Piégé dans les griffes d’un prédateur

Entretien avec Dominique Théberge, auteur de  « Piégé dans les griffes d’un prédateur », Éditions  de Mortagne[1]. Paris, le 21 septembre 2023. Par Laurent Beurdeley Né en 1984, Dominique Théberge fut un enfant sensible qui souffrit de l’absence de figure paternelle (son père décéda d’un cancer tandis qu’il avait cinq ans). Diffèrent et hyperactif, il cumula les échecs scolaires, source d’une importante perte d’estime de soi.
Dominique Théberge, Paris, 21 septembre 2023. Auteur : Piégé dans les griffes d'un prédateur. Dominique Théberge, Paris, 21 septembre 2023. Auteur : Piégé dans les griffes d'un prédateur.
Dominique Théberge, Paris, 21 septembre 2023. Auteur : Piégé dans les griffes d'un prédateur.

Entretien à cavec Dominique Théberge, auteur de «Piégé dans les griffes d’un prédateur», Éditions  de Mortagne[1]. Par Laurent Beurdeley

Né en 1984, Dominique Théberge fut un enfant sensible qui souffrit de l’absence de figure paternelle (son père décéda d’un cancer tandis qu’il avait cinq ans). Diffèrent et hyperactif, il cumula les échecs scolaires, source d’une importante perte d’estime de soi. C’est aussi préadolescent qu’il découvrit son homosexualité, ce qui est rarement simple, et donna lieu à de profonds questionnements. Mais surtout  il  entretient une relation singulière avec un enseignant, Raymond Perron, qui conscient de l’extrême fragilité du garçon, instaura habilement avec ce dernier un jeu de séduction et de manipulation qui lui permit avec beaucoup de précautions d’assouvir régulièrement ses pulsions sexuelles sans la moindre violence physique. Dominique, qui n’avait alors que 14 ans, ne se percevait  aucunement comme une victime d’abus sexuels et s’enferma longtemps dans le déni. Néanmoins cette situation ne fut pas sans générer de multiples séquelles, des traumatismes psychologiques profonds, des épisodes de dépression qui semèrent la confusion dans la psyché du garçon, altérant ses relations avec son entourage, son rapport aux autres, avec d’irrémédiables répercussions sur sa vie sentimentale.

Un parcours de vie chahuté qui acculera Dominique au pire, à plusieurs reprises, avant une renaissance spectaculaire non dénuée de quelques irrémédiables rechutes. Son récit empreint d’une grande honnêteté et sincérité livre sans ambages dans un langage brut et limpide, dépourvu d’artifices stylistiques, la spirale infernale dans laquelle il sombra et s’abîma peu à peu. Mais si le jeune homme trébuche souvent, il se relève mû par un vibrant désir de survie, animé par une volonté de s’extirper de ce cauchemar. Et c’est peu à peu qu’il reprend confiance en lui, apprend surtout à s’aimer, se reconstruit en multipliant les projets où il s’épanouit pleinement en s’investissant au sein d’organismes humanitaires, d’associations militantes et dans la vie  politique.  

 ●Dominique livre dans cette entrevue plusieurs précisions qui ne figurent pas dans son ouvrage

Bonjour Dominique,

Comment s’est déroulé le processus d’écriture de votre récit ? Noircir la première feuille fut-il un exercice ardu d’autant que durant votre scolarité vous avez été diagnostiqué dyslexique et dysorthographique ?

J’avais vraiment besoin de m’exprimer. Dès les premières lignes, les mots coulaient tous seuls, je n’ai jamais eu le syndrome de la page blanche.  En début de chapitre, je suis toujours inspiré, c’est plutôt clore le chapitre qui s’avère le plus ardu pour moi …j’ai été bien accompagné par une amie, Laurence, qui était l’une de mes clientes lorsque j’étais conseiller financier, elle a effectué la correction de mon manuscrit avant que je l’envoie  aux maisons d’édition. L’écriture a été un processus essentiel, il m’a permis de faire la paix dans ma vie. Quant aux problèmes de dyslexie et de dysorthographie, rien n’a été un frein à ma détermination. En fait, tout repose principalement sur mon temps d’écriture et de lecture qui est de trois à quatre fois plus long que pour les autres. J’ai également utilisé le logiciel Antidote (correcteur grammatical).

Avez-vous été confronté à des moments de découragement avec les irrémédiables réminiscences douloureuses de votre lourd passé ?

 De multiples interrogations surgirent lors du processus d’écriture : mon histoire est-elle assez tragique ? Des personnes vécurent des faits bien pires que moi. C’était un peu le syndrome de l’imposteur qui revenait régulièrement. Et je me demandais si mon récit était vraiment susceptible d’intéresser un public. Toutes ces questions me taraudaient souvent ».

La recherche  d’un éditeur fut-elle aisée ?

« J’ai adressé mon manuscrit à plusieurs maisons d’édition à Montréal (précisément à six d’entre elles) et j’ai reçu une réponse positive de publication de l’éditeur de Mortagne en moins de deux semaines. En général, je savais que cela demandait plutôt de longs mois avant d’avoir le moindre retour. J’ai été impressionné par ce délai aussi court ».

Quel fut votre sentiment lorsque le livre fut  publié après trois années d’écriture ?

Beaucoup de joie, l’ouvrage est relativement tragique aussi, j’ai voulu à travers ce livre changer les choses ; je dénonce, entre autres, le système judiciaire, le système d’éducation.

Vos difficultés scolaires sont récurrentes (vous triplez votre secondaire 2[2]). Le système éducatif classique québécois paraît bien peu adapté à votre « hyperactivité » ; ce qui n’est pas sans expliquer les renvois multiples de plusieurs établissements scolaires publics et privés dont vous faites l’objet.

« Oui ce n’était aucunement adapté à un hyperactif.  J’étais la « bibitte[3] » dont personne ne veut s’occuper.  Personne ne veut éduquer cette « bibitte ». On préfère focaliser son attention sur les élèves sages, qui s’inscrivent dans le moule, dans la norme. Toute ma vie, j’ai rêvé d’avoir un mentor pour mieux canaliser ce que je suis, mes énergies, mes folies, mes instincts. En dépit de mon déficit d’attention (le TDAH) mon français était très bon. Il y a des mots que j’utilisais à 12 ans que même mes enseignants n’employaient pas comme le terme « ostraciser » par exemple. J’ai toujours une curiosité, lorsque je découvre un mot dont j’ignore le sens, je cherche systématiquement la définition dans le dictionnaire et j’ai une assez bonne mémoire. Je manifestais également un vif intérêt  pour le passé, je connaissais par exemple,  l’histoire d’Isabelle de Castille avec Ferdinand d’Aragon.

Votre impulsivité et votre trouble de l’attention qui freinent votre concentration et vous distraient en classe  (tout en vous marginalisant parmi vos camarades de classe) furent diagnostiqués à quel âge ? Le seul traitement prescrit fut semble-t-il la Ritaline. Son utilisation est controversée, elle génère de nombreux d’effets indésirables telles que l’insomnie, l’irritabilité et crée une dépendance physique et psychologique.

Oui le diagnostic fut posé vers l’âge de sept ans. La ritaline, c’est l’équivalent du speed (amphétamine) ; cela  provoqua beaucoup d’effets secondaires chez moi. Mais sans ce traitement, la situation aurait été pire, j’étais un paquet de nerfs surstimulés. J’en ai pris jusqu’à l’âge de 13, 14 ans. Cette substance crée du bonheur, procure un indéniable bien-être et donne ainsi le sentiment d’être normal et que tout est plus facile. C’est la transition après la fin de la prise de la ritaline qui s’avéra difficile à cause de la dépendance. Un peu plus tard, c’est l’alcool qui est venu pour compenser.

Vous avez dédicacé votre ouvrage à plusieurs de vos professeurs qui vous ont soutenu et encouragé et qui furent bienveillants. Néanmoins, dans votre récit, vous citez une enseignante en mathématiques qui se révéla un bien piètre pédagogue et c’est un euphémisme. Elle vous dévalorise et vous humilie devant la classe en tenant à votre égard des propos odieux : « Vous êtes hors catégorie, celle où il n’y a pas d’espoir ou l’espoir est vain ; cette catégorie est tout de même très importante, car c’est là que se retrouvent ceux qui nettoient la marde[4] autour des toilettes dans les centres commerciaux ou qui ramassent les canettes dans les poubelles des parcs [5]». Ces allégations sont  d’une violence inouïe, indigne d’un membre du corps enseignant.  Quel est votre état d’esprit à ce moment-là ?

« Elle n’a pas été la seule à agir ainsi, mais dans mon récit, j’ai souhaité citer l’exemple le plus extrême. Je l’appelais la vipère du Far West, elle était vraiment la pire, la plus détestable. C’était pourtant une femme qui avait de l’expérience dans son métier, elle devait avoir la cinquantaine. Elle représente le type d’enseignant qui ne veut pas s’adapter. Le monde change rapidement, on découvre de nouveaux diagnostics psychologiques, mais, elle, rejetait l’hyperactivité ; elle considérait que cela n’existait pas. C’était un déni total. Elle allait trop vite et j’avais ainsi de sérieuses difficultés à prendre des notes. Elle m’accablait or j’ai naturellement des facilités en mathématiques. Je n’avais aucun problème de compréhension des formules, j’avais les capacités intellectuelles. Elle me reprochait ma lenteur. Mais je parlais également sans cesse en classe et je manquais de concentration. Je suis devenu sa tête de turc, peut-être aussi parce que je n’hésitais pas à répliquer. Il y a toujours eu une profonde animosité entre nous. Elle m’a souvent traité d’abruti en remettant les notes d’examen.

De votre premier manuscrit au récit publié, l’éditeur a imposé de multiples coupes. Quel fut le passage amputé qui  vous a le plus affecté ?

Il y a eu négociation sur ce point, mais je dois reconnaître que les multiples coupures du texte furent très douloureuses. Comme mon récit évoquait un sujet lourd, je voulais que le lecteur puisse respirer à certains moments, et j’ai parsemé mon texte de propos humoristiques, mais ils ont  été effacés. Mon souhait était qu’apparaisse mon investissement en politique, mais cette expérience avec d’autres succès de mon parcours de vie furent également amputés par la maison d’édition qui entendait avant tout privilégier le sujet de l’agression sexuelle.  Il y avait  aussi à l’origine au sein du chapitre 18 du livre intitulé « Je suis toxique » bien plus  de développement sur mon processus d’émancipation. Quant aux relations conflictuelles avec mon beau-père, elles ont été éliminées également.

Le décrochage scolaire qui chagrine et désespère votre mère sera à l’origine d’une profonde mésestime de vous-même qui fut, entre autres, à l’origine des premiers actes d’automutilation. Vous vous infligez des blessures (tels que des coups de poing au visage,  chocs sur la tête,  entaille de l’épiderme, etc…). Ces souffrances physiques qui semblent vous procurer un réel apaisement en réduisant les tensions ne créent-t-elles pas également une dépendance ?

L’automutilation crée une dépendance et réduit les tensions psychologiques. On le voit encore chez certains catholiques qui pratiquent la flagellation.  Enfant, j’étais très pieux, je voulais devenir prêtre (rire). Je rendais souvent visite au prêtre du quartier et je passais du temps avec lui ; j’étais servant de messe ; c’était avant les agressions de Raymond. Toute l’éducation judéo-chrétienne que j’ai reçue explique la mauvaise image que j’avais de moi. Ensuite, je me suis senti comme le mauvais chrétien qui ne rentre pas dans le moule comme les autres moutons. Puis il y a eu l’homosexualité qui m’a culpabilisé, je suis devenu un pécheur ; ma famille est très religieuse.

Cette mauvaise image de vous-même (« Je trouve toujours de bonnes raisons de me blâmer et de me faire du mal[6]) monte crescendo avec d’autres perturbations intérieures qui se greffent sur vos difficultés scolaires (votre inclination pour les garçons, les attouchements répétés de Raymond, votre mentor) qui se traduisent par un trouble du comportement alimentaire  (anorexie), la consommation d’alcool. Tous ses excès soulagent-ils votre sentiment de culpabilité ? 

Je fréquentais des amis qui étaient de petits délinquants, je buvais de l’alcool et cela a accentué ce phénomène vers les 15-16 ans. Je dissimulais du whisky ou de la vodka dans des bouteilles d’eau et je buvais en classe. J’ingurgitais de l’alcool à forte dose. Il y a certainement des personnes qui ont dû percevoir quelque chose comme pour toute mon histoire avec la chute drastique de mes notes mais c’est bien plus confortable ne pas s’en occuper. « Dont ask dont tell », d’aucuns ont fermé les yeux pour ne pas avoir de problèmes à résoudre, j’en suis persuadé.

Puis un jour le désespoir est tel que vous décidez  de vous ôter la vie. Il y eu plusieurs tentatives de suicide : après la déclaration d’amour de Matthieu, qui s’automutile en s’ouvrant le bras avec une lame de couteau. Une autre fois, c’est sur le pont Jacques-Cartier à Montréal (celui où d’ailleurs le cinéaste Claude Jutra a mis fin à ses jours) que vous vous apprêtez à passer à l’acte. Heureusement un policier lucide interrompit votre funeste dessein et vint à votre rescousse. Puis à nouveau lorsque vous êtes remis en cause par une association dont vous étiez devenu le président (vous avez 25 ans, vous ne pouvez l’accepter, c’est trop d’émotion qui déborde, semble-t-il). Qu’est-ce qui selon vous est le plus insupportable dans ce moment-là ?

Matthieu ne voulait pas se suicider, il s’est entaillé le bras pour montrer qu’il  était prêt à endurer les mêmes souffrances que moi et j’ai réagi de façon excessive à cette situation. J’étais honteux d’être à l’origine du mal de quelqu’un d’autre, toujours le poids de la morale judéo-chrétienne qui refaisait surface. Je voulais être un chevalier blanc, aimé par tous et je voyais que j’étais devenu très égoïste, manipulateur. Je détestais ce que j’étais devenu et en plus je culpabilisais vis-à-vis de Mathieu qui allait  devoir porter une cicatrice pour le restant de ses jours, par ma faute ; c’était trop pour moi. Le policier qui est intervenu pour interrompre mon geste m’a d’ailleurs ramené à la maison (je vivais avec mon chum, Jeremy à l’époque). À propos de l’association, j’ai été désavoué et je l’ai ressenti comme une injustice ; j’étais très isolé à ce moment-là. C’était une période de ma vie où je suivais des cours de soins infirmiers, j’avais l’impression de ne pas faire partie de la société, d’être une fois de plus, le mouton noir. La réponse de mon corps a été extrêmement violente et soudaine, j’ai avalé des anxiolytiques et je me suis retrouvé en hôpital psychiatrique.

Il y a aussi des moments de grâce dans votre existence pour le moins particulièrement chaotique. Vous représentez « Jeunesse Lambda », un organisme de soutien aux homosexuels lors d’un évènement médiatisé en présence d’un ministre …  Ce sont des instants de respiration, d’estime de soi. Vous vous lancez dans la lutte contre l’homophobie en rejoignant l’ALBIG (Association lesbien, bisexuel et gay du cégep Édouard Montpetit) dont vous devenez le président. Par ailleurs, vous exercez différents emplois  (dont celui  de conseiller financier) et vous parvenez à entamer à nouveau des études, vous disposez même de votre propre appartement. Mais en dépit de ces réussites, sur le plan émotionnel, ce sont encore les montagnes russes qui rythment votre quotidien.

À certains  moments de ma vie, les planètes se sont alignées.  Lorsque tu es entouré des bonnes personnes, c’est comme une plante dans la bonne terre, nécessairement tu grandis. Lorsque j’étais conseiller financier, j’étais entouré de gens qui croyaient en moi.

Vous  prenez conscience de votre inclination pour les garçons assez tôt  (« ce n’est pas un choix, c’est un fait » affirmez-vous [7]). Cette découverte vous questionne néanmoins. Parvenez-vous à trouver des personnages à qui vous identifier à la télévision ou au cinéma ?

Je me suis identifié essentiellement à des politiciens (la maison d’édition n’a d’ailleurs pas souhaité que je les mentionne dans mon récit). Il s’agit de deux ministres du Parti québécois (PQ) ouvertement gays, André Boulerice et André Boisclair (lequel a été mis en cause en 2020 dans plusieurs affaires judiciaires dont des agressions sexuelles commises entre 2014 et 2015 [8]).  Je les ai rencontré tous les deux dans le cadre de l’association « Jeunesse Lambda » où ils étaient donateurs.  Il était également avéré que Claude Charron [9], bras droit de René Lévesque[10], était également homosexuel. Le Parti Québécois a soutenu l’union civile au Québec et le mariage gay. Jusqu’à cette rencontre, la politique ne me semblait pas accessible lorsque l’on était homosexuel. Ces deux hommes politiques là, qui n’étaient pas des « folles », sont devenus mes modèles. Je suis né en 1984 et la représentation des homosexuels sur le petit écran se réduisait à des personnages dont on riait, c’était toujours des « fofolles », c’est-à-dire des caricatures grotesques de l’homosexualité.

Vous n’évoquez votre homosexualité ni à vos frères ni à votre mère. Finalement, le seul dans la confidence sera Raymond Perron, votre abuseur  (son fils Maxime est d’ailleurs également homosexuel). Il n’était pas envisageable de faire cette révélation au sein de la cellule familiale ?

C’était beaucoup trop tabou au Québec à cette époque-là. J’avais une bonne camaraderie avec mon frère Jacob, je ne voulais pas le décevoir en révélant quoi que ce soit. Ma mère était très catholique, c’était impossible pour moi. J’avais par contre une marraine, la sœur de ma mère, à qui je l’ai confiée (cela n’apparait pas dans le livre) ; elle était professeur de religion comme Raymond Perron. Cette femme a été extraordinaire dans ma vie, dans les réunions familiales lorsque j’éprouvais le besoin de parler, c’est vers elle que je me tournais systématiquement.

En 2001, vous avez 16 ans et vous assumez  ouvertement votre homosexualité. Quelle fut la réaction de votre entourage ?

Mes frères ont très bien réagi ; ils firent preuve de beaucoup de compréhension à mon égard. Pour ma mère cela a été bien plus difficile, elle m’a également reproché de l’avoir révélé bien avant à sa sœur et non pas à elle.

Après avoir feuilleté par hasard une brochure sur l’orientation sexuelle, vous rejoignez un groupe de discussion gay (« Jeunesse Lambda ») qui vous procure un indiscutable réconfort. Avez–vous évoqué durant ces temps d’échanges votre relation particulière avec Raymond ?

C’était un centre communautaire sur Montréal qui organisait des rencontres une fois par semaine entre des jeunes gays de moins de 25 ans encadrés par un intervenant qui anime un jeu de questions réponses entre les participants. J’ai toujours été très introverti, je me donnais des défis comme parler pendant ces réunions. Dans ce moment-là, j’avais 16 ans et le sentiment d’être le mouton noir qui hantait ma vie au quotidien disparaissait, j’étais enfin parmi les miens pour la première fois de ma vie, c’était vraiment mon ressenti. Au sein des  groupes, on abordait des sujets plutôt légers et on n’évoquait pas notre vie intime. Il y a juste un homme à qui j’ai relaté ma relation avec Raymond, mais ce n’est pas cité dans le livre. Il se trouve que dernièrement j’ai revu, André, l’animateur de « Jeunesse Lambda » et je lui ai avoué qu’un participant de l’association avait abusé de moi sexuellement et que je pensais ne pas être la seule victime de cet homme de 25 ans. À l’époque, j’avais gardé le silence parce que je pensais que ce comportement était normal ; André fut estomaqué par cette révélation. Je suis en train de me demander si je dois ou non déposer une plainte à la police. Si j’ai quitté « Jeunesse Lambda » c’est en raison de cette relation-là. J’en ai parlé à mon psychologue qui me suit et à personne d’autre jusqu’à présent.

Vous indiquez n’avoir jamais été intimidé pendant votre scolarité pour votre orientation sexuelle. Avez-vous tu votre homosexualité pour vous protéger de la meute et ainsi vous prémunir de tout harcèlement ?

Oui je me tenais avec la meute mais je ne pense pas que la meute que je fréquentais était homophobe. J’ai fait un peu d’intimidation, pas à l’encontre d’un garçon homosexuel, mais à un plus faible que moi  pour avoir le contrôle de quelque chose dans ma vie. C’était en fait un camarade avec qui j’étais dur mais cependant sans aucune once de méchanceté de ma part. Si cela avait été le cas je me serais senti ensuite coupable et ma morale judéo-chrétienne m’aurait incité à m’automutiler encore plus. Et pour me protéger, je savais que je ne devais pas faire ça.

Adolescent vous êtes plutôt épanoui sexuellement avec vos divers amants : Loïc, ou Marco rencontré dans un cours de théâtre (qui vous fait découvrir le cinéma d’auteur en l’occurrence « Maelström » (2000) de Denis Villeneuve), Jérémie (votre amoureux). Vous n’êtes pas dans l’abstinence et la frustration sexuelle d’autant que vous êtes inscrit sur des sites de rencontres où vous aimez vous exposer, charmer et séduire. Vous êtes-vous livré à des confidences  sur l’oreiller sur votre relation avec Raymond avec les amants qui ont compté ?  

Avec Marco ce fut une belle romance naïve (mais l’amour n’a pas suffi à nous rendre heureux ; si nous avions continué ensemble je l’aurais probablement détruit en voulant tout contrôler) ; nous aimions aller au cinéma et nous avons vu un film particulièrement émouvant, « Le Scaphandre et le Papillon[11] » de Julian Schnabel. Avec Loïc, la relation s’est déroulée sur un temps long, sur plusieurs décennies et par intermittence. Loïc se considérait comme hétérosexuel (mais encore aujourd’hui, il n’accepte d’ailleurs pas son homosexualité) ; il venait quelques fois à la maison, nous étions voisins. C’est lorsque j’étais au secondaire 2 (14 ans) que j’ai embrassé pour la première fois un garçon. Quant à mes relations avec mes divers amants, elles étaient exclusivement sexuelles. Ce qui est insidieux dans mon histoire avec Raymond c’est que je n’éprouvais aucunement un quelconque besoin de me confier puisque je pensais que ma relation avec ce dernier était normale jusqu’à ce que j’apprenne que cela ne l’était aucunement.

Vous savez que vous êtes différent (orientation sexuelle, échecs scolaires récurrents) et vous êtes contraint de rejoindre une classe de soutien qui rassemble les élèves en situation de décrochage). Ne pas être dans la norme fut-il difficile à accepter ?

Oui tout à fait, on le voit d’ailleurs dans le film « Crazy » de Jean-Marc Vallée. Lorsque j’ai visionné ce long métrage, je me suis aussitôt dit, ne pas avoir l’amour du père comme on désirerait l’avoir, c’est mon histoire. Ils sont cinq frères dans le film et Zach est le vilain petit canard qui n’aspire qu’à une chose, être comme les autres. Il a y aussi cette scène lorsque Zach en vélo ferme les yeux au franchissement d’une intersection ; il prend un risque qui peut sembler insensé mais il en appelle à Dieu et veut se guérir de sa non normativité. Fermer les yeux dans certaines circonstances est éminemment dangereux mais je l’ai souvent fait en me disant que Dieu allait me sauver. J’ai revu des dizaines de fois ce film qui, selon moi, est un chef-d’œuvre. J’ai peiné à croire que Jean-Marc Vallée était vraiment mort lorsque sa disparition fut annoncée en décembre 2021. Quand le film sort en 2005, j’ai 21 ans ».

Adolescent, vous ne pratiquez aucune activité sportive ni culturelle, les jeux vidéo sont votre seul centre d’intérêt ?

Je fuis la réalité. Dans mon premier manuscrit, je parlais aussi des bandes dessinées mais ce furent les jeux vidéo avec l’interactivité qui captivaient mon attention. Je jouais en général toute la nuit.  En voyant des chevaliers, des magiciens, je  m’immergeais pour mon plus grand plaisir dans un autre monde.

Votre grand-père maternel meurt en 2018, vous soulignez qu’il était un modèle mais vous n’y consacrez qu’une ligne.

J’avais un chapitre complet qui lui était consacré et il a été retiré. Mon grand-père était le plus pieux de la famille, il faisait beaucoup de bénévolat et n’avait de cesse de vouloir aider son prochain.  Il m’a transmis une éthique : l’entraide, la compassion, le pardon ainsi que de toujours s’employer à devenir une meilleure personne. Et bien que j’aie ensuite rejeté la religion, j’ai néanmoins intégré les valeurs d’amour, de respect et de générosité de mon grand-père. Aujourd’hui si je suis autant impliqué dans diverses activités communautaires, c’est en grande partie grâce à lui.

Quels étaient les rapports de vos deux frères avec votre beau-père, Raynald, qui vous frappait souvent et vous méprisait ?

 L’aîné, Jacques, (son prénom de baptême est David) avait de bons rapports avec lui et d’ailleurs encore aujourd’hui. Raynald n’a également jamais frappé Jacob (Daniel est son véritable prénom), c’était seulement très verbal entre eux. Jacob était d’ailleurs bien plus musclé que moi qui étais tout menu à l’époque.

Vous êtes peu prolixe dans votre ouvrage sur vos liens avec vos deux frères. On sait de Jacques, qu’il est brillant, un modèle de réussite, et qu’il vous a hébergé durant quelques jours pendant la période de Noël lorsque vous n’aviez plus de domicile. Il fut votre premier client lorsque vous êtes devenu conseiller financier (mais vous le reconnaissez d’ailleurs, c’est un lien tenu). Acculé en quelque sorte lorsqu’il vous questionne, c’est à lui que vous révélez les abus dont vous avez été victime durant votre scolarité. Quant à Jacob, vous êtes encore plus évasif, on sait juste qu’il fut hospitalisé pour une psychose toxique (les raisons demeurent inconnues).  On a l’impression à vous lire que vous ne formiez pas véritablement une fratrie. Désormais, votre famille est-elle unie ?

Ma mère a fait beaucoup de « grossophobie » concernant ses trois fils, ce n’était jamais assez pour elle, elle voulait toujours nous faire sentir coupable. Mes deux frères, comme ma mère, étaient en surpoids, je ne l’étais pas, j’étais menu étant enfant. Elle ne voulait pas que ces enfants le soient. J’ai  une différence d’âge de six ans avec Jacques et seulement de trois avec Jacob. Jacob et moi nous étions comme chien et chat (ce qui n’est pas relaté pas dans le livre) et la complicité est venue plus tard entre nous lorsque nous habitions à proximité l’un de l’autre à un moment donné ; on était alors dans la vingtaine. C’est essentiellement la culture qui nous a réunis. Notre film préféré était « Le Déclin de l’empire américain » (de Denys Arcand), nous allions souvent au cinéma ensemble. Ce que Marco m’a fait découvrir, je l’ai à mon tour fait découvrir à Jacob, cela a créé des liens forts entre nous.

Ma famille aujourd’hui n’est malheureusement pas unie. Lorsque mon livre fut publié, ma mère,  dans un premier temps n’a pas souhaité le lire (mais il faut reconnaître que la démarche n’était pas aisée pour elle dans la mesure où le récit ne la met pas sous son meilleur jour). Puis elle a lu ensuite l’ouvrage trois fois et aujourd’hui elle a décidé de rompre les liens avec moi. Elle m’a d’ailleurs bloqué sur Facebook. Lors des dernières discussions que nous avons eues ensemble, j’ai posé la question si je ne devais pas dénoncer Raynald pour ses violences physiques faites à un enfant et elle l’a très mal pris ; elle défendait ardemment Raynald. Bien qu’elle soit désormais séparée de ce dernier, elle continue néanmoins à le soutenir.

J’ai beaucoup de difficultés à comprendre cette femme qui n’a de cesse de dire qu’elle a également subi la violence de Raynald. Mon souhait était qu’elle le dénonce avec moi afin que l’on puisse se guérir ensemble. Ma suggestion a reçu une fin de non-recevoir. Elle considère qu’elle pas besoin de faire ça. Elle a aussi pris ses distances avec Jacob parce qu’il me défend beaucoup, il est d’ailleurs devenu l’un de mes plus grands alliés. Avec Jacques, nous sommes en froid, ma mère l’a incité à ne pas lire mon livre, je souhaite pourtant qu’il outrepasse ses conseils afin de bien connaitre mon histoire. Tout ce que j’ai fait dans ma vie, en l’occurrence mes réussites comme conseiller financier, assistant parlementaire, la copropriété d’un restaurant à Chambly, tout ceci n’est jamais suffisant aux yeux de ma mère. Je ne sais pas ce qu’elle veut que je sois, elle est très narcissique et je tiens aussi à me protéger d’elle.

Raymond Perron dispensait des cours de morale. Pouvez-vous préciser le contenu de cette matière. Cet enseignement est-il obligatoire ? 

Oui c’est une matière obligatoire au Québec, auparavant, elle s’intitulait cours de religion et de morale ; j’ai suivi de tels cours, mais pas ceux dispensés par Raymond. J’étais en  secondaire 2  et il était professeur en secondaire 4, soit avec des élèves plus âgés (15-16 ans). L’intitulé de cet enseignement est depuis 2008 « Cours d’éthique et de culture religieuse » (il présente aux élèves la diversité des croyances et des pratiques religieuses existant sur tous les continents) ».

Raymond est un enseignant populaire, estimé par les élèves, il possède un charisme certain. Il vous apporte un net réconfort, de l’affection, de l’attention ; il sait vous rassurer et vous valoriser. Vous l’admiriez[12] et vous vous réfugiez souvent dans son local (« il a été un sauveur », indiquez-vous dans votre témoignage lors du procès[13]). Vous êtes son petit protégé en quelque sorte. Il devient votre confident, plus encore un père de substitution. Dès lors, vous êtes en parfaite confiance d’autant qu’il est connu de votre mère et qu’il a dans le passé soutenu la scolarité de votre frère aîné. Vous allez le laisser agir à sa guise pour ne pas lui déplaire. Vous avez alors entre 14 et 16 ans à l’école secondaire Monseigneur-A.-M.Parent à Saint-Hubert (rive sud). Par le biais de différents artifices (photographie), accès aux ordinateurs pour naviguer sur la toile (où il vous incite indirectement à voir des nus sur des sites) il vous demande sans la moindre violence des faveurs sexuelles et s’enhardit à glisser sa main sous votre chandail, dans votre pantalon et caresse votre pénis. Raymond a ainsi habilement tendu ses filets et mis en place un processus de manipulation psychologique. Il vous invite au restaurant, à son domicile en présence de son épouse Joséphine. Vous n’êtes pas choqué par ses pratiques et sollicitations sexuelles parce que vous le percevez comme une attitude « normale » de la part d’un adulte qui vous aime beaucoup.

Oui à cette époque-là, je n’étais pas capable de distinguer le normal de l’anormal. Lorsque ma mère me prend dans ses bras, je considère que c’est un geste normal, et avec Raymond cela s’est fait de façon insidieuse. En 1990 et au début des années 2000, on n’évoque pas ces choses-là. Les attouchements de Raymond, la main plongée dans le slip, je le faisais déjà avec des garçons de mon âge alors je ne voyais pas d’objection à ce que Raymond puisse le faire. Je ne comprenais pas la relation de pouvoir des adultes, ce sont eux eux qui connaissent les règles à respecter lorsqu’ils sont en position d’autorité. On compte sur les adultes pour t’expliquer tout cela. 

Vous demeurez très longtemps en contact avec Raymond et ceci bien après avoir quitté l’établissement scolaire où il exerçait. Lorsque vous avez 19 ans et que vous êtes en couple avec Jérémie, vous  culpabilisez et vous avez presque honte de n’avoir pas pris de ces nouvelles depuis un certain temps. Même lorsque vous quittez le Québec en vous rendant à Vancouver, vous ne rompez pas le fil avec lui. L’idée selon laquelle il est votre père spirituel semble ainsi bien profondément ancrée.

Pour moi, c’était mon modèle masculin, et avec Raynald mon beau-père qui me rejetait ouvertement et me faisait violence, d’un côté j’avais le bâton et de l’autre la carotte.  Raymond était particulièrement réconfortant, drôle, et également très cultivé ce que j’appréciais. Ce qui n’est pas cité dans le livre c’est que je passais également beaucoup de temps avec d’autres enseignants en l’occurrence ma professeure de sciences physiques et j’allais voir régulièrement Florent et Clément (qui partageaient le même bureau et avec eux, je me sentais vraiment en sécurité). C’était une période où je rendais moins visite à Raymond. C’était vers la fin, ses attouchements m’indisposaient bien qu’ils n’étaient pas systématiques (deux fois par semaine et parfois rien). Raymond n’était pas toujours demandeur, sinon il se livrait à des câlins « malfaisants », c’est-à-dire des câlins qui duraient bien trop longtemps.

Dans votre relation intime avec Raymond, à plusieurs reprises dans votre texte, vous soulignez votre aversion lorsqu’il se livre aux attouchements. Sa langue qui se promène sur le lobe de vos oreilles (vous fermez les yeux et vous songez alors à de beaux garçons) son ventre proéminent, ses dents gâtées et son haleine vous  répugnent. Plus tard, tandis que vous êtes majeur, il vous écœure à nouveau profondément lorsque, sous prétexte d’une séance photo, vous le rejoignez dans un motel où il éjacule sur vous. Votre silence est dicté par la crainte de le perdre ou qu’il vous refuse son estime. Vous désirez ainsi toujours lui faire plaisir.

Le vrai terme serait répulsion. Or cette répulsion je l’ai déjà avec ma mère (elle me prenait dans ses bras et je me sentais très mal à l’aise, je ressentais un sentiment d’étouffement). Être collé sur quelqu’un, c’est inconfortable, je ne le supporte pas hormis bien sûr dans le cadre d’un acte sexuel. Pour moi la répulsion ne veut pas nécessairement dire que c’est mal, c’est juste ma réaction physique, que je considère normale, lorsque l’on me demande des étreintes. En fait, les seuls moments où je n’éprouve pas cette répulsion-là, c’est avec des garçons de mon âge et lorsque je prends un ami dans mes bras.

Raymond perçoit-il ce dégoût ?

Je ne peux pas parler pour lui. Je pense qu’il prend tellement de plaisir avec moi qu’il ne le perçoit pas. Il a bâti sa vie autour de ce plaisir avec des garçons qu’il contrôlait. Les victimes, ce sont son fils et d’autres garçons. Avec moi, Raymond s’est seulement adonné à des attouchements. Mais avec d’autres enfants –ce qui fut établi lors du procès, il y a eu des pénétrations anales ; avec son propre fils, Raymond était le passif. C’est peut-être ce qui explique qu’il n’y a pas eu de tels rapports entre nous puisque je suis moi-même plus passif.

Dans cette vie chaotique, vous faites aussi de belles rencontres, entre autres, avec des enseignants lumineux qui vous écoutent, également avec une jeune fille au style gothique (Melindera qui s’automutile également). Il y avait semble-t-il, une belle complicité entre vous deux, vous l’avez revue ?

Oui je la revois aujourd’hui, elle a fait un donjon dans son appartement où elle reçoit des invités pour des jeux coquins et sensuels dans un environnement thématique. Elle fait également des sessions d’informations et d’éducation sur le sadomasochisme par exemple. Elle a accepté d’être citée dans mon bouquin.

Vous indiquez que Sophie est venue à votre secours à plusieurs reprises, elle vous a  hébergé durant trois mois lorsque vous étiez au plus mal sur le plan psychologique, mais vous êtes peu prolixe sur cette femme ?

Elle est un peu arrivée dans ma vie comme un cheveu sur la soupe. Je regrette d’ailleurs que mon livre n’évoque pas suffisamment les personnes qui m’ont soutenu. Dans mon premier manuscrit, j’évoquais beaucoup Danielle, j’ai passé beaucoup de temps à ses côtés, elle était ma voisine et habitait juste en face de chez moi. C’est à elle à qui je me suis confié pour les violences de Raynald par exemple. Je passais les temps de Noël dans sa famille haïtienne, tout a été gommé comme si elle n’avait jamais existé. Je connais Danielle depuis ma plus tendre enfance et nous sommes encore amis aujourd’hui. On partageait tous les deux la musique, les films, les jeux vidéo ; on parlait des beaux garçons ensemble sans jamais aborder le sujet lourd, elle ne savait pas pour Raymond.

Vous ne déposez aucune plainte concernant Diego, l’Argentin, qui vous a violé. Y avez-vous songé ? Il vous avait invité dans sa chambre, mais lors du rapport intime il n’y a jamais eu de consentement. Diégo avait, à votre insu, administré une drogue dans votre boisson afin de vous manipuler et vous n’étiez plus conscient de ce qui se passait.

Cet homme avait la quarantaine, j’ai pensé déposer plainte (je ne suis pas sûr que Diego soit resté au pays). Je savais pertinemment que ce qui s’était passé entre nous n’était pas normal. Mais comment briser la spirale de la victime, à l’époque je pense que j’étais complètement dépassé par le déroulement soudain des faits. Et cela est arrivé à une période où je devais aider et soutenir mon frère Jacob (qui était hospitalisé pour overdose) ainsi que ma mère. Tout cela me hante encore. Le sentiment de vulnérabilité que j’ai éprouvé après le viol dans la salle de bain, nu sans rien pour me protéger, je pensais que j’allais mourir à ce moment-là.

Une autre source de perturbation fut la décision de votre mère de vendre la maison familiale que votre père avait construite de ses mains. C’est une  démarche  totalement incompréhensible pour vous : « mon monde s’écroule la résidence familiale c’est l’unique endroit sur terre où je me sens connecté à quelque chose [14] ») qui vous afflige particulièrement et vous vous retrouvez à 17 ans sans domicile après votre tentative de suicide.

Ma mère savait que cette vente était une question très sensible pour mes frères et moi. Elle a avancé que c’était un ancien collègue de mon père qui allait se porter acquéreur, ainsi la maison resterait en quelque sorte au sein de la famille. En vérité nous ne connaissions que très peu cet homme. Elle avait assurément une bonne raison de se séparer de la maison (avec le coût de l’entretien de la propriété) mais en vendant, elle a détruit notre famille. Selon moi, elle en avait marre d’être mère, elle souhaitait désormais penser à elle, vivre sa vie de femme. Ce fut un abandon pour nous.

Lorsque vous parvenez à louer un petit appartement avec votre chum [15], vous faites preuve de beaucoup d’abnégation et de générosité. Vous estimez que Jérémie a du potentiel et c’est lui  qui étudie au cégep tandis que durant ce temps vous travaillez de nuit chez un dépanneur [16]  pour assurer l’alimentaire. Vous êtes amoureux, mais votre vie est fade et plutôt bien ennuyeuse (vous dormez la journée) d’autant que vous devez contrôler la moindre piastre. La vie enrichissante de Jérémie commence à susciter votre  jalousie ?

J’avais tellement une mauvaise estime de moi. Je considérais que je n’étais pas digne de recevoir une éducation et que mon conjoint le méritait bien plus que moi. Je m’abrutissais pendant que lui s’épanouissait. J’en ai pris conscience et je me dis à un moment donné que je ne méritais pas ça. C’est moi qui prenait toutes les décisions et qui contrôlait ; dans notre couple, j’étais incontestablement le dominant mais avec un sentiment d’infériorité. Mais je me pose souvent cette question : comment  peut-on  être un dominant inférieur ?

Parfois le ciel se dégage et devient nettement plus serein. On peut parler d’une renaissance entre 2013 et 2014 lorsque vous devenez conseiller financier (à l’âge de 27 ans) au sein du groupe Investors Inc. Vous reprenez confiance en vous ; les membres de votre famille deviennent vos clients, les liens alors distendus avec ces derniers se raffermissent. Gérer des placements est une activité qui n’a pas toujours bonne presse. Mais vous avez une approche empathique et bienveillante, vous vous définissez d’ailleurs comme « un dauphin parmi les requins » ?

J’ai été le premier à ne pas porter de cravate lorsque j’allais rencontrer les clients. J’avais une approche amicale avec ces derniers, ce qui n’était pas commun. Je voulais connaître leur vie, leurs enfants, leurs rêves ; mon souhait était de construire une relation qui repose sur la  confiance et l’amitié. Même si mon approche était différente parce que moins  prétentieuse et plus humaine que celle de la plupart de mes collègues, j’ai obtenu de très bons résultats pour les placements. Dans le domaine de la finance si tu amènes de l’argent on te respecte. J’ai donc été respecté.

Vous avez créé avec un ami, David Bertet, l’association canadienne pour le Droit à la Vérité (qui deviendra « En Vero ») et qui fut reconnue, à votre plus grande satisfaction, comme organisme non gouvernemental à l’ONU. Pouvez-vous préciser les raisons d’être de votre implication au sein de cet organisme ainsi que les actions menées ?

J’avais essayé de  contacter David pour qu’il devienne client lorsque j’étais conseiller financier et lui étudiait  le cas de Florence Cassez, ressortissante française, détenue au Mexique[17] qui  était accusée à tort d’enlèvement. David a beaucoup travaillé sur son dossier et suite à cette affaire, il réalisa qu’il y avait d’autres personnes ainsi injustement condamnées dans le monde. Et il désira ériger une association afin d’épauler ces personnes en situation de grande vulnérabilité. Il m’a demandé de lui donner un coup de mains pour créer l’association. Nous avons soutenu, par exemple, la Québécoise Judith Brassard[18]. J’interviens quant  à moi plutôt sur les questions administratives et financières. En 2023, les activités furent mises sur pause afin d’obtenir préalablement à nos actions des financements fiables à l’international.

Puis ce fut la rencontre avec l’amour de votre vie, Mikaël. Le mariage est célébré le 3 juin 2017, c’est un gage de stabilité dans votre existence jusqu’alors singulièrement tumultueuse. (Vous devenez également propriétaire d’une maison et coassocié d’un restaurant à Chambly, La croisée des chemins). Quant à Raymond, a-t-il reçu un carton d’invitation pour la cérémonie ?

En 2017, il n’était pas invité, les liens n’étaient plus si forts que ça entre nous. Je ne pense pas qu’il en ait été informé bien que ce fut durant une période où je n’avais aucunement l’intention de le dénoncer puisque je n’avais encore pas réalisé ce qu’il c’était vraiment passé entre nous. Les personnes conviées à la cérémonie du mariage étaient la famille proche (mère, frères, oncles, tantes, grands-parents)  après ça, ce sont les amis de notre âge et j’ai aussi invité des clients lorsque j’étais conseiller financier et des collègues de travail. Raymond ne rentrait dans aucune de ces cases.

Vous continuez votre implication sur les problématiques LGBT puisque vous êtes désormais  Directeur général du « JAG » (Jeunes Adultes Gay). Pouvez-vous préciser les missions de cet organisme créé en 1997 (le budget alloué, les ressources humaines)  qui s’adresse à la communauté LGBT en Montérégie (vaste territoire 8800 km2 avec 1,5 million d’habitants) ?

On utilise toujours cet acronyme historique, mais on s’adresse désormais à tous les membres de  la communauté LGBT et ceci quel que soit leur âge. On organise des rencontres individuelles pour ceux qui sont de la communauté ou près de la communauté, pour les parents, par exemple dont le fils fait son coming out et qui ne savent pas vraiment comment gérer cette révélation. Un accompagnement est également mis en place pour les gens de la communauté LGBT en transition (transsexuels). On fait des rencontres de groupes pour briser l’isolement des jeunes (notre démarche est ainsi similaire à celle de « Jeunesse lambda », une structure qui est située à Montréal et qui depuis 1987 fournit un soutien aux jeunes LGBT de 14 à 30 ans). On crée un  espace d’accueil et d’écoute, où chacun est en sécurité pour s’exprimer. On représente le « JAG » au sein de plusieurs autres organismes. Nous proposons des ateliers dans les écoles, dans les entreprises afin de démystifier les questions liées aux problématiques LGBT. Le gouvernement subventionne notre organisme à travers le PESOC [19]. On obtient aussi des financements à travers des élus.  Le budget à notre disposition se monte à peu près à 500 000$ or il serait nécessaire pour véritablement bien fonctionner de recevoir un million $. Il y a sept employés, tous rémunérés et répartis dans trois succursales (à Saint-Hyacinthe [20], Longueuil [21] et Salaberry de-valley[22] »).

Et vous devenez vice-président du conseil d’administration du Shase (qui apporte assistance et soutien aux hommes agressés sexuellement qui résident dans la région de l’Estrie), un organisme que vous aviez déjà fréquenté durant quelque temps (après l’annonce de la sentence infligée à Raymond Perron).

C’est le conseil d’administration qui gère le budget de l’organisme qui est localisé à Sherbrooke. Nous nous rencontrons une fois par mois pour prendre les décisions sur les budgets, sur les subventions que nous pouvons solliciter. La fonction de vice-président est bénévole, m’y investir fut pour moi une façon de remercier cet organisme qui m’a personnellement beaucoup aidé et qui remplit une mission cruciale contre vent et marée. Parce que l’appui aux hommes en 2023 n’est vraiment pas le sujet le plus sexy, le soutien en direction de ces derniers est insuffisant déjà en général et c’est encore  bien moindre concernant le sujet de l’agression sexuelle. Le Shase organise des rencontres individuelles ou bien collectives pour des hommes qui ont vécu des agressions sexuelles durant l’enfance, ou à l’âge adulte dans le but de changer les schémas mentaux de victimisation (cela m’a permis personnellement  de mieux comprendre les miens). Il s’agit pour ces personnes de pouvoir se retrouver dans un milieu où ils peuvent en toute quiétude livrer leurs émotions.

Les chiffres sont éloquents, un homme sur dix sera victime d’une ou de plusieurs agressions sexuelles au cours de sa vie (les deux tiers des victimes sont âgés de moins de 18 ans[23] ) ; les minorités sexuelles courent un risque en moyenne trois fois plus élevé de vivre une agression sexuelle au cours de leur vie[24]. L’équivalent à Montréal de cette structure est le Criphase[25]. Sont bien plus connus les organismes qui soutiennent les femmes, ce qui répondait à un besoin criant (puisque les femmes sont deux fois plus victimes de violences sexuelles que les hommes),  mais après ça, il y a moins de crédits disponibles pour les organismes dédiés aux hommes parce que le plus souvent ils sont perçus comme les prédateurs et les femmes comme les victimes. Il s’agit de briser un peu ce moule-là.

Vous franchissez un jour le Rubicon en décidant en 2018 d’ajouter votre témoignage à celui d’autres enfants abusés par Raymond dont celui de son propre fils Maxime (dont le vrai nom est Marc-André) qui fut ainsi le premier à déclencher le processus judiciaire par le dépôt de sa plainte. Cette décision fut-elle ardue à prendre ?

Le déclic est intervenu lorsque j’ai appris que Raymond avait abusé d’autres enfants et c’est aussi lorsque j’ai su qu’il tournait autour de son petit-fils de 12 ans et qu’il était sur le point de recommencer. Et là, je me suis dit il faut sortir du silence et l’arrêter ; mon objectif était clair, il s’agissait de l’empêcher de nuire. La méthode était simple, la dénonciation des faits.

C’est lorsque vous découvrez que Raymond a agressé sexuellement de nombreux enfants et ceci sur plusieurs décennies (de 1974 à 1977 et de 1982 à 1987 à Chambly) que vous posez pour la première fois le mot pédophile sur Raymond[26].

Dans mon esprit, la relation que j’entretenais avec Raymond n’était pas nécessairement pédophile, il y avait un lien unique entre nous qui dépassait les normes mais qui était orientée sur un trouble sexuel. Et lorsque j’ai su qu’il y avait eu d’autres agressions, je me suis dit que j’étais une victime parmi d’autres et qu’il agissait en fait consciemment.  Ce fut pour moi l’élément déclencheur et  c’est  alors que je me suis dit que c’était un pédophile.

Si Marc-André Perron n’avait pas enclenché le processus de plainte où en seriez-vous ?

Pas là. Le fait qu’il y ait eu d’autres victimes et surtout qu’il pourrait y en avoir d’autres a été  l’information déterminante qui a tout fait basculé. Sans cette précision-là, je pense que je n’aurais jamais agi.

Depuis la fin du procès, votre parcours professionnel évolua, vous devenez l’un des assistants politiques d’Yves-François Blanchet, chef du parti du Bloc Québécois [27], qui siège à la Chambre des communes du Parlement canadien. Que tirez-vous de cette expérience qui dura 18 mois (entre novembre 2019 et avril 2021) ?  

Mon travail se situait plus dans la circonscription qu’au Parlement à Ottawa. J’ai particulièrement apprécié le contact avec les habitants de la circonscription, et surtout lorsqu’il s’agissait de tenter de résoudre les difficultés auxquels ils sont confrontés dans leur vie quotidienne. Il est  ainsi valorisant de contribuer à améliorer les conditions de vie de mes compatriotes. Mais l’aspect purement administratif du travail de bureau était décevant et étouffant d’autant qu’il était parsemé de petits conflits de personnes, ce qui est épuisant à la longue.

Raymond fut arrêté et jugé. Entre ces deux temps, ce fut une longue attente et c’est en août 2021 soit plus de trois ans après votre première déposition au poste de police que le jugement est enfin rendu. Une situation qui vous affecte nécessairement.

Ce fut une plaie ouverte en permanence  qui  ne parvenait pas à se refermer puisque tous les deux mois la date de l’audience était reportée ; ce fut extrêmement pénible.

Trente mois de détention furent requis par le parquet (fruit de tractations entre les victimes et l’accusé qui a plaidé coupable d’agressions sexuelles sur quatre victimes). Une peine qui fut entérinée par le juge et qui vous parait bien inappropriée voire dérisoire.  Dans une interview au Journal de Montréal, vous considérez d’ailleurs qu’il s’agit  « d’une joke[28] » tant le jugement vous paraît  incompréhensible. Mais dans des affaires similaires –agressions sexuelles sur enfants- les peines infligées aux auteurs de ces faits sont-elles si différentes ?  Vous êtes très critique envers le système judiciaire.

On peut  relever qu’il y a moins de jours de condamnation pour Raymond que de nombre  de fois où ce dernier a été l’auteur d’actes d’agressions sur un enfant. Il y avait un cas en même temps, l’arrêt Friesen  (2 avril 2020[29]). Friesen avait agressé un enfant et il n’était pas en position d’autorité vis-à-vis de ce dernier ; il avait écopé d’une peine de six ans de prison. Raymond était lui en position d’autorité. C’est assez technique mais pour qu’une peine plus sévère puisse être prononcée à l’encontre de Raymond, il aurait fallu que la procédure engagée contre lui commença après le 21 août 2021 or elle débuta le 21 novembre 2018.  

Avez-vous beaucoup échangé avec les autres victimes (Marc-André Perron ; Steven Lefebvre … ) avant de prendre la décision de médiatiser l’affaire en demandant de lever l’ordonnance de non publication de l‘identité des victimes. Votre intention était alors d’envoyer un message de prévention, de « sauver de futures victimes [30] ». Mais il semble que ces dernières années, depuis 2017, de plus en plus d’affaires éclosent dans le milieu scolaire impliquant des enseignants, des formateurs,  des entraîneurs sportifs  (qui se sont livrés à diverses agressions sur enfants ou ont diffusé des photos porno juvéniles). Le Journal de Montréal a d’ailleurs publié une liste de pédophiles, des hommes comme des femmes de tous âges (avec insertion de leur visage de profil [31]) qui furent condamnés pour ces faits.

Cette décision a été rapidement prise entre nous, le seul obstacle fut la procureure qui était réticente. Or j’ai vraiment l’impression que le système judiciaire fonctionne comme durant les années 80 ou 70. On met en avant que notre réputation serait mise à mal si nos identités étaient  dévoilées ; que les employeurs auraient ainsi connaissance des agressions que nous avons subies. Mais je considère que cela ne doit aucunement déranger les employeurs aujourd’hui. Il y a à mon avis une totale déconnection entre le judiciaire et le monde moderne.

L’ouvrage sort le jour même que celle de la sortie de détention de Raymond (le 29 mars 2023) qui est âgé de 76 ans.

Oui ce n’était absolument pas prévu, c’est une pure coïncidence. Il lui est formellement interdit de se rendre à Chambly. J’ai remarqué que Raymond apparaît dans un documentaire de l’Office national du film du Canada (ONF[32]) ; il a été filmé au cours de l’un de ses enseignements dans une classe à l’école Monseigneur-A.-M. Parent ; on perçoit d’ailleurs un peu la matière qu’il dispense. Je trouve étonnant de voir que l’ONF ait  conservé un tel document après sa condamnation.

Quels conseils donneriez-vous à des adolescents ou jeunes victimes d’abus sexuels aujourd’hui ?

De dénoncer et de ne pas hésiter à le faire. Toutefois, il y a un préalable à la dénonciation qui consiste à trouver des appuis autour de soi et d’être bien encadré. Avant le dépôt de la plainte au poste de police, je conseille vivement de se rendre dans un Centre d’Aide aux Victimes d’Actes criminels (CAVAC), une structure qui est implantée dans toutes les régions du Québec [33] ; c’est une interface gratuite et confidentielle (j’ai inséré à la fin de mon ouvrage les coordonnées téléphoniques de plusieurs organismes de soutien). Et après, d’aller déposer plainte à la police ».

Vous affirmez « aimer  les gens différents et les  trouver intéressants [34] » ; pouvez-vous expliciter vos propos ?

J’adore connaître des histoires qui sortent de l’ordinaire, j’ai un amour pour les artistes et leur monde. J’aime connaitre le vécu des autres, plus ce vécu sort du commun plus il a des chances de susciter mon intérêt. Mais je ne suis pas de ceux qui se pâment devant la célébrité de tel ou tel surtout si leur parcours est trop linéaire. Mais lorsque tu penses à Xavier Dolan, il y a une riche histoire qui est vraiment atypique.

Avez-vous d’autres projets d’écriture à venir ?

J’ai deux chantiers en cours. Le premier a une dimension postapocalyptique, c’est une histoire qui se déroule dans un Québec futuriste. Le second narre la dégringolade psychologique d’un personnage. Je me suis d’ailleurs inspiré de Matthieu, celui qui s’ouvre le bras ; je reprends son histoire à partir de là.

ADDITIF 

Le 30 janvier 2024 fut organisée, en Montérégie, la première édition de la Journée Arc-en-ciel qui rassembla divers organismes communautaires alliés de la cause LGBT. Lors de cet événement Dominique Théberge (directeur du JAG) attira l’attention sur l’aggravation de l’homophobie et de la transphobie dans la région, déplorant notamment que son organisme ait reçu de multiples courriels haineux (jusqu’à des menaces de mort). Des faits qui s’inscrivent dans un contexte où les queers sont de plus en plus stigmatisés (ainsi par exemple en 2023, des parents manifestèrent contre la présence de la drag queen, Barbada de Barbades, venue lire des contes pour enfants qui traitent d’ouverture, d’acceptation et d’estime de soi ; le courrier d’une directrice d’école primaire adressé aux parents d’élèves afin de les inviter à utiliser le terme « Mx » pour désigner un enseignant non binaire (qui rejetait l’appellation Monsieur ou Madame) déclencha une virulente controverse accompagnée d’un déferlement de commentaires malveillants et injurieux sur les réseaux sociaux. 

Par ailleurs, Dominique Théberge indiqua recevoir de nombreux appels de détresse de jeunes qui découvrent leur homosexualité et qui ne trouvent pas leur place dans la société, d’aucuns révélant des intentions suicidaires. Or le JAG n’est pas actuellement en capacité de fournir un soutien à toutes ces sollicitations et ceci par une insuffisance flagrante de ressources humaines et financières.


[1]   Collection, Fait vécu, mars 2023.

[2]  Le système scolaire québécois est le suivant : Secondaire 1 : 12-13 ans ; secondaire 2 : 13-14 ans ; secondaire 3 : 14-15 ans ; secondaire 4 : 15-16 ans ; secondaire 5 : 16-17 ans.

[3]  Dans le langage populaire québécois, ce terme est utilisé pour désigner la plupart des insectes, des animaux en général,  des individus louches  ou encore l’état d’esprit d’une personne souffrant de problèmes psychologiques, Dictionnaire Québécois

[4] En français populaire québécois, quand le son E se trouve devant un R, il a tendance à s’ouvrir en A.

[5] P. 86-87.

[6] P. 194.

[7] P.141.

[8] Il fut condamné à 24 mois de prison ; il a obtenu une libération conditionnelle en mars 2023, après avoir purgé un tiers de sa peine, François Carabin, www.ledevoir.com, 15 mars 2023.

[9]  Député du Parti Québécois de 1970  à 1982, il fut victime d’homophobie durant sa carrière politique (« l’homosexualité en politique : du secret à la sortie du placard », ici.radio-canada.ca, 6 septembre 2023).

[10] Premier ministre du Québec de 1976 à 1985 (Parti Québécois).

[11] Adaptation en 2007 (avec Mathieu Amalric et Emmanuelle Seigner) du livre éponyme de Jean-Dominique Bauby.

[12] P.253.

[13] P. 252. 

[14] p.182

[15]  Petit ami, amoureux ou copain.

[16] Une enseigne qui vend des produits de base alimentaire et des spiritueux.

[17] Elle a été libérée le 23 janvier à la suite de l’annulation de sa condamnation par la Cour Suprême du Mexique.

[18] Accusée d’avoir commandé le meurtre de son mari, Judith Brassard fut incarcérée dans la prison de Santa Marta en Colombie.

[19] Programme de soutien aux organismes communautaires.

[20] 1195 rue Saint Antoine, bureau 305.

[21] 150 rue Grant, bureau 111.

[22] 107 rue Jacques Cartier, bureau 11.

[23]  Soutien aux hommes agressés sexuellement estrie (SHAS.e)

[24] Ibidem.

[25] Centre de rssources et d’intervention pour hommes abusées sexuellement dans leur enfance. (CRI Phase)

[26] p. 241, p. 255.

[27] Parti indépendantiste.

[28] Erika Aubin, « Des prédateurs dans nos écoles : des employés scolaires accusés de crimes sexuels »,  Le Journal de Montréal, 27 août 2022.

[29] La Cour suprême du Canada envoie un message clair selon lequel il faut imposer des peines plus lourdes pour les  infractions sexuelles commises à l’encontre des enfants.

[30] P. 257.

[31] Erika Aubin, op. cit.

[32] www.onf.ca/film/enfants-des-normes-e2. ONF, Office national du film. Les enfants des normes, par Georges Dufaux.

[33]  Le réseau regroupe 17 Cavac. Centre d’aide aux victimes d’actes criminels. CAVAC.

[34] P.131.

Photo principale : Dominique Théberge, auteur du livre : Piégé dans les griffes d’un prédateur. Crédit photo : Laurent Beurdeley, Paris, 21 septembre 2023.

  • Les opinions exprimées et les noms de personnes mentionnés dans cet article sont la responsabilité de l’auteur et n’engagent que lui-même. Elles ne reflètent pas nécessairement les positions ou les points de vue de LaMetropole.com.
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Laurent Beurdeley est Maitre de conférences à l’Université de Reims, ses travaux de recherches portent sur le Maghreb, les sexualités et les questions de genre (il a notamment publié, « Le Maroc, un royaume en ébullition, éditions Non Lieu). Passionné de cinéma, il a esquissé un portrait de Xavier Dolan (« L’indomptable », éditions du Cram, 2019) et rédige des chroniques de films.