Sylvain Campeau : Présences, faims. Par Ricardo Langlois
Plusieurs perspectives fabuleuses. Le poète Sylvain Campeau dévoile l’Amour, le Désir, la Soif de vivre. « Chaque instant est un miracle échappé au grand jour devenu souvenir » (p. 26 ). Je me reconnais facilement. Un frère d’armes qui aime la vie. Que dis-je? Le miracle de la Vie. « L’errance amoureuse » (Barthes).
Le théâtre du ciel
On traverse l’espace. Le ciel comme un théâtre. Une poésie qui s’enfonce avec une sorte d’innocence. Vers quelque chose d’inexprimable. Un contact avec la sainte réalité. Une cosmologie de l’intériorité jusqu’à la stupeur de vivre.
« La lumière est en plomb
Dans le ciel
Passent des ombres chinoises
Lézardes au-dessus
Un sillage dans l’eau déplore
Ma présence
Des rochers verdâtres glissent
Danseurs renversés
Lacs, fleuves, mers et océans
Les vrais continents du monde
Certains soumis à la fellation des astres » (p. 29 )
Ressusciter
L’expérience du sacré dans un élan poétique. Une ouverture. Un jeu verbal. Une quête intérieure profonde qui commence ici-bas. L’Amour humain peut devenir sacré. La vie est brève. On explore le corps mystique.
« Tes lèvres sont gorgées d’espaces
J’afflue de partout
Soudain trop étroit
Pour ce que tu ressuscites en moi » (p. 46 )
« Tu dors
Enrobée de ton âme fragile
Une ondée précède sa brume
Je la reconnais sous mes lèvres
L’amour d’une terre désespérée
Se calme enfin » (p. 57 )
Une grande convocation d’images dans la chambre pleine d’inquiétude, où on a accès à la vraie vie, le vrai amour qui éteint tous les feux du monde. Le poète est plein de visions sur l’amour.
Libérer le trésor
Souvenez-vous de la belle chanson « Libérer le trésor » de Michel Rivard. Ici, l’auteur semble avoir compris la musique du poème du cœur. Il libère en lui tout un monde. Il a une expérience à transmettre. Sensibilité, hédonisme, miroitement des formes. La poésie comme un chemin de rédemption.
« Le jour décroître en nous avant de basculer
Je suis toute retenue
Pour un rien à libérer
La terre est une suppliante
Ses prières recueillies
Comme autant de landes affalées
Nous nous récitons de toutes nos lèvres » (p. 61 )
« Ton âme
Est une psalmodie
Un murmure des
Paumes
Terrible et nocturne
Belle de ce silence
Qui la ceint de partout » (p. 75 )
J’ai pensé à André Roy, le grand poète, pour certains poèmes :
« Tu es venu pour m’aimer, donc pour me perdre. Encore une fois, pour l’étonnement, je demeure très proche des formes, ne sachant qui remercier pour ce monde ni calme ni simple » (2 ).
Sylvain Campeau nous amène à une grande exploration entre corps et esprit. Ce recueil de poèmes est remarquable. Source de prodiges. Bilan sur l’Amour avec des images fortes. Une sorte d’appel à un dépassement de Soi.
Notes
1. Un trou dans les nuages est le cinquième album studio de Michel Rivard sorti en 1987 sur disques Audiogram.
2. André Roy, L’accélérateur d’intensité, Les Herbes Rouges 2019 (Réédition)
Sylvain Campeau est poète, critique d’art, essayiste et commissaire d’exposition. Il a maintenant huit recueils de poésie à son actif, des essais sur les arts visuels et une anthologie de poètes québécois aux Herbes Rouges.
Le livre « Présences, faims » a fait l’objet d’une première édition en 1995, aux Éditions Trois, sous le titre : La pesanteur des âmes. La version présente a fait l’objet de quelques modifications.
Sylvain Campeau, « Présences, faims » Pierre Turcotte Éditeur Collection Magma Poésie dirigée par Christophe Condello.
Disponible sur pierreturcotte.com
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