Nathalie Handal, De l’amour des étranges chevaux. Par Ricardo Langlois
C’est la mémoire émotionnelle qui est le prétexte à l’écriture pour Madame Handal. C’est une poétesse qui a vécu entre l’Amérique latine, l’Europe, le Moyen-Orient et les États-Unis. Sa poésie complexe et sensuelle mérite le respect du lecteur. Sa poésie se rapproche de Mahmoud Darwich (1 ). Une quête d’amour et de sens se dessinent tout au long du livre.
Le fantôme de Darwich
Madame Handel est une citoyenne du monde. Elle s’exprime librement. Elle écrit entre le surréalisme et le réalisme. Elle observe le monde. Elle écrit de petites élégies : « comment porterais-je le fardeau du poème à ta place et à la mienne? » (2 ) Le fantôme de Darwich se tient à la porte du poème.
« Le murmure des feuilles
Dans les champs jaunis
La peine d’un paysan
La douleur d’un enfant abandonné
Regarde Tibériade déguisée en ombres
Sur les pas minuscules des étoiles
Ressens la main d’un mendiant
Et réponds-moi pourquoi avons-nous
Fait semblant
Quand nous avons mesuré la terre
Et qu’il n’y avait pas d’espace pour
Nous deux, » (p. 24 )
L’écho de Darwich est bien présent.
“ Le soleil qui enfante le divin
Fils du couchant. Le soleil qui pénètre le cycle de l’éternité. » (3 )
Je lis ceci :
« La route a sept cercles de soleil dessinés sur son torse. C’est ce qui arrive quand nous perdons l’attention » (p. 25 )
L’espoir, la recherche d’un Éden (mystique et amoureux) sont transfigurés dans l’humanité souffrante. Le féminin divin s’exprime ouvertement.
« Y a –t-il un nouvel amour dans ton lit
Cette nuit
Je demande
Où sont tes lèvres cette nuit
Je demande
Où est ta honte cette nuit
Et tes tulipes blanches ton arme
Tes branches d’olivier. » (p. 29 )
Quand je mentionne la dynamique du divin, c’est présent dans « Un pays des jours : Nous nous retournons tous les deux pour voir si Jésus se tient derrière nous. » (p. 32)
Mahmoud Darwich
Entre le corps et l’Esprit
Dans la chambre de la poétesse, les fenêtres s’envolent. Il y a l’amour, le vide, l’abîme. La flèche qui traverse la porte close. Un voyage entre le corps et l’Esprit. Et la liberté? « La liberté n’est-elle pas à la fois pureté et perdition? » Puis elle ajoute : « La poésie qui se réveille en nous : un miracle. Un étonnement. Une révélation soudaine ou une quête. » (p. 93 ) . Nous sommes au-delà de la littérature et de l’amour. Nous sommes fais pour « jouer, écrire, aimer » disait Christian Bobin (4 ). Je cherche mon propre parcours, mon cheminement intérieur à travers vos mots si simples, si doux.
« As-tu?
Suis-je le chansonnier
Ou l’es-tu?
Réponds.
À quel oiseau ai-je parlé
Quand nous avons marché ensemble.
Plus loin
Mythe après mythe? » (p. 97 )
Elle écrit une partition sur l’humanité comme « un tango perdu » (p. 104 ). Elle examine l’Univers (les paysages, le ciel, les dieux, la solitude. ) C’est une grande méditation sur la fragilité. L’Être transforme la vie et le renouvellement de cet élan. Sa poésie est fluide et habite une Conscience pure. Verlaine disait que « Votre âme est un paysage choisi. » (5 ) Il y a tant d’aubes à franchir. Est-ce que nous sommes sensibles à cette beauté fragile.
Notes
« Love and strange horses » paru en 2010, a remporté la Médaille d’or du « Independent Publisher Book Award ». Professeure à l’Université de Columbia, Nathalie Handal vit à New York.
Nathalie Handal, « De l’amour des étranges chevaux » Mémoire d’encrier 2023.