentor avec sa toute première œuvre, produite il y a bien longtemps. Elle portait déjà la marque des maîtres.
André Beaulieu est un garçon au grand cœur. Ses pièces, lui ressemblent, comme son Chat au Grand Cœur. Son aigle interprète l’esprit des bois et son Esquimau en bois délavé, complète la trilogie.
Jacques Viau est un sculpteur pragmatique. Ses pièces ont beaucoup de caractère mais vous ramènent toujours à la réalité : Son Sioux et son bison sont clairs et nets, son chauve est un chauve, son indien est un indien, sa bottine est une vieille bottine charmante. Il est aussi à l’aise avec les petites pièces qu’avec les gros morceaux. Jacques contrôle très bien les teintures et les patines.
Nicole Desaulniers est une belle personne, intelligente, élégante et ses œuvres reflètent sa personnalité. Lors de l’inauguration de l’exposition elle a accueilli la Mairesse de Lachine avec panache!
Voici son cheval, sa caravelle et sa fleur :
Claude Vallée a la main sûre et le trait précis. Il domine comme personne le sens de la courbe et joue en maître avec le clair-obscur, comme ici avec ses Amoureux du soir.
Renée Giguère est la présidente du Club les Pics-Bois. C’est une sculptrice qui a du métier et sa passion c’est produire de petites pièces comme ce magnifique Obélix, et des miniatures. Son lutin à lunettes taillé dans la tige d’une canne est une merveille de perfection.
Sylvie Laurin est très appréciée de ses camarades sculpteurs pour sa bonne humeur. Son tableau de fleurs montre son beau potentiel.
Yves Martel est un sculpteur dynamique, son trait a un rythme, et c’est pourquoi il excelle dans les pièces qui expriment un mouvement. Une qualité rare en sculpture.
Paulette Robitaille, Danielle Ethier et Édouard Fourment, sont trois apprentis qui arriveront loin s’ils persévèrent. Danielle Ethier a remporté le prix de l’atelier à une sculptrice débutante, pour son application.
Roger Huet raconte que sa vocation comme sculpteur ce sont les natures mortes qui permettent de présenter de nombreux objets ensemble. Ses premières sculptures c’étaient des natures mortes, mais lorsqu’il a demandé à son guide quels étaient les exercices pour parvenir à un bon niveau de sculpture, il lui a répondu sans hésiter : faites des visages féminins et des nus. Ils sont très difficiles à faire mais ils vous donneront la maitrise des gouges.
Voici donc sa série de portraits féminins et des nus.
Comme Roger aime les déesses Grecques le voici appuyé sur Aphrodite, inspirée d’un tableau de Modigliani ; comme il est pudique il a entouré le bas du corps de la déesse d’une serviette de bain.
En dessous-il présente une nymphe qui prend un bain de soleil; pour cacher sa nudité, il lui a mis deux boucles d’oreilles.
La troisième pièce est appelée La rouspéteuse, dans le style d’Andy Warhol, donc très colorée.
La quatrième pièce représente une réfugiée ukrainienne et le fond est réversible, d’un côté c’est un paysage des Laurentides et de l’autre une rue de la ville de Québec.
La cinquième pièce c’est la Déesse Déméter qui gouverne les saisons. Elle porte une couronne et un voile sur la tête.
Les céramistes de Lachine ont présenté une jolie table avec leurs créations.
Sur la photo deux créatrices : Virginie et Melza Harvey.
Force est de constater qu’il y a beaucoup de talent dans les centres de loisirs. Les œuvres sont au goût de tous. On va dans les musées pour contempler des œuvres de grands maîtres, mais en général on n’aimerait pas les avoir chez-soi; tandis que la plupart des œuvres exposées dans les centres de loisirs trouveraient leur place dans nos foyers, avec bonheur.
Références :
Les Pic-Bois de Lachine, 2901 Boul. St-Joseph, Lachine QC 4B7 514 516-7978
Sur Facebook : Pic-Bois de Lachine
Les Céramistes de Lachine
Roger Huet
Chroniqueur
https://lametropole.com/category/arts/arts-visuels/
www.lametropole.com/category/gastronomie/vins
Roger Huet
Ce Québécois d’origine sud-américaine, apporte au monde du vin, sa grande curiosité, et son esprit de fête. Ancien avocat, diplômé en sciences politiques et en sociologie, amoureux d’histoire, auteur de nombreux ouvrages, diplomate, éditeur. Dans ses chroniques Roger Huet parle du vin comme un ami, comme un poète, et vous fait vivre l’esprit de fête.
