Hommage à John Mc Gale d’Offenbach. Par Ricardo Langlois
Si vous me demandez ce que je retiens de mes années de journaliste rock, à 25 ans, se retrouver avec Offenbach, Marjo, Voivod, Metallica, ça change votre façon de voir le monde. Je les ai suivis dans leurs loges, dans des répétitions… La musique m’a tout donné. J’ai beaucoup écrit sur eux. Écrire un texte à la dactylo, à 2 heures du matin. J’avais cette énergie. C’était ma raison de vivre. J’ai aimé Offenbach dès mon adolescence. Même si Harmonium est (était) mon groupe préféré.
La dernière fois
John Mc Gale, on s’est revu à l’été 2020, en pleine pandémie avec nos masques. J’ai eu le temps de lui dire à quel point je l’ai aimé sur scène, jouer comme un maître. Tu étais un dieu pour moi, tu étais le plus beau guitariste du Québec. J’ai trippé sur toi, si tu vois ce que je veux dire ! Il a esquissé un sourire. Il était content de mon franc-parler. Je lui ai donné mon recueil de poésie, Septième Ciel. Je l’ai regardé le feuilleter, puis s’arrêter sur le poème de la page 37, qu’il m’a alors lu :
C’est en toi que toute musique est oiseau
Personne n’est maître de la Lumière.
Un reste de splendeur dans un cerveau d’enfant…
Je lui ai dit : attends–moi, je reviens. Je suis parti vite. Je suis sorti du café avec les larmes aux yeux. Si vous me demandez ce que je pense de cet homme si humble, si doux, avec un sourire spontané, je vous dirais que c’est un ange. Depuis l’annonce de sa mort, le 31 octobre 2022, je suis tombé. Les murs de mon âme se sont effondrés. J’ai prié pour mon idole. J’ai allumé des petits lampions toute la soirée. Je suis convaincu que tu es parti rejoindre Gerry Boulet qui te considérait comme son fils spirituel. La foudre qui tombe et qui retombe. J’ai écouté le dernier show d’Offenbach au Forum. Ta mort dans un accident de voiture est inexplicable. C’est quelque part injuste.
Crédit photo : Linda Boucher
J’ai retranscrit le message de Laurence Jalbert : « Bon voyage, John Mc Gale. Toi, le sourire, le gentleman, le grand guitariste. Je suis si triste. Je tiens à rendre hommage à ton authenticité et à ce que tu laisses à la musique québécoise. »
Notes biographiques
Aidé par le parolier Pierre Huet, collaborateur de Beau Dommage qui compose huit des dix chansons, le disque Traversion d’Offenbach est sorti en 1979. Grâce à des pièces telles que Ayoye, dont les paroles sont d’André St-Denis, Je chante comme un coyote, Deux autres bières et Mes blues passent pu dans porte chantée par Breen Lebœuf, le groupe atteint la consécration du public et de l’industrie musicale, remportant le Félix de l’album rock de l’année au premier gala de l’ADISQ. Pour la première fois depuis le départ de Harel, le groupe comporte deux chanteurs avec la présence de Breen LeBoeuf.
Cette même année, ayant rencontré Vic Vogel et son groupe lors de l’enregistrement de Traversion, le groupe et Vogel concoctent un projet jazz/rock nommé Offenbach En Fusion. Il est enregistré en spectacle les 30 et 31 mars 1979, au théâtre Saint-Denis. Il deviendra le premier disque d’or du groupe. Bob Harrisson remplace Lavoie à la batterie. Offenbach devient, le 3 avril 1980, le premier groupe québécois à se produire au célèbre Forum de Montréal devant une foule de 10 000 personnes. Suit une tournée en France et un spectacle à la Place des Nations de Montréal avec Chuck Berry. Depuis son arrivée dans le groupe, John McGale s’impose peu à peu en tant que compositeur. L’album Rock Bottom, deuxième album anglophone du groupe, voit le jour. Sorti simultanément en France et au Québec, cet album passera complètement inaperçu.
Malgré cet échec, McGale ne s’avoue pas vaincu et reprend l’écriture, seul ou en compagnie de Breen LeBoeuf. Il compose la musique de cinq des dix chansons du nouvel album Coup de foudre, qui sortira en 1981. Enregistré dans un édifice désaffecté afin d’obtenir un son « live », cet album est bien reçu par la critique musicale. Malgré le peu de succès radiophonique, il connaît du succès auprès des admirateurs du groupe. Comme à chaque nouvel album, le groupe part en tournée à travers le Québec, cette fois-ci en compagnie de Garolou et de Zachary Richard. La tournée se terminera le 4 juin, au Forum, en compagnie de Joe Cocker.
L’année 1982 amène son lot de changements pour le groupe : le remplacement de leur gérant et le recrutement de Pat Martel comme batteur. À la fin de cette même année, Offenbach se retrouve à Québec pour créer un nouveau disque. L’enregistrement deviendra un marathon de 22 jours et le disque s’intitulera « Tonnedebrick ». John McGale compose huit des dix chansons, tandis que Gerry Boulet, ayant la tête à un album solo, n’en compose qu’une. Malgré des ventes décevantes, le groupe se retrouve encore une fois sur la route, en compagnie de Plume Latraverse. La tournée se termine le 17 septembre 1983 par l’enregistrement, au Forum de Montréal, de l’album en spectacle À fond d’train.
Au cours de 1984, Gerry Boulet sort son premier album solo, « Presque 40 ans de blues », et Offenbach est plus ou moins mort. Le groupe entre toutefois au Studio Multisons en 1985 pour enregistrer ce qui deviendra leur dernier album original « Rockorama ». En collaboration avec Michel Rivard, l’album contiendra quelques succès dont Seulement qu’une aventure et La louve.
Après la tournée la plus courte de leur histoire, seulement deux spectacles (un à Québec et l’autre à Montréal), Offenbach donne son spectacle d’adieu le 1er novembre au Forum. On enregistre l’album « Le dernier show [archive] » devant une foule en délire lors de cet ultime spectacle. Ce dernier opus permettra au groupe d’obtenir un autre Félix pour le « Spectacle rock de l’année ». Un DVD de ce spectacle sera disponible quelques années plus tard dans le coffret « L’Ultime Offenbach [archive] » (2 CD + 1 DVD [L’intégrale du dernier show d’Offenbach au Forum le 1er novembre 1985].
Notes
Un gros merci à Famille Rock et à Marie-Cécile Bacquaert, ma grande amie poète qui habite en Europe et qui travaille à l’Institut Médicopédagogique qui m’a aidé pour les notes biographiques.