Mathieu Simoneau, Des longueurs dans le crépuscule

Une photo en noir et blanc d'un homme portant des lunettes et une chemise rayée nommé Mathieu Simoneau. Une photo en noir et blanc d'un homme portant des lunettes et une chemise rayée nommé Mathieu Simoneau.
Mathieu Simoneau, Des longueurs dans le crépuscule. Par Ricardo Langlois
Comment percevoir le Réel sinon à travers l’élaboration des images. Les métaphores de Simoneau se brisent de partout. Ça va au-delà dune proclamation abstraite. Chaque poème est une véritable polyphonie. Marie Duguay parlait de « régénérescence perpétuelle. » (1 )
Ses craquements de lumière

« Laube me montre les dents

De vieilles traces fauves

Circulent

À la chute de los

Dans les coins sombres

Les branches

Nont plus quun seul chemin boueux

À suivre

Jusqu’à lattisée

Ses craquements de lumière. » (p. 13 )

Je me suis plongé dans un univers où la mort ne peut rien contre les berceuses. Est-ce quon entend un semblant de chant à la vie? Je me suis mis à réciter à voix haute certains passages. Je suis dépaysé par la puissance des mots. Un déluge dans la chambre de ladolescent. Je suis entré dans lamer. Une blessure quelque part (l’épreuve ontologique ).

La nuit du 27 mai

Cette lumière va croître jusque dans certains jardins secrets. Cette nuit-là (le 27 mai ), jai lu une symphonie de tendresse. Une liste complète de mes états d’âme. Même ceux que je ne comprendrai jamais. Cest lacceptation. Larchitecture du désir. Les petites vérités du poète. 

« Par la fenêtre

Mathieu Simoneau, Des longueurs dans le crépusculeJe suis la lumière

Dest en ouest

Je maccorde à sa fuite

Inépuisable. » (p. 20)

«  Jespère un épuisement du noir

Au cœur des astres insaisissables. » (p. 24 )

« Nous aurons la patience

Darracher les clôtures

Nous pousserons nos troupeaux

Dans l’éternité

Lavenir se lèvera à six heures

Avec ses fauves. » (p. 31)

Plusieurs sont morts à chercher lidéal.

En vous lisant, jai pensé aux grandes vérités. À la ferveur du poète qui cherche à regarder le soleil dans le blanc des yeux. Cette obscurité va toujours être là. Dans notre quotidien depuis lenfance, les images qui se multiplient dans linconscient. Çatraine au fond de nous, jai pensé à Louise Dupré :

« Au fond de ta douleur

Tremble quelques images ()

Tel lincohérence du monde

De cette fausse clarté

À labandon. » (2 )

Écrire est un acte de résistance. Écrire, cest vivre dans un rien de lueur. Comment extradée de votre lumière?  Attendre, comme on regarde un feuLinstant privilégié (la sphère du cœur ).

« La lenteur est un dieu

Quon enterre

Avec ses échos. » (p. 55 )

Jai pensé au dernier livre de Louise Dupré :

« Tu te demandes comment agira ton âme quand elle

Plus de mémoire de la douleur. Peut-êtres era-t-elle si soulagée quelle oubliera tout regret » (3 ).

Jai lu « Des longueurs dans le crépuscule »comme une longue réflexion sur le sens de la vie, la blessure dans les eaux grises. L’écho de la clarté, la séduction du souffle. Un pacte sur la trajectoire dun poète qui scintille jusqu’à la dérive.

Jai aimé vous lire dans vos pensées les plus intimes. Pour moi, vous êtes un poète qui sculpte dans les distorsions avec laile du temps.

Notes

1.Marie Uguay, « Journal »,  Boréal,Compact 2015.

2. Louise Dupré, « Noir déjà »,  Le Noroït 1993.

3. Louise Dupré, « Exercices de joie »,Noroït 2022.

Titulaire dune maîtrise en création poétique, Mathieu Simoneau a publié des textes et des critiques dans des revues, notamment Moebius et Le Sabord. Son premier recueil, « Il fait un temps de bête bridée », est paru au Noroït en 2016, suivi de « Par la peau des couleuvres » en 2019.

Mathieu Simoneau, «Des longueurs dans le crépuscule», Noroït 2023.

Le Pois PenchéPoésie Trois-Rivière

Ricardo Langlois a été animateur, journaliste à la pige et chroniqueur pour Famillerock.com